Un département peut récupérer des aides sociales sur succession sur un contrat d'assurance-vie s'il peut être requalifié en donation lorsqu'il révèle une « intention libérale » de la part du souscripteur vis-à-vis du bénéficiaire. Cette intention libérale s'apprécie au regard de l'âge, ainsi que des situations patrimoniale et familiale du souscripteur et de l'utilité du contrat pour ce dernier.
La récupération des aides sociales peut se faire sur l'assurance-vie
Dans un arrêt du 3 mars, la Cour de Cassation a cassé un arrêt rendu le 18 juin 2019 par la cour d'appel de Riom (Puy-de-Dôme) rejetant la demande du conseil départemental en récupération de la somme de 9 224,17 euros versée à M.F. depuis le 1er décembre 2007 jusqu'à son décès au titre de l'aide sociale à l'hébergement (ASH). M.F. avait souscrit en 2003 un contrat d'assurance sur la vie au bénéfice de Monsieur T. La cour d'appel de Riom considérait qu'il appartenait au président du conseil départemental de rapporter la preuve de l'intention libérale pour que soit requalifié comme donation indirecte le contrat d'assurance-vie.
La Cour de Cassation s'est appuyée sur
- l'article L.132-8 du code de l'action sociale et des familles (CASF), dans sa rédaction antérieure à celle de la loi n° 2015-1776 du 28 décembre 2015 relative à l'adaptation de la société au vieillissement (ASV) : il en résulte que l'Etat ou le département peut exercer un recours en récupération des sommes avancées contre le donataire lorsque la donation est intervenue postérieurement à la demande d'aide sociale ou dans les dix ans qui ont précédé cette demande.
Pour mémoire, dans sa rédaction post loi ASV de 2015, le nouvel article L.132-8 prévoit que le conseil départemental peut exercer un recours contre le(s) bénéficiaire (s) d'un contrat d'assurance-vie souscrit par le bénéficiaire de l'aide sociale, à concurrence de la fraction des primes versées après l'âge de 70 ans ;
- l'article 894 du code civil dont il résulte qu'un contrat d'assurance sur la vie peut être requalifié en donation si les circonstances dans lesquelles son bénéficiaire a été désigné révèlent la volonté du souscripteur de se dépouiller de manière irrévocable.
La Cour de Cassation a jugé que l'intention libérale de M.F s'appréciait en considération de son âge (77 ans au moment de la souscription), de l'importance des fonds placés (correspondant à la quasi-totalité de son patrimoine) et de l'utilité du contrat pour lui et note l'absence de déclaration du contrat lors du dépôt de la demande d'aide sociale.
La Cour de Cassation a donc cassé et annulé l'arrêt de la cour d'appel de Riom et renvoyé l'affaire devant la cour d'appel de Lyon.