Les traitements anticancéreux sont prescrits avec beaucoup de réserve aux personnes âgées. Des études très récentes sur l'utilisation de l'immunothérapie contre le mélanome contredisent cette réserve et l'Académie incite à mieux évaluer le bénéfice-risque.
Immunothérapie des cancers : l'Académie de médecine demande de « penser aux personnes âgées »
Dans un communiqué du 16 septembre titré « L'immunothérapie des cancers : penser aux personnes âgées », elle confirme que les immunothérapies ont bouleversé la cancérologie avec des réponses de longue durée, voire des rémissions complètes : « à l'heure actuelle, une vingtaine de cancers différents sont susceptibles de répondre à ce type de thérapeutique ».
Or les traitements anticancéreux sont prescrits avec beaucoup de réserve aux personnes âgées, alors que plus de 50 % des patients d'oncologie ont 75 ans et plus. « Cette défiance est basée à la fois sur l'a priori d'une moins bonne tolérance et la notion d'une efficacité moindre », commente l'Académie nationale de médecine qui déplore que « malheureusement, les patients de plus de 70 ans so[ie]nt sous-représentés dans les études randomisées, en raison essentiellement de critères d'inclusion stricts quant aux facteurs de comorbidités et aussi du fait d'une crainte parfois excessive des investigateurs à inclure des personnes âgées ». En conséquence, les résultats d'efficacité et de sécurité des études cliniques sont souvent trop peu nombreux pour être pris en compte dans ce sous-groupe de patients.
Elle prend le contre-exemple du mélanome qui « représente un bon modèle avec un recul d'utilisation de plus de 10 ans » avec trois études de 2020 et 2021 qu'elle cite en référence et qui ont conclu à de bons résultats après 65 ans : « la réponse à l'immunothérapie n'apparait pas influencée par l'immunosénescence et l'incidence des maladies auto-immunes induites par ce traitement n'est pas plus élevée chez les personnes âgées ».
Ces informations nouvelles sont d'autant plus importantes que l'immunothérapie cible maintenant des tumeurs, comme le carcinome épidermoïde cutané avancé et la tumeur de Merkel, qui sont des tumeurs cutanées des personnes âgées de plus de 70 ans.
Ces résultats soulèvent aussi la question de la prescription d'une immunothérapie en situation adjuvante chez une personne âgée. Ainsi, dans le mélanome, il a été montré que le traitement adjuvant par anti-PD-1 diminuait le risque de rechute après curage ganglionnaire.
Dans ce contexte, l'évaluation gériatrique prend une place toute particulière pour s'assurer de l'absence d'interférences avec certaines comorbidités, des conditions mentales, émotionnelles ou nutritionnelles. L'appréciation de ces éléments multidimensionnels peut en effet aider le médecin oncologue à encore mieux définir le rapport bénéfice/risque.
Trois préconisations de l'Académie
- traiter les patients de plus de 70 ans atteints de cancers chaque fois qu'il peut y avoir un bénéfice pour eux ;
- collaborer étroitement avec les onco-gériatres dans la décision thérapeutique et le suivi, en tenant compte de toutes les facettes de la personne âgée ;
- poursuivre et accentuer la recherche clinique et translationnelle sur l'immunothérapie du cancer chez les personnes âgées, en vue de leur permettre de bénéficier de traitements modernes les moins toxiques possibles, sans altérer leur qualité de vie.