Les déclarations ministérielles sur la qualité du management des EHPAD notamment publics ont fait siffler les oreilles des directeurs d'établissements. Les syndicats de D3S (Syncass-CFDT, CH-FO, SMPS) et la Fédération hospitalière de France (FHF) ne cachent pas leur mécontentement.
Le management des EHPAD publics est-il mauvais ?
" Pour avoir visité énormément d'EPHAD et pu constater de l'un à l'autre les différences managériales, il me semble pouvoir affirmer que tout n'est pas qu'une question financière, et nous ferions une erreur en voulant réduire le problème des EHPAD à un problème de tarification. Il y a des directeurs qui managent remarquablement leurs équipes, ce qui se ressent dans la bienveillance qui règne dans leurs établissements ; à l'inverse, dans certaines structures, notamment publiques, le management n'est pas bon, et sans doute est-ce sur ce point que nous devrions agir plutôt que de recourir systématiquement à des budgétisations supplémentaires. " Depuis cette déclaration d'Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de Santé lors d'une séance de la Commission des Affaires sociales de l'Assemblée nationale, le 5 décembre, les directeurs d'EHPAD publics grincent des dents. Et ce, d'autant plus, que la ministre avait déjà formulé cette remarque devant l'Association des Journalistes de l'information sociale (AJIS) le 21 novembre, en considérant que " dans certaines structures publiques, on sent que la capacité managériale n'est pas au rendez-vous".
Il n'en fallait pas plus pour faire monter au créneau les syndicats de directeurs d'EHPAD de la fonction publique hospitalière.
" Les D3S sont des directeurs formés, compétents et expérimentés, issus de parcours professionnels sélectifs et contraignants. Prétendre que leur " capacité managériale n'est pas au rendez-vous ", c'est d'abord gravement porter atteinte à leur engagement et à leur honneur professionnel ; c'est aussi jeter un discrédit injuste sur l'EHESP qui les forme et le CNG qui les sélectionne ; c'est ensuite semer gratuitement l'inquiétude et le trouble chez les usagers et leurs familles ; c'est enfin dédouaner à peu de frais le ministère de sa responsabilité dans les arbitrages défavorables aux établissements publics ", s'insurge le Syncass-CDFT, dans un communiqué en date du 14 décembre.
" La Ministre a-t-elle bien conscience de nos réalités, de nos attentes et de l'urgence qu'il y a à y répondre ou devrons-nous en conclure que " la capacité ministérielle n'est pas au rendez-vous " ? ", tacle le syndicat.
Demande d'audience à la Ministre
" Savez-vous Madame la Ministre que le ratio moyen de directeurs par EHPAD public est de 1.1 en France, que l'effectif a été réduit de 62 emplois entre 2012 et 2017 (soit 8%) que nos collègues gèrent 92 directions communes et que la pénibilité de leur exercice est inversement proportionnelle à leur reconnaissance statutaire ? ", interpelle le CH-FO. Pour le syndicat, " faire peser sur les directeurs la responsabilité de l'état très insatisfaisant des prises en charge des personnes âgées dépendantes (ainsi que le relève le Conseil de l'Age) est tout autant pratique pour les pouvoirs publics qui ainsi se dédouanent à bon compte - que méprisant pour les cadres de direction. "
Le SMPS a également fait part de son " incompréhension face à ces propos " et a réclamé " respect et considération " pour les directeurs, lors de la Commission administrative paritaire nationale (CAPN) D3S du 14 décembre. " Cela n'est pas une question de qualité managériale, mais bien de règles juridiques, fiscales, comptables et de conditions de travail... bien souvent mises en oeuvre sans réelle étude d'impact ", déplore le syndicat. Le SMPS demande donc que " les propos de la Ministre soient confrontés à une évaluation objective par une mission d'expertise. "
" Il nous semble inapproprié de restreindre les difficultés rencontrées à un problème managérial occultant l'impact de la réforme tarifaire ", insiste également La Fédération hospitalière de France (FHF) dans un courrier en date du 7 décembre adressé à la Ministre de la Santé. La FHF réclame de fait à Agnès Buzyn, " une audience dans les meilleurs délais " pour évoquer les difficultés financières rencontrées par le secteur public. " Une clarification des orientations en matière d'accompagnement des personnes âgées en perte d'autonomie s'impose ", juge la Fédération.