Dans le n° 23-juillet 2012  -  Chronique de Pierre Parneix  902

" Fiat Lux "

Si cette locution latine, signifiant " Que la lumière soit ", est supposée être la première parole de Dieu vous pouvez aussi la trouver sur London road, dans la ville anglaise de Derby.


Elle auréole la statue d'une longue femme au regard perçant et protecteur qui tient dans sa main droite une lampe. Elle est infirmière et son habitude de faire des rondes nocturnes durant la guerre de Crimée lui valu le surnom de " La dame à la lampe ". Elle a 34 ans lorsqu'elle débarque en 1854 au bord de la mer noire dans le plus grand camp militaire Britannique, avec 38 infirmières volontaires qu'elle a personnellement formées. Cette femme, qui arrive au milieu de ces soldats blessés, agonisant dans des conditions d'hygiène épouvantables et décimés par les infections galopantes, s'appelle Florence Nightingale. Issue d'une famille Britannique très aisée, elle doit cependant son doux prénom à sa naissance dans la ville éponyme de Toscane par un beau jour du printemps 1820. Si l'on se souvient de Florence Nightingale comme de la pionnière des soins infirmiers, on oublie parfois certaines de ses nombreuses qualités comme un art maitrisé de l'usage des statistiques. Et il n'est pas de trop pour décrire la situation qu'elle découvre. En effet sur les 731 610 soldats déployés en Crimée, 23% mourront et dans 70% des cas des suites d'une maladie infectieuse dont le choléra fut l'une des pires. C'est d'ailleurs l'armée française qui paya le plus lourd tribut à l'infection avec 59 815 décès.

Florence Nightingale fit le constat que laisser des hommes à l'abandon de tout soin, à commencer par ceux d'hygiène, était un facteur de dissémination des maladies à la faveur de la promiscuité des blessés tant durant leur transport en bateau que lors de leur séjour à l'hôpital de Scutari. Elle focalisa donc ses soins sur les infectés mais proposa aussi de profondes réorganisations des circuits, des locaux et de leur entretien. En 1855, dans le sillage de la dynamique qu'elle impulsa le taux de mortalité des blessés chuta de 33% au premier trimestre à 2% lors du troisième. Certains avancèrent que ce progrès n'était du qu'à l'évolution de la gravité des blessés traités. Elle réfuta avec maestria l'argument via une subtile étude cas témoins où elle montra la meilleure espérance de vie des blessés les plus graves, jugés intransportables, par rapport à ceux admis à Scutari. Elle démontra même que la dénutrition des soldats était un facteur de risque de mortalité. Elle fit enfin fabriquer et acheminer d'Angleterre un hôpital préfabriqué où ses théories purent être appliquées avec encore plus d'efficacité.

Si la guerre de Crimée eut peu d'impact géopolitique, l'action de Florence Nightingale laisse, elle, un héritage immense car elle brisa le dogme du caractère inéluctable de l'infection en collectivité de patients pour lui substituer les vertus de la prévention. Architecture, soins, organisation, nutrition voilà ce qui s'appelle éclairer l'histoire de la prévention.

Et vous, qu'avez-vous gardé de cet héritage ?

En savoir plus :

http://www.florence-nightingale.co.uk/cms/

01/10/2024  - Ce qui se voit...

Luxe, calme et propreté

S'il est bien une condition indispensable au bon fonctionnement des Ehpad, c'est à n'en pas douter l'hygiène des locaux. Nettoyage, bionettoyage, hygiène du linge... Les consignes et protocoles ne manquent pas pour assurer l'organisation et l'évaluation de ces tâches quotidiennes. Et pourtant, ce travail reste invisible. Ou plutôt, il n'est visible que quand il n'est pas fait. Paradoxe ?
01/10/2024  - Billet

Les vieux aussi !

Serge Guérin me pardonnera de paraphraser le titre de son dernier ouvrage en date* pour titrer mon billet. Vous l'avez lu ou en connaissez le thème : bousculer les idées reçues sur le désintérêt des « vieux » en matière de gestes écologiques et solidaires. Tribune pour répondre à ceux qui pensent que ces générations issues de la deuxième guerre mondiale et des années cinquante ont abusé des trente glorieuses et se moquent des incidences climatiques et générationnelles futures. Elles pourraient pourtant donner des leçons d'économies à beaucoup en matière d'eau, de déchets et de courage. Une anecdote a fini de me convaincre. Récemment par une belle journée je me dirigeais vers la déchetterie suite à des travaux de jardin et je vis sur le bord de la route une personne âgée, courbée et tirant deux chariots utilisés pour les courses. Je me fis la remarque du courage de cette personne sachant que le commerçant le plus proche était à bonne distance. Sur la route de mon retour, je la revis. Quelle ne fut pas ma surprise de constater qu'en fait cette dame âgée ramassait des deux bords de la route les déchets que les « clients » de la déchetterie laissaient tomber de leurs remorques en roulant. Je ralentis pour en avoir la certitude et raconter ce vécu à l'ami Serge. Plus encore, je décidais en ces temps riches d'à priori primaires d'en faire le thème de ce billet. Méfions-nous de ces raccourcis trop faciles. Oui, les vieux « aussi » sont sensibles à ces sujets qui mobilisent beaucoup de jeunes, à juste titre. Gardons-nous de ces clichés clivants. Demain ne pourra se construire qu'en faisant société, intelligemment, avec tolérance et respect. Et dès lors, même si mon propos est naïf, il fera bon vivre ensemble. ...
01/07/2024  - Billet

La victoire appartient au plus opiniâtre

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01/06/2024  - Toucher

Découvrir le corps

Toucher des corps qui ne sont ni les nôtres ni ceux des proches aimés. Les couvrir et les découvrir, au gré des soins et des besoins de chacun. Les toucher avec pudeur et respect, dans l'intimité d'une chambre. C'est notre quotidien de soignants, qui prenons soin de ceux qui ont besoin d'assistance pour les actes simples de la vie.
01/06/2024  - Partie I

Virage domiciliaire: Les risques du tête à queue...

Le « virage domiciliaire » est une formule qui sent bon la novlangue administrative et le poncif bureaucratique. Voici des années que ce virage est annoncé, que de nombreuses caravanes publicitaires stationnent sur les aires d'autoroute de la seniorisation... Pour autant, le bilan est maigre.
16/05/2024  - Billet

Éloge du temps

Le débat sur la fin de vie est en cours. Tel un marqueur politique nécessaire, il a été décidé d'en accélérer la réflexion. Il est vrai que le sujet est plus que sensible car on le constate déjà, la sémantique le dispute au fond. On évoque un « modèle français », qui de mon point de vue sera difficile non seulement à construire mais aussi à mettre en oeuvre. Il a été dit qu'il fallait donner du temps au temps. Et cette formule est reprise bien souvent et complaisamment. Sans vouloir procrastiner, car il est légitime qu'une société évolue, j'ai pour autant l'humilité de penser que notre pays est assez enclin à légiférer et « sur-légiférer » sans s'assurer de la réelle application des lois déjà votées. Un consensus se dégage ainsi pour affirmer qu'en matière de fin de vie, la douleur est le facteur essentiel. Et que le nombre de places en soins palliatifs est non seulement insuffisant mais géographiquement injuste. Le sujet presque tabou est difficilement évoqué. Triste constat. La loi Claeys-Leonetti est incomprise, souvent non mise en oeuvre. Elle correspond pourtant à un encadrement important et nécessaire de ces moments si difficiles. ...
01/05/2024  - Billet

Marqueurs de bienveillance

Les débats sur la loi « Bien vieillir » agitent les acteurs du secteur médico-social. Le grand public est plus préoccupé par d'autres sujets sociétaux, anxiogènes et médiatiquement plus à la « une ». Encore une fois, le grand âge est victime du syndrome de l'indifférence et d'un manque de volonté politique face au mur qui se rapproche de plus en plus. C'est un combat permanent, lassant, décourageant souvent, mais essentiel cependant selon le terme si employé lors de la récente pandémie. ...
01/05/2024  - Partie IV

Pas de société de la longévité sans volonté de valoriser les métiers du care

Pour poursuivre notre série sur la valorisation des métiers du care, évoquons les initiatives visant à améliorer très concrètement le quotidien des femmes et des hommes (surtout des femmes) qui travaillent auprès des plus fragiles.
01/05/2024  - Chronique

Et si on arrêtait de cacher les vieux?

La France des vieux, c'est la France du passé, la France d'hier. Place aux jeunes, à la modernité et à l'innovation digitale ! Bien entendu, je ne suis pas sérieux... Je vous imagine déjà sursauter...