Le Conseil constitutionnel censure les dispositions de l'article L-116-4 du CASF en en interrogeant la notion de vulnérabilité et en estimant que « l'interdiction générale » de dons ou legs « porte au droit de propriété une atteinte disproportionnée à l'objectif poursuivi ».
Le Conseil Constitutionnel censure l'interdiction de dons et legs aux aides à domicile
Le Conseil constitutionnel avait été saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) concernant l'article L116-4 du code de l'action sociale et des familles (CASF) dont la rédaction résulte de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations. Cet article interdit aux aides à domicile de recevoir des dons et legs de la part des personnes dont elles s'occupent. La requérante, une aide à domicile considérait que « cette interdiction, formulée de façon générale, sans prendre en compte leur capacité juridique ou l'existence ou non d'une vulnérabilité particulière, porterait atteinte à leur droit de disposer librement de leur patrimoine. Il en résulterait une méconnaissance du droit de propriété ».
Dans une décision du 12 mars, le Conseil constitutionnel remarque que l'intention du législateur était d'assurer la protection de personnes particulièrement vulnérables vis-à-vis du risque de captation d'une partie de leurs biens par ceux qui leur apportent assistance, et a donc poursuivi un but d'intérêt général. Mais il estime que :
- une capacité altérée à consentir ne peut se déduire du seul fait que les personnes qui bénéficient de l'aide à domicile sont âgées, handicapées ou dans une situation nécessitant cette assistance ;
- les services à la personne recouvrent une multitude de tâches susceptibles d'être mises en oeuvre selon des durées ou des fréquences variables. Le seul fait que ces tâches soient accomplies au domicile des intéressés et qu'elles contribuent à leur maintien à domicile ne suffit pas à caractériser, dans tous les cas, une situation de vulnérabilité des personnes assistées à l'égard de ceux qui leur apportent cette assistance ;
- l'interdiction s'applique même lorsque la preuve de l'absence de vulnérabilité ou de dépendance du donateur à l'égard de la personne qui l'assiste pourrait être apportée.
« Il résulte de toute ce qui précède que l'interdiction générale contestée porte au droit de propriété une atteinte disproportionnée à l'objectif poursuivi », juge le conseil constitutionnel qui la déclare « contraire à la Constitution » et censure les dispositions qui interdisent aux aides à domicile de bénéficier de dons ou legs qu'elles soient salariées par un service ou par la personne elle-même. Cette déclaration d'inconstitutionnalité intervient immédiatement, à la date de publication de la décision (13 mars). Elle s'appliquera à toutes les instances non jugées définitivement à cette date.