Créés en juillet 2016, les 135 groupements hospitaliers de territoire (GHT) s'apprêtent à souffler leur seconde bougie. Moins de 10 % des EHPAD publics autonomes ont fait le choix de s'y joindre. Certaines voix se font entendre pour mettre en garde contre la tentation d'une intégration plus incitative...
GHT/EHPAD publics autonomes : vers le mariage forcé ?
Sur les 135 groupes hospitaliers de territoire (GHT) en place depuis juillet 2016, 128 comportent une structure médico-sociale publique "non autonome".
Si les EHPAD publics rattachés à un établissement sanitaire ont passé le cap dans le sillon des hôpitaux, en revanche, du côté des établissements autonomes, on ne s'est pas bousculé au portillon pour rejoindre les GHT. Seulement 60 ont choisi de se lancer dans l'aventure, soit 17% des GHT. " Moins de 10% des EHPAD autonomes ont fait le choix de rejoindre un GHT. On peut comprendre les réticences et les craintes. A l'heure actuelle, les GHT ne fonctionnent pas tous bien, du fait notamment des lourdeurs réglementaires. On se retrouve aujourd'hui avec autant de lits d'EHPAD dans les GHT que hors des GHT, ce qui ne joue pas en faveur de la construction de filières gériatriques ", juge Emmanuel Sys, secrétaire national D3S du Syncass-CFDT
Dominique Colas, président de l'Association nationale des centres hospitaliers locaux (ANCHL) et directeur du Centre Hospitalier du Penthièvre & du Pou-douvre à Lamballe (Côtes d'Armor) a fait entendre, dès le départ, de fortes critiques à l'égard des GHT qui sont selon lui " de super structures hospitalières administratives ". Deux ans après leur installation, il est loin d'avoir changé d'avis. " Les GHT sont une préfiguration de l'assistance publique départementale. Ils ont deux effets pervers : nous couper de la médecine de ville car ils sont hospitalo-centrés et condamner les hôpitaux de proximité. Quelle place est accordée aux établissements médico-sociaux ? Tout dépend de la personnalité de l'établissement support. 1/3 procède d'autorité. Il n'y aucune économie à attendre de la fonction achats des GHT pour les établissements médico-sociaux. La cellule achats nous coûte trois fois plus cher. Par ailleurs, caler les systèmes d'information des établissements médico-sociaux sur les besoins des CHU, c'est aberrant et anti-économique ! "
Dans le camp des sceptiques, on retrouve également Pascal Martin, secrétaire national adjoint du CH-FO ! " Les GHT seraient une bonne idée, s'ils étaient au service d'une meilleure coordination de la santé publique. Or, le modèle est plutôt en faveur d'une restructuration macro-économique de l'offre de soins. La multiplication des directions communes va vers une agrégation des EHPAD obligatoires ".
Frédéric Cecchin, vice- président D3S du Syndicat des manageurs publics de santé (SMPS)
" Mettre en place des GHT médico-sociaux "
" Nous ne voulons pas d'un système intégratif brutal des EHPAD publics autonomes via la multiplication des directions communes. Avec les GHT, nous avons toujours la même crainte d'une perte d'une partie des prérogatives des D3S. Que les petits se fassent bouffer par les gros et que les établissements sociaux et médico-sociaux deviennent, au sein des GHT, un service comme les autres. Peu d'EHPAD ont été associés à la réflexion sur le projet médical partagé. Les filières de soins gériatriques sont pilotées par les médecins sanitaires. Concernant les achats, les besoins ne sont pas forcément les mêmes entre les EHPAD et le secteur sanitaire. Sans oublier la perte de proximité entre l'établissement et ses fournisseurs locaux qui est induite par les GHT. Le SMPS a mis en place un groupe de réflexion chargé de faire des propositions dans le champ du médico-social et du social. Elles seront l'objet d'une plateforme et seront portées par le SMPS dans le cadre des différents échanges avec le ministère et les services déconcentrés (ARS et départements) et lors des élections professionnelles en fin d'année Dans le cadre de cette réflexion, le SMPS est favorable à la mise en place de GHT médico-sociaux qui regroupent des EHPAD, des établissements du champ du handicap, de la protection de l'enfance et des services d'aide à domicile. En appui avec des GCSMS ou d'autres formes de coopération, ces GHT médico-sociaux permettraient des compétences ou des professionnalisations sur un bassin de population."