La situation semble si critique que l'AD-PA et la Fnaqpa se devaient de réagir. Elles lancent un nouveau cri d'alarme accompagné de propositions dans une lettre ouverte aux présidents de conseils départementaux et directeurs d'Ars.
« La non qualité ne peut être la variable d'ajustement »
Pascal Champvert, président de l'AD-PA et Didier Sapy, directeur général de la Fnaqpa ont dénoncé lors d'un point presse, ce jeudi 16 juin, la situation vécue par les professionnels du grand âge qui travaillent déjà en « mode dégradé » alors que l'été n'a pas encore commencé.
Une alerte inquiétude avant l'alerte canicule
Après avoir rappelé ce qui fait l'essence de l'activité de l'accompagnement des plus âgés, à savoir le lien et le temps humain, Pascal Champvert et Didier Sapy ont dénoncé le constant retard français, dont le manque de personnel. Le ratio français est toujours de 6 professionnels pour 10 résidents quand les pays européens tournent plutôt autour de 8 à 10 pour 10. « La situation française n'est pas nouvelle mais à ce déficit de fond s'ajoute des circonstances difficiles, ajoute Pascal Champvert. La crise covid a épuisé les personnes âgées. Si l'essentiel des personnes ont survécu, et c'est heureux, les organismes sont éprouvés. Ce qui rend l'accompagnement difficile. »
Des professionnels épuisés
Les mesures du Ségur ont permis des augmentations de salaires inégalées, qui ne seraient pourtant pas financées en totalité, provoquant des manques à gagner qui fragilisent la viabilité des établissements, révèlent l'AD-PA et la Fnaqpa. « L'Etat refuse d'admettre qu'il s'est trompé dans le calcul (annonçant des salaires nets en lieu et place de salaires bruts) », précisent les dirigeants. « L'intention était bonne. L'Etat a suscité beaucoup d'espoirs à travers une communication forte et orchestrée, mais il renvoie aujourd'hui vers les ARS pour régler le delta manquant. Ce n'est pas possible ».
A ces difficultés s'ajoutent les conséquences de l'inflation, 6, 7 voire 8 % quand l'augmentation des dotations de l'assurance maladie atteint à peine 0,5 %... L'ajustement budgétaire pour les gestionnaires repose dès lors sur le nombre de professionnels en exercice, rendant les conditions de travail encore plus difficiles.
La qualité de vie des personnes âgées comme des professionnels doit-elle continuer d'être la variable d'ajustement ?
Au-delà du constat, des propositions
Dans une lettre ouverte aux présidents de conseils départementaux et directeurs d'ARS, l'AD-PA et la Fnaqpa plaident pour la mise en oeuvre d'un plan d'urgence immédiat, sans attendre la loi grand âge. Ils demandent :
- la création de deux nouveaux postes dans chaque établissement et services à domicile. Certains adhérents annoncent déjà qu'ils ne pourront pas mettre en oeuvre le plan canicule cet été faut de personnels. Les fédérations mettent l'accent sur la nécessité absolue de soutenir ceux qui restent, par le recrutement de bras supplémentaires, en sortant des silos financiers.
- Le financement intégral des augmentations salariales accordées aux salariés (Ségur, avenant 43...). Pour répondre à ce déficit et financer ces mesures, outre les réductions de personnels, les établissements sont obligés de prélever sur leurs fonds propres. Le risque économique devient majeur pour nombre de structures.
- La mise en place d'un bouclier inflation. Les services sont dans l'impossibilité de faire face à l'augmentation des coûts, notamment de l'énergie, sans réduire d'autres dépenses. Les Ehpad sont aujourd'hui exclus du bouclier énergie. Il faut agir vite.
- A moyen terme, les organisations plaident pour des mesures structurelles. « La loi grand âge devra définir ce que doit être l'accompagnement des personnes âgées dans ce pays », ajoute Didier Sapy. « Mais il faut simplifier. On continue de normer, tarifer, réglementer plutôt que de se caler sur des ratios de personnels (a minima de 8 pour 10 en établissement) ou un tarif de 30 euros à domicile. A l'heure où les contrôles se multiplient, il est urgent de soutenir lesprofessionnels. »