Entretien avec Andy Nguyen, président de l'Union des responsables de blanchisserie hospitalière (URBH) et responsable opérationnel de la plateforme médico-logistique de l'Aude.
« Chaque manipulation de linge doit faire l'objet de la plus grande attention »
Existe-t-il un intérêt à recourir à du linge jetable en Ehpad en cette période de crise sanitaire ?
Non car le virus ne résiste pas au lavage. Il convient en revanche de prendre toutes les précautions pour ne pas mettre le personnel qui manipule le linge en danger en imposant le port des gants, d'un masque et de lunettes et en respectant les règles d'hygiène élémentaires qui avaient peut-être été négligées avant la pandémie et que nous avons tous réappris. J'ajoute que l'usage unique non stérile est loin d'être exemplaire : nous ignorons bien souvent les modalités de stockage et de logistique, notamment les conditions de transport, de ce papier produit aux quatre coins du monde. Les produits à usage unique non stériles - blouses, pyjamas, draps, gants de toilette... - peuvent présenter des défauts d'hygiène. Seuls les produits stérilisés avec un double emballage offrent une garantie de qualité puisqu'ils ont été débarrassés de toute bactérie grâce à une opération de stérilisation. Mais ces dispositifs, dont le coût est très élevé, sont surtout destinés aux blocs opératoires et aux secteurs de réanimation ou d'accueil de patients immunodéprimés. Lorsque je dirigeais la blanchisserie du CHU de Montpellier, les praticiens hygiénistes préféraient le textile traité en circuit court que le linge à usage unique en circuit long.
L'URBH réactualise le « Guide de la fonction linge en Ehpad ». Pouvez-vous nous parler des nouveautés ?
Ce guide fera référence au nouveau guide de la RABC version décembre 2016, publié par l'URBH et le CTTN en 20181. La dernière version de cette méthode doit être scrupuleusement respectée en fonction de l'utilisateur final : les exigences ne sont pas les mêmes dans un hôtel et dans un Ehpad car la sensibilité de l'usager aux germes, aux bactéries et aux virus diffère. La fragilité des résidents doit être prise en considération dans le contexte des Ehpad. Un important volet est également consacré au respect de l'environnement et à l'attention qui doit être portée à la consommation des fluides (eau et énergie), ainsi qu'aux rejets générés par le traitement du linge. Nous insistons beaucoup sur la méthodologie qui est un élément majeur du processus de lavage : si la norme RABC exige une validation du processus pour s'assurer de l'absence de virus pathogènes, il faut également faire preuve de vigilance pour ne pas recontaminer le linge dans le circuit logistique, lors des processus de stockage et des contacts manuportés par exemple.
Que conseillez-vous en la matière ?
Chaque manipulation doit faire l'objet de la plus grande attention et d'analyse de risque afin d'éviter la recontamination du linge propre. L'emballage plastique doit par exemple être évité : le tissu étant un produit qui absorbe et relâche l'humidité de l'air ambiant pour parvenir à un équilibre en fonction de celui-ci, le fait de l'empaqueter peut générer des moisissures. Nous préconisons donc des transports en armoire fermée ou en charriot avec housse interne, puis des rangements dans des armoires fermées ou lingerie dédiée, placées dans des locaux bien entretenus. Le lavage préalable des mains et le nettoyage des surfaces où seront entreposés les textiles doivent aussi être scrupuleusement respectés.