Auguste Deter est allemande et porte un prénom majestueux d'usage chez les femmes au début du XXe siècle.
" Auguste et Alois "
Elle est née à Kassel où trône sur les hauteurs le monument d'Hercule et son cortège aquatique dont la fameuse fontaine cascade de 50 mètres inaugurée en 1714. Toutefois ce 25 novembre 1901 l'esprit d'Auguste est bien loin de ces jeux d'eau puisqu'elle répond à l'interrogatoire minutieux d'un médecin. Lorsqu'il lui demande son nom elle répond : " Auguste " et lorsqu'il précise votre nom de famille elle répond encore: "Auguste". Il lui demande alors le nom de famille de son mari et après avoir hésité elle répond : " J'imagine... Auguste ".
Le lecteur pourrait trouver ce dialogue assez peu exaltant à l'échelle de l'histoire de la médecine, si ce n'était un petit détail d'importance : le nom du médecin en question. Né le 14 juin 1864, il a obtenu son diplôme de médecin et de psychiatre en 1888 et a donc 37 ans ce jour là. Il se nomme Alois Alzheimer et quand il poursuit avec sa patiente en lui demandant où elle se trouve elle rétorque : "Là et ailleurs, ici et maintenant, vous ne devez pas me juger défavorablement" puis elle fond en larmes. Auguste Deter meurt le 8 avril 1906 dans l'asile de Francfort où se passe la scène initiale. Le docteur Alzheimer fera envoyer son cerveau à Munich où il sera analysé pendant 6 mois. On découvrira dans son cortex cérébral de nombreuses plaques et enchevêtrements de neurofibrilles.
Décrit par ses collègues comme un homme travailleur, courageux, clairvoyant et humain, Alois Alzheimer avait décrit 5 cas de démence similaire à la fin de 1909 chez des sujets âgés de 45 à 67 ans. Son chef de service décida alors de séparer cette entité nosologique de la démence sénile déjà connue, sur des aspects d'âge, de forme clinique et d'histopathologie, et de lui donner le nom de maladie d'Alzheimer. On sait désormais qu'en plus des lésions cérébrales décrites sur les premiers cas, on identifie une inflammation et une oxydation accrue. Aussi dans une pathologie aux déterminants multiples et encore mal connus, l'hypothèse d'une origine infectieuse intéresse de longue date les chercheurs.
Aucun agent infectieux n'est réputé causer seule la maladie d'Alzheimer mais le rôle de cofacteur par exemple en association avec un pré déterminisme génétique ou d'accélérateur de l'évolution de la pathologie est étudié avec attention. Parmi les agents infectieux qui retiennent l'attention il y a les Herpes simplex virus, le Chlamydia pneumoniae et désormais Helicobacter pylori. Une étude française récente a porté sur 53 patients dont 20 d'entre eux ont été considérés comme infectés par H. pylori. Les auteurs ont trouvé que chez les sujets infectés, le niveau d'altération cognitive était plus élevé de même que les marqueurs de neuro-dégénérescence mesurés dans le liquide céphalo-rachidien. Si l'hypothèse physiopathologique est cohérente il reste encore à en démontrer la réalité objective.
Et vous, que pensez-vous de l'hypothèse infectieuse ?