Comme chaque année, l'ODAS publie son analyse des dépenses départementales d'action sociale. Une étude toutefois adaptée à la situation exceptionnelle vécue cette année. Les données recueillies par l'enquête annuelle (portant sur 2019) et une enquête flash réalisée début septembre et portant sur le début 2020, permettent de vérifier que la maitrise des finances départementales constatée ces dernières années, et tout particulièrement en 2019, ne résistera pas à la baisse des ressources et à l'augmentation des charges provoquées par la crise sanitaire.
Baisse des ressources et augmentation des charges des départements, constate l'ODAS
En 2019, la dépense nette d'action sociale départementale augmente modérément
Si l'augmentation reste modérée, elle est toutefois supérieure aux années précédentes. Elle progresse en effet de 1,9% par rapport à 2018 en s'élevant à 38,6 milliards d'euros (France métropolitaine). En ce qui concerne la charge nette (une fois déduites les contributions de l'État pour les allocations), elle affiche une augmentation de 2,6%, soit 780 millions d'euros, en raison d'une légère baisse des abondements de l'État et de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie. Le soutien aux personnes âgées, hors personnel, atteint 7,2 milliards d'euros en 2019, soit une augmentation de 0,8% par rapport à 2018. Après déduction des concours financiers de la CNSA, qui représentent 36% de la dépense d'allocation personnalisée d'autonomie (APA), la charge nette progresse de 2,7% en passant de 4,9 milliards d'euros en 2018 à 5 milliards d'euros en 2019.
L'essentiel de la dépense de soutien aux personnes âgées dépendantes porte sur l'allocation personnalisée pour l'autonomie (APA) à domicile (3,6 milliards d'euros) et en établissement (2,5 milliards d'euros). La dépense d'APA à domicile augmente de 2,6% en raison de la hausse du nombre de bénéficiaires (+16 900) tandis que l'APA en établissement reste stable, avec un nombre de bénéficiaires en légère hausse (+ 5 500). Les évolutions des dépenses d'APA à domicile dépassent 10 % dans un petit nombre de départements. Pour les autres, les évolutions sont régulièrement échelonnées de -4% à +7%.
L'autre poste de dépenses important est l'aide sociale à l'hébergement pour les personnes n'ayant pas les ressources nécessaires pour payer leur séjour en établissement. Il s'élève à 1,3 milliards d'euros et diminue donc de 3,7% par rapport à 2018, en raison de la baisse du nombre de bénéficiaires de l'ASH (-1 500 bénéficiaires).
Une enquête flash pour mesurer l'impact de la crise sanitaire
Dans le domaine de l'autonomie, qui regroupe le soutien aux personnes handicapées et le soutien aux personnes âgées dépendantes, l'ODAS observe au premier semestre 2020 une légère augmentation du nombre de bénéficiaires de prestations, APA à domicile et PCH. En effet, les demandes ont continué à être instruites, généralement au téléphone ou en ligne, sauf pour les situations les plus complexes où des évaluations à domicile ont été réalisées. Les services d'aide à domicile (SAAD) ont été dans la plupart des départements confrontés à de nombreuses absences de personnel pendant la période du confinement et ont été conduits à prioriser leurs interventions en faveur des personnes les plus en difficulté (grande dépendance, isolement...). Certains départements ont alors été amenés à dédommager les accueillants familiaux lorsqu'ils ont pallié les difficultés d'intervention des SAAD. L'accueil des personnes handicapées en établissement est resté stable. Par contre, dans les EHPAD, une diminution du nombre de personnes accueillies a pu être constatée en raison de la mortalité importante dans certains établissements et des craintes des familles dans l'ensemble du territoire. Ainsi les nombres de bénéficiaires de l'aide sociale en EHPAD et de l'APA en établissement ont sensiblement baissé. Par ailleurs, les départements se sont bien sûr conformés aux dispositions de l'ordonnance n°2020-313, que beaucoup avaient anticipées et ont maintenu leurs financements sur la base d'une activité théorique pour ne pas pénaliser les établissements. Ceux-ci n'échapperont cependant pas à l'intégration des résultats comptables et à la reprise des déficits éventuels lors de la tarification 2022. De plus, certaines dépenses nouvelles (mesures salariales liées au « Ségur de la santé » ou à des renforcements en personnel, équipements nouveaux, parfois travaux) trouveront leur traduction dès l'exercice 2021. Les départements se sont aussi substitués, surtout au début de la crise sanitaire, aux services de l'État dans la fourniture aux établissements et services sociaux et médico-sociaux de matériels tels que masques, blouses, charlottes... Ces dépenses, de même que les primes versées aux personnels des ESMS, apparaîtront au compte administratif 2020. Au total, les prévisions pour le compte administratif 2020 montreraient une légère hausse de la dépense en faveur des personnes handicapées (+2%) et une augmentation un peu plus importante pour le soutien aux personnes âgées dépendantes (+3%).
Les résultats de l'exercice 2020 seront donc selon l'ODAS probablement très dégradés par rapport aux exercices précédents. Car à l'augmentation des dépenses, il faut agréger la diminution prévisible des recettes. Mais ce constat n'est rien au regard de ce que l'on peut craindre des deux exercices suivants car les conséquences économiques de la gestion de la crise sanitaire ne seront redoutables qu'à partir de l'année 2021. « Il reste à espérer que cette crise n'aura pas que des effets négatifs, précise l'ODAS. Certaines contraintes paralysantes imposées par les dispositifs ou les réglementations ont été supprimées ou allégées sous la pression de l'urgence et du respect du principe de distance physique, redonnant une marge de manoeuvre aux intervenants sociaux et médico-sociaux. Ces évolutions pourraient inspirer les départements et les inciter à repenser certains mécanismes aujourd'hui inadaptés de leurs interventions. Elles pourraient les inciter plus globalement à rééquilibrer en faveur de la prévention les dépenses consacrées à l'action sociale. »