Le gouvernement va publier le rapport Igas/IGF « d'ici quelques jours, en veillant bien à occulter les parties » concernées par le secret des affaires.
L'affaire Orpea et le secret des affaires
Trop, ou pas assez ?
L'annonce d'une plainte de l'État contre Orpea par Brigitte Bourguignon le 26 mars a immédiatement été suivie d'une polémique sur la non publication du rapport des deux inspections générales des affaires sociales et des finances (Igas/IGF), offrant dans un premier temps le luxe à Orpea de se faire le chantre de la transparence : dans un communiqué du 26 mars, le groupe regrette en effet que ce rapport « ainsi que les 177 pages (hors pièces justificatives) de réponses très circonstanciées [qu'il lui a] apportées ne soient pas rendus publics, ni mis à la disposition de l'ensemble des parties-prenantes ».
Inévitablement, la question a été posée à la ministre déléguée à l'Autonomie, le 29 mars lors de son audition par la Mission d'information sur le contrôle des Ehpad du Sénat : elle a annoncé qu'il y aurait publication du rapport Igas/IGF « en respectant les règles de sécurité et de secret des affaires » - seul le groupe Orpea pouvant, selon elle, lever ce secret des affaires et venant de refuser de le faire. Le gouvernement va publier le rapport « d'ici quelques jours, en veillant bien à occulter les parties » concernées. En vertu de la loi du 30 juillet 2018 sur la protection du secret des affaires qui avait soulevé une bronca chez les journalistes, les lanceurs d'alerte...
Dans un nouveau communiqué publié le 29 au soir, Orpea confirme « à nouveau être favorable à la publication du rapport de l'Igas et de l'Igf », contrairement à ce que Brigitte Bourguignon affirme durant son audition, mais dit se ranger à l'avis d'Olivier Veran « de rendre public le rapport définitif, à l'exception de ce qui est couvert par le secret des affaires. »
Le groupe indique que « les seuls éléments qui pourraient relever du secret des affaires ne porteraient que sur des informations ponctuelles dont la divulgation serait de nature à nuire aux intérêts concurrentiels d'Orpea et dont l'occultation n'altèrerait en rien les faits, les analyses et les conclusions qui figurent dans le rapport. ».
Interviewé dans le 13/14 de France Inter, Victor Castanet insiste : « il s'agit d'argent public ». Il poursuit « si j'avais dû m'arrêter à cette notion de secret des affaires, extrêmement préjudiciable, il n'y aurait pas eu de livre ». Toutes les agences régionales de santé à qui il a demandé les déclarations du groupe Orpea pour croiser les informations sur l'utilisation de l'argent public obtenues en interne se sont abritées derrière ce secret, raconte-t-il. En revanche, deux conseils départementaux, ceux de la Gironde et de la Vienne, les lui ont transmises : « de l'argent public est en jeu, il est normal qu'un journaliste s'en saisisse... », ont-ils estimé en substance.