A l'occasion des rencontres nationales départements - CNSA, le 30 mai 2018, la Ministre des Solidarités et de la Santé, a présenté sa feuille de route sur le grand âge et l'autonomie. Les réactions ne se sont pas fait attendre : pour la grande majorité des représentants du secteur, les annonces ne sont pas à la hauteur des besoins.
La feuille de route " Grand Âge et Autonomie " d'Agnès Buzyn jugée insuffisante
Fortement impliquée - avec l'intersyndicale - dans les appels à la grève des professionnels en EHPAD et à domicile, en janvier et mars derniers, l'AD-PA considère que ce plan présenté par Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé " constitue un réel pas en avant " mais qu' " il n'est clairement pas à la hauteur des attentes ". " Ainsi, l'abandon de la baisse des effectifs dans certains établissements et le déblocage de 143 millions d'euros sur trois ans est positif mais reste insuffisant puisque ne compensant pas la suppression des contrats aidés ", ajoute l'AD-PA.
La FNADEPA regrette " le manque d'ambition des annonces : s'il est heureux de voir que de premiers jalons ont été posés, trop de mesures restent au stade de grands principes - sans chiffrage - et d'autres étaient déjà prévues ". " Le périmètre de celles-ci témoigne certes d'un effort budgétaire, mais qui reste toutefois bien trop faible eu égard aux estimations des rapports récents (entre 6 et 10 milliards d'euros) et pour enfin répondre aux attentes et besoins des personnes âgées, des équipes qui les accompagnent au quotidien et des familles. "
Pas de changement de modèle
La FEHAP reste, elle-aussi, sur sa faim et regrette que les mesures annoncées " ne portent en rien création réelle de nouvelles ressources pour les établissements et n'ont pas répondu aux attentes fortes des acteurs et professionnels du secteur, portant sur la transformation d'un modèle de société au bénéfice de l'inclusion des personnes fragiles ". Si la FNAQPA salue " l'accélération de la mise en place de la norme de financement des soins en établissement, ramenée à 3 ans au lieu de 7 ", elle " déplore que le changement de paradigme, qu'elle appelle elle-aussi de ses voeux, et, de fait, la question de la refondation du modèle des maisons de retraite soient reportés à une réflexion ultérieure. "
Moins critique, le Synerpa annonce qu'il sera " attentif à l'application concrète des mesures ". Le syndicat patronal des maisons de retraite privées se réjouit notamment de l'ouverture du débat tarifaire sur l'habilitation à l'aide sociale en lien avec les départements et les représentants des gestionnaires. " La réforme de l'Habilitation à l'Aide Sociale, demandée dès 2012 par la Cour des Comptes, s'avère indispensable pour proposer un système plus simple, plus équitable et bénéficiant en priorité aux personnes les plus concernées ", considère le Synerpa.
Quid du reste à charge ?
L'Uniopss regrette pour sa part que " la question du reste à charge des personnes ne [soit] pas évoquée, pas plus que la problématique liée au manque de professionnels de santé dans un grand nombre de territoires, qui met aujourd'hui en péril l'accompagnement des personnes âgées, tant à domicile qu'en établissement. " L'Union des associations du social et du médico-social déplore également que la feuille de route ministérielle " ne soit pas l'occasion de penser la question de la prise en charge de la dépendance de manière globale et dans un objectif de convergence des politiques publiques en faveur des personnes âgées et des personnes en situation de handicap, alors même que le président de la République avait relancé le débat autour de la création d'un cinquième risque. "
"La montagne accouche d'une souris"
Du côté des représentants du secteur public, c'est également la soupe à la grimace. Pour la FHF, les premières annonces ne répondent " que partiellement " aux besoins des EHPAD. Pour rappel, outre la feuille de route, la ministre des Solidarités et de la Santé a annoncé le lancement d'un débat sur le grand âge associant l'ensemble des acteurs et des citoyens pour aboutir à des propositions début 2019. La FHF compte, à cette occasion, porter " ses propositions sur la refondation du modèle de financement de l'autonomie, pour garantir des parcours de vie et de santé en adéquation avec les aspirations des personnes. " Elle préconisera également " la nécessaire évolution du pilotage du secteur médico-social. "
Lors du comité de sélection des directeurs et directrices d'établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux (D3S) du 1er juin 2018, les syndicats de directeurs de la fonction publique hospitalière sont revenus sur les annonces de la ministre des Solidarités et de la Santé. Pour Syncass-CFDT, " les annonces ministérielles de mercredi sont " un petit pas très en deçà des attentes " ; " Cantonnées à la structuration de la gouvernance territoriale et aux stratégies de long terme, elles ne disent pas comment surmonter les problèmes immédiats et bien concrets de dégradation et de rupture des prises en charge. "
Même déception du côté du SMPS : " une fois de plus, la montagne accouche d'une souris : les annonces ne répondent pas aux attentes du secteur en souffrance, voire en danger ". Et de poursuivre : " Nos attentes étaient fortes suite à la parution du rapport Fiat-Iborra, rapport dont on ne retrouve guère trace dans la feuille de route. Ce rapport que nous avons soutenu et qui intégrait des réponses concrètes est-il passé aux oubliettes ? "
La conférence des directeurs d'établissements pour personnes âgées et handicapées (CNDEPAH) s'est exprimée sur la mesure annoncée par la Ministre de la Santé consistant à déployer des astreintes d'infirmiers de nuit mutualisées. " Si la présence d'infirmiers la nuit peut se révéler être une solution participant à diminuer des hospitalisations évitables et à améliorer la qualité d'accompagnement des résidents, celle-ci ne constitue pas l'urgence actuelle pour les EHPAD. En effet, les professionnels ont besoin de plus de temps pour les repas, la toilette, l'aide au quotidien, la vie sociale, la mise en place de véritables soins relationnels à destination de personnes âgées accueillies de plus en plus dépendantes ", considère la CNDEPAH.