Dans le n° 149-avril 2023  - Arnaud Robinet, président de la FHF  14747

« L'offre publique demande aujourd'hui à être soutenue »

Alors que s'ouvrent les portes de la 57e édition de SantExpo à Paris, Arnaud Robinet, président de la Fédération hospitalière de France (FHF), livre ses inquiétudes sur les Ehpad publics. Interview.

Vous avez pris la présidence de la FHF il y a quelques mois. Quel est l'état actuel des Ehpad publics et de leur capacité d'agir ?

Les Ehpad publics représentent presque la moitié de l'offre globale. Présents partout, y compris dans les territoires ruraux, ils proposent une offre de qualité et de proximité accessible à tous. Ils jouent donc un rôle majeur dans l'accompagnement des aînés. Or, la FHF a réalisé une enquête récente qui objective leur situation budgétaire très dégradée. Le constat est sans appel : 85 % des Ehpad anticipaient un résultat fortement déficitaire à la fin de l'année 2022. À ces difficultés budgétaires s'ajoutent de profonds problèmes d'attractivité des métiers du grand âge, toujours non réglés. Les équipes en place travaillent souvent en sous-effectifs, accentuant la pénibilité de leurs conditions de travail. Cette réalité, nous la connaissons et la dénonçons depuis longtemps. Il faut sortir de ce cercle vicieux.

L'édition 2023 de SantExpo porte sur la démocratie en santé. Entre CNR, débats et rapports en tous genres, livres blancs, propositions pour une loi Grand âge, n'avez-vous pas l'impression de débats vains et non suivis d'engagements effectifs ?

La concertation est une méthode vertueuse pour construire des solutions adaptées qui tiennent compte des réalités du terrain et de l'ensemble des acteurs. Mais une fois que le diagnostic est posé et qu'un consensus émerge sur les solutions à adopter, il faut savoir passer à l'action. Aucun autre sujet de l'action publique n'a été autant documenté ces dernières années que celui du grand âge. Les nombreux rapports convergent, en termes de diagnostics comme de propositions. Surtout, tous soulignent l'urgence à agir. La réforme ambitieuse pour le grand âge que le secteur réclame, promise par le président de la République en juin 2018 et si souvent annoncée, ne s'est pas encore concrétisée. Dans ce contexte, la proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien-vieillir en France suscite logiquement aujourd'hui un fort espoir chez les acteurs, mais ne traite pas de tous les enjeux prioritaires. Une réforme législative ambitieuse ne peut, par exemple, faire l'impasse sur la nécessité de programmer l'attribution de nouvelles ressources financières à la branche autonomie, pour affronter les besoins massifs à venir.

Vous ouvrez la nouvelle édition de SantExpo en présence de François Braun. Quelles sont aujourd'hui vos attentes et priorités pour les établissements médico-sociaux ?

Nos attentes sont connues, et j'ai eu l'occasion d'en faire part directement au ministre comme aux parlementaires : une loi de programmation est nécessaire, ainsi que des engagements clairs pris dès maintenant en vue de la prochaine loi de financement de la Sécurité sociale. Le contexte d'inflation a en effet révélé les limites du modèle de tarification des Ehpad et la nécessité de simplifier la gouvernance du secteur. À plus court terme, il est également nécessaire de prendre dès aujourd'hui des mesures d'urgence pour soutenir les Ehpad publics confrontés à d'importantes difficultés financières du fait d'une évolution des tarifs insuffisante pour couvrir l'évolution des charges. À défaut, le service public du grand âge risque d'être durablement fragilisé, alors que ce sont aussi les Ehpad publics qui accueillent les résidents aux plus faibles revenus et qui assurent l'hébergement des personnes âgées dans les territoires ruraux isolés où le secteur privé trouve peu d'intérêt à s'installer. Cette offre publique demande aujourd'hui à être soutenue ! C'est le message que nous continuons de porter haut et fort.

Une des difficultés majeures dans le secteur reste la question RH (recrutement, maintien dans l'emploi...). Vous avez présenté un plan de bataille pour les RH qui mise sur l'amélioration des conditions de travail et la formation. Comment comptez-vous vous y prendre concrètement pour planifier le recrutement des 100 000 postes supplémentaires tels qu'identifiés en janvier 2023 ?

Recruter 100 000 personnes en 5 ans est un défi de taille. Nous connaissons l'équation : il faut des financements pour recruter, mais aussi trouver les professionnels pour exercer dans les établissements, ce qui suppose une réelle programmation pluriannuelle des créations de postes, à partir de laquelle l'appareil de formation pourra être adapté. Au-delà de ces créations de postes, il faut aussi pourvoir les postes vacants et répondre aux besoins nouveaux. C'est un véritable plan de bataille pour les ressources humaines que nous demandons au Gouvernement, en Ehpad comme à l'hôpital. Ces mesures nécessaires représentent un coût important. La FHF appelle aussi les pouvoirs publics à rétablir l'équité avec les acteurs privés en matière de cotisations sociales et de fiscalité, celles-ci pesant de façon disproportionnée sur les établissements sociaux et médico-sociaux publics. Nous demandons enfin au Gouvernement d'indexer les recettes des Ehpad publics sur l'évolution des coûts, comme il vient de le faire pour le secteur privé commercial. Sans ces ajustements et des financements à hauteur, les Ehpad n'auront pas les moyens de recruter.

Comment lutter contre l'intérim (qui offre aujourd'hui de meilleures conditions de travail et moins de contraintes) dans le secteur médico-social ?

La clé pour lutter contre l'intérim dans le secteur médico-social est connue, c'est l'attractivité. Augmenter les salaires, favoriser l'accès à la formation, offrir des perspectives d'évolution de carrière, améliorer les conditions d'exercice pour in fine redonner du sens aux métiers de l'accompagnement sont autant de réponses attendues par les professionnels. Tout cela suppose en premier lieu le renforcement des moyens d'accompagnement, car la première demande des professionnels est d'être plus nombreux. Seul un choc d'attractivité pour les métiers du médico-social et du grand âge, au-delà des premiers efforts consentis suite au Ségur, rendra possible la mise en place d'un nouveau cercle vertueux : celui qui permettra aux équipes de se retrouver au complet, de pouvoir consacrer le temps qu'il faut aux résidents et ainsi de retrouver le sens et la fierté de leur travail.

Comment allez-vous travailler avec les professionnels suite aux annonces de la Convention citoyenne sur la fin de vie ?

Dans le cadre des travaux de son « comité éthique », la FHF anime la réflexion entre les professionnels du soin sur les sujets liés à la fin de vie. Plusieurs webinaires ont été organisés en 2022 et continuent de susciter l'intérêt et le débat au sein de la communauté hospitalière. Le rôle de la fédération est ainsi, à mon sens, davantage de permettre le dialogue et d'accompagner les transformations que de prendre position sur ces questions sociétales.


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