L'usage raisonné des détergents et des désinfectants contribue à la qualité du nettoyage et de l'hygiène en EHPAD. Le personnel en charge de l'entretien des locaux est-il suffisamment bien formé et informé ? Pas vraiment. Explications de Richard Hirardin, gérant d'Abexprop, expert consultant en hygiène et propreté.
« Il vaut mieux faire une bonne détergence qu'une mauvaise désinfection »
Quelles sont aujourd'hui les connaissances professionnelles à renforcer chez le personnel d'entretien en EHPAD ?
Il faut bien distinguer la partie nettoyage de la partie désinfection. Les agents chargés de l'entretien et de l'hygiène des locaux en EHPAD confondent encore les deux. Ce personnel doit donc savoir travailler selon certains modes opératoires et maîtriser l'utilisation des produits. Or, ces professionnels ne connaissent pas forcément les spectres de désinfection sur lesquels ils doivent intervenir.
Par exemple, il y a des moments où le personnel va utiliser des produits qui agissent sur quatre spectres de désinfection différents là où un bactéricide suffirait largement. Les agents chargés de l'entretien doivent donc être formés pour avoir la connaissance des contaminations sur lesquelles ils vont chercher à travailler, la connaissance des détergents et des désinfectants à utiliser en fonction des locaux, des besoins réels des bâtiments. Il vaut mieux faire un bonne détergence qu'une mauvaise désinfection.
Partagez-vous l'analyse de certains experts qui alertent sur l'usage excessif de désinfectants dans les EHPAD ? Quelles pratiques faut-il changer ?
Bien entendu, désinfecter à tour de bras les couloirs, les zones de circulation, c'est du grand n'importe quoi ! En dehors des périodes d'épidémies de gastro-entérite ou de grippe par exemple, il faut être avant tout vigilant sur la propreté physique des locaux. La priorité est de se concentrer sur les endroits essentiels et ce n'est pas le cas dans de nombreux EHPAD. La désinfection n'est pas toujours bien réalisée sur les points de contact, les poignées de porte, les interrupteurs. Dans les sanitaires et surtout dans les zones dites « pieds nus » le personnel oublie souvent de nettoyer et de désinfecter les faïences murales et les sols. Or, le calcaire est une salissure composite dans laquelle vont se loger les bactéries, champignons, virus responsables de nombreuses infections comme les mycobactéries et verrues plantaires. Cette action de bionettoyage doit être observée dans les sanitaires, salle de bains, salle de balnéothérapie... Aujourd'hui, il existe des produits issus de la biotechnologie qui sont des nettoyants enzymatiques. Une fois que la surface est nettoyée, les enzymes continuent à "travailler". Les EHPAD pourraient utiliser cette technologie, dans les zones de criticité 1 et 2, qui est parfaitement respectueuse de l'environnement et sans danger pour les utilisateurs.
Le dosage des produits d'entretien est essentiel également. Est-ce un point maîtrisé par le personnel en EHPAD ?
La plupart du temps, non. Savoir lire la fiche technique d'un détergent et réaliser une dilution parfaite, c'est très compliqué. Si la dilution n'est pas effectuée correctement, on n'aura pas le pouvoir mouillant du détergent, ni le pouvoir nettoyant et par conséquent pas de fonction désinfectante et en cas de surdosage la solution ne sera pas biodégradable. C'est en cela que la centrale de dilution est très intéressante pour un établissement mais seulement si elle est bien réglée. N'oublions pas qu'à partir du moment où les modes opératoires et, ou, la dilution des produits ne sont pas respectés, cela ne contribuera pas à freiner une épidémie quand elle survient dans un EHPAD.