Saisi par une famille, le juge des référés du Conseil d'Etat a jugé « disproportionnée » l'interdiction totale de sortie des résidents d'Ehpad dans la mesure où la grande majorité d'entre eux ont été vaccinés. Le secteur des personnes âgées salue cette décision mais demande aussi d'autres assouplissements.
Le Conseil d'État suspend l'interdiction totale de sortie des résidents
Saisi le 16 février par les enfants d'une résidente, le Conseil d'État a suspendu par ordonnance en référé du 3 mars l'exécution des différentes recommandations du ministère des Solidarités et de la santé des 19, 24 janvier et 28 janvier 2021 « en tant qu'elles interdisent, de manière générale et absolue, à tous les résidents des Ehpad, qu'ils soient vaccinés ou non, d'en sortir » - sorties dans les familles et pour des activités extérieures.
Au cas par cas
Le juge des référés estime « disproportionnée » cette interdiction totale, car la majorité des résidents ont été vaccinés et que la vaccination a démontré ses effets positifs. Les mesures adéquates peuvent donc être prises au cas par cas par les directeurs d'établissement.
Selon les données scientifiques disponibles, les vaccins en cours d'utilisation sont notamment efficaces pour réduire le risque d'être contaminé et de développer une forme grave en cas de contamination. Le juge relève également qu'au début du mois de mars 2021, plus de 80 % des résidents des Ehpad et des USLD et 43 % des soignants avaient reçu au moins une dose de vaccin, et respectivement plus de 50 % et 23 %, les deux doses. Ainsi, s'il revient aux responsables des Ehpad d'autoriser les sorties en fonction, en particulier, de la situation locale de l'épidémie et des caractéristiques de leur établissement, notamment du taux de vaccination, le juge des référés estime que certaines sorties, notamment celles des résidents ayant été vaccinés, peuvent être compatibles avec la sécurité de l'ensemble des résidents et du personnel dès lors que des mesures adéquates de protection sont définies.
Il est à noter qu'en ce qui concerne l'urgence caractérisée invoquée par le gouvernement, le Conseil d'État note que si le ministre des Solidarités et de la sante? a saisi le 18 février dernier le Haut Conseil de la Sante? publique (HCSP) d'une demande d'avis sur la possibilité et les modalités d'éventuelles sorties des résidents vaccinés, « cette saisine ne présage aucune évolution à court terme de la recommandation litigieuse » et que celle-ci, « en vigueur sous différentes formes depuis plusieurs mois, a pour effet, par le confinement qu'elle impose, d'altérer l'état physique et psychologique de nombreux résidents, ainsi que plusieurs études l'ont établi ». L'ordonnance prend donc de vitesse l'avis du HCSP...
Les premières réactions
L'Association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA) se félicite de cette décision dans un communiqué du 3 mars mais ajoute qu' « elle appelle la mise en oeuvre d'autres assouplissements ainsi que la révision des protocoles de lutte contre le Covid que l'État adresse aux établissements ».
Cette « sage décision du Conseil d'État » représente « un espoir et un soulagement pour les professionnels et les familles qui attendent un assouplissement des mesures de restriction de liberté» a réagi sur twitter Florence Arnaiz-Maumé, déléguée générale du Synerpa.
Interrogée par l'AFP, la ministre chargée de l'Autonomie a dit "prendre acte" de cette décision, qui "encourage l'État à toujours mieux proportionner les réponses". Brigitte Bourguignon réunira vendredi "un groupe de réflexion éthique", composé de représentants des familles de résidents, de professionnels, d'éthiciens et de juristes, pour "proposer de nouvelles recommandations dans les Ehpad", a-t-elle ajouté, soulignant que le contexte sanitaire était "très préoccupant".