Elles sont toutes là, réunies dans une salle de la Bourse du Travail, pour lancer un vaste appel à la grève et crier leur ras le bol et leur inquiétude. Les 7 organisations syndicales (FO, la CGT, la CFDT, Sud, l'UNSA, la CFE-CGC et la CFTC), accompagnées de l'AD-PA (association des directeurs d'établissements) appellent les salariés d'EHPAD, les personnes âgées, les retraités et les familles de résidents à se mobiliser pour alerter l'opinion et les pouvoirs publics sur les conditions de travail et de traitement des personnes âgées en EHPAD.
Appel massif et unitaire à la grève le 30 janvier 2018
Un vaste rassemblement devant le ministère de la santé
Le mouvement devrait être largement suivi sur l'ensemble du territoire. C'est ainsi que des manifestations sont programmées devant les ARS pour les départements, un débrayage d'une heure est prévu dans les EHPAD de 11h à 12h, et un RDV fixé devant le ministère de la santé à Paris à 14h. " Nous espérons que le grand public se mobilisera à nos côtés car il s'agit d'une première. C'est effectivement la première fois que le secteur se mobilise pour dénoncer la manière dont sont traités et accompagnés nos aînés. C'est indigne de notre pays. Il est urgent de réagir ", déclare un représentant syndical.
Nous sommes des lanceurs d'alerte
C'est ainsi que le représentant Sud entend faire entendre sa voix. " Nous devons porter la parole pour mobiliser la population qui doit s'emparer de cette problématique. Nous voulons aussi donner de la solennité à ce rassemblement. Car la situation est grave. " Bien sûr les organisations syndicales attendent des mesures d'urgence pour pallier au manque de personnels mais le dossier est plus vaste et les revendications nombreuses.
On ne mendie pas
Il n'est pas question ici de faire la charité mais bien de considérer le problème à sa juste valeur. " Aujourd'hui il y a un vrai danger, tempête Christian Cumin, CFTC. On pourrait même parler de non assistance à personnes en danger. Nous avons franchi la ligne rouge. La situation est explosive. " Pour preuve la multiplication des mouvements de grève dans les EHPAD français, près de 120 sur l'année 2017, dont " celui de Foucherans cet été qui illustre bien les difficultés rencontrées. " " Je n'ai jamais connu ca, explique Sandrine Ossart, aide-soignante dans un EHPAD. A l'école on nous apprend qu'une toilette s'effectue en 40 minutes. A l'EHPAD, nous avons 10 minutes pour laver un résident, l'habiller, le lever, l'installer sur son fauteuil. Nous emmenons les résidents au restaurant en fauteuil car cela prend moins de temps, et on préfère les laisser dans leurs couches plutôt que de les emmener aux toilettes. C'est indigne. Nous accélérons leur perte d'autonomie plutôt que de chercher à la prévenir. "
Accompagner dignement nos personnes âgées
" La difficile situation des EHPAD n'est pas nouvelle, précise Pascal Champvert, directeur général de l'AD-PA. Depuis 20 ans, les différents gouvernements proposent tour à tour des petites avancées. Mais c'est largement insuffisant. Nous avons pris beaucoup de retard par rapport à nos voisins européens. Aujourd'hui nos revendications sont de 4 ordres. D'abord les directeurs exigent des excuses de la part de la ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn. Par trois fois, elle les a accusés d'un management de mauvaise qualité. Ils en sont touchés et blessés. Ensuite nous demandons la suppression du décret visant à réduire les moyens de certains établissements. " La nouvelle tarification va amputer le budget des établissements de près de 200 millions d'euros entraînant des réductions de poste. " Nous voulons que les pouvoirs publics engagent une discussion sur un vrai financement de la perte d'autonomie, qu'il s'agisse d'un 5ème risque ou d'une prestation autonomie, afin d'augmenter le temps passé auprès des personnes âgées. Enfin il est urgent de réduire le reste à charge des familles en établissement comme à domicile. Et c'est sans compter les détournements réalisés sur les crédits de la CNSA depuis des années. Aujourd'hui Agnès Buzyn nous " donne " 50 millions d'euros mais 100 millions ont été détournés en 2017 ! ".
Le combat continue
Et pas question de s'arrêter là. " Si les politiques ne se manifestent pas, nous continuerons jusqu'à nous faire entendre ", précise la CGT. " Le PLFSS ne répond pas aux objectifs, nous demandons des moyens humains et matériels pour travailler correctement ". " Les politiques profitent du fait qu'il n'existe pas encore dans notre secteur de mobilisation sociale forte ", ajoute Pascal Champvert. La situation semble être en train de changer.
Un rendez-vous est programmé à l'Elysée mardi 30 janvier à 9h avec la conseillère santé d'Emmanuel Macron, une date mise à disposition par la CGT pour l'intersyndicale. Quoi qu'il en soit, les syndicats ont déjà prévu de se réunir le 31 janvier à 17h30 pour dresser un bilan de l'action. Et comme les salariés, les familles, les résidents ne comprendraient pas que le mouvement ne débouche sur aucune mesure, le mouvement semble n'en être qu'à ses prémices...Une affaire à suivre...