30 adhérents de l'Association A2E *, évaluateurs externes certifiés AFNOR, ont été reçus à Montréal puis à Québec par le Conseil québécois d'agrément (CQA) et l'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux (INPESS).
L'herbe semble toujours plus verte ailleurs
Une loi critiquée
Le Canada est un état fédéral dans lequel se superposent les lois fédérales et des lois provinciales qui, pour ce qui concerne les domaines sanitaire, sociaux et médico-sociaux s'appuient sur cinq principes : universalité, gestion publique, intégralité, accessibilité, transférabilité, avec un système d'évaluation unique.
Depuis le 1er avril 2015, dans l'objectif d'harmoniser les pratiques en assurant la fluidité des services au profit des usagers mais également dans le but avoué de réaliser des économies substantielles, tous les établissements et services ont été fusionnés au sein de Centres intégrés de santé et services sociaux (CISSS) régionaux (CIUSSS si un centre universitaire en fait partie) sous la seule autorité du ministre de la santé québécois qui se retrouve à gérer 280 000 salariés. Dans la région de Montréal, on est passé de 182 établissements à 34 (1 300 cadres licenciés). Il va sans dire que ces regroupements se sont fait à marche forcée et qu'aujourd'hui encore les professionnels rencontrent des difficultés d'intégration et d'appropriation ...
La loi impose à chaque structure l'obtention d'un agrément, donné pour 5 ans, basé sur une certification qualité à partir de trois zones de performance : accessibilité et qualité des services, optimisation des ressources.
Le Conseil québécois d'agrément
Le Conseil québécois d'agrément (CQA), organisme privé sans but lucratif, délivre cet agrément en toute indépendance. Celui-ci est une reconnaissance publique témoignant d'une organisation conforme à un ensemble de normes de qualité et engagée dans un processus continu d'évaluation et d'amélioration. Pour le CQA, la qualité se définit par la capacité d'une organisation à satisfaire les besoins et les attentes des clients, par l'utilisation des meilleures pratiques et la conformité aux normes établies de façon efficiente et au moindre risque, au regard des ressources disponibles. Cette qualité se reflète tant au niveau des attitudes et des contacts humains établis entre le personnel et les clients qu'au niveau des procédures et des services rendus.
Le CQA peut également effectuer des visites d'évaluation de conformité des résidences pour personnes âgées, sur un cycle de 5 ans, à partir de références ministérielles, incluant des sondages de mesure de la satisfaction des clients et de la mobilisation des salariés. Cette certification dont le coût moyen est de 18 000 dollars canadiens est obligatoire pour les structures non médicalisées accueillant des personnes âgées qui sont exclusivement privées à but lucratif.
Il n'existe pas de " petits " établissements ; ce sont des complexes regroupant plusieurs centaines de personnes, plus ou moins autonomes qui iront en CHSLD (établissements médicalisés, tous gérés par le secteur public) lorsque leur état le justifiera. On y retrouve ce qui fait la force des structures commerciales : des bâtiments luxueux avec piscine, jacuzzi, bain à remous, salle de sport, grands espaces extérieurs arborés, service hôtelier, restauration de qualité, etc. Encore faut-il avoir les moyens d'y accéder : il n'existe pas d'aides comparables à l'APA ou à l'ASH. Le ministre impose un tarif maximum à chaque structure et des aides fiscales mensualisées permettent semble-t-il à chacun d'accéder à cette forme d'accueil qui va, pour comparer avec la France, de la résidence locative sans aucun service et sans aucun droit à bénéficier des services offerts par une structure mitoyenne, à la résidence autonomie bénéficiant d'un forfait soin, en passant surtout par la résidence services.
La population de la province de Québec est vieillissante ; il y aura à court terme plus de personnes âgées que d'enfants de moins de 14 ans. Il semble qu'une vraie prise de conscience des problèmes à venir soit en train de se construire car, contrairement aux idées reçues, nos cousins ne semblent pas prêts à une prise en charge et un accompagnement quantitatif et qualitatif, notamment en ce qui concerne le maintien à domicile.
Au-delà des droits, des exigences
Un nouveau management se développe dans tout le Québec basé sur l'innovation, c'est-à-dire la prise en compte du ou des talents de chaque salarié pour la réalisation des idées créatives proposées par chacun, la créativité étant le carburant de l'innovation, la génération d'idées nouvelles, originales et utiles adaptables à la réalité de l'entreprise.
La pyramide qualité est inversée ; le directeur n'est plus celui qui tire vers le haut ses équipes mais celui qui du bas, les pousse. Le rôle des ressources humaines est de compiler et de valoriser les talents et de se mettre au service de l'organisation. C'est le concept de l'entreprise libérée dans laquelle, ensemble, l'équipe trouve les moyens d'atteindre les objectifs fixés par le gestionnaire. Cette équipe est performante quand elle atteint les objectifs, efficiente quand elle diminue les moyens pour les atteindre. La méthode repose à 70% sur les hommes, à 30% sur des outils.
L'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux
L'Institut national d'excellence en santé et en services sociaux (INESSS) dont la mission est de promouvoir l'excellence clinique et l'utilisation efficace des ressources, regroupe ce qui en France correspond à la HAS, l'ANESM, l'ANAP, les associations professionnelles dissoutes d'office par la loi d'avril 2015, les représentants des usagers et des familles. L'INESSS développe deux programmes transversaux : la santé publique et les services sociaux généraux (établissements, services, cliniques, etc.) et sept programmes-services pour des problématiques particulières : autonomie des personnes âgées, déficience physique, intellectuelle y compris l'autisme, jeunes et familles, itinérance et addiction, santé mentale et santé physique. Ses 160 salariés (professionnels scientifiques, conseillers, coordonnateurs scientifiques et personnel de soutien) évaluent la pertinence, les avantages et les coûts des technologies et des médicaments, émettent des recommandations incluant l'adoption, l'utilisation, la couverture par le régime public et élaborent des guides de pratiques cliniques.
Alors oui, l'herbe semble toujours plus verte ailleurs mais nous pouvons être fiers du système français qui malgré toutes ses imperfections permet un maintien à domicile et un accompagnement en institution de qualité, accessible au plus grand nombre quels que soient l'âge, les revenus, le niveau de perte d'autonomie. Quant à l'accessibilité pour les personnes à mobilité réduite, là encore, le Québec semble largement en retard : aucun magasin en surface, aucun hôtel, aucun restaurant (sauf en terrasse) et la majorité des petits immeubles d'habitation compte au minimum 6 à 8 marches !
Françoise Toursière
Consultante Cabinet Convenance Consult