Inauguré en 2021, l'IMIC (Institut de médecine intégrative et complémentaire) du CHU de Bordeaux promeut des méthodes non médicamenteuses, notamment pour la prise en charge de la douleur. Une offre complémentaire qui peut être proposée aux personnes âgées. Le point avec le Dr Marie Floccia, gériatre et algologue au CHU, à la tête du Service douleur et médecine intégrative (SDMI), cofondatrice de l'IMIC et experte au sein de l'AMCA (Agence des médecines complémentaires adaptées).
« Les approches non médicamenteuses ne peuvent qu'être bénéfiques en gériatrie »
Pourquoi avoir créé l'IMIC ?
L'IMIC a été créé au sein du CHU, sur un terreau favorable, car en collaboration avec la direction qui a soutenu cette dynamique sur les médecines complémentaires. Depuis 2011, nous sensibilisons les soignants de l'hôpital à l'hypnose thérapeutique, un premier outil non médicamenteux au bénéfice des patients. Nous développons aussi la méditation de pleine conscience afin que les soignants prennent soin d'eux mêmes. En parallèle, certains professionnels de santé de l'établissement proposent des approches complémentaires à leurs patients. Dans ce contexte global, nous avons décidé de créer l'IMIC afin de coordonner toutes les initiatives. L'Institut fait aujourd'hui partie du Service douleur et médecine intégrative (SDMI), qui regroupe également les Centres d'évaluation et de traitement de la douleur (CETD) adulte et pédiatrique ainsi que l'Unité soutien douleur (équipe mobile). Cette organisation permet de recentrer l'activité de l'IMIC autour des patients douloureux chroniques (70 % des patients pris en charge) et des patients atteints de maladies neurodégénératives (30 % des patients pris en charge). Nos piliers sont l'hypnose et la méditation, deux pratiques disposant de validations scientifiques solides. Nous développons également des protocoles pour valider nos recherches scientifiques. C'est le cas par exemple pour le recours à l'hypnose chez les patients âgés atteints de la maladie d'Alzheimer. Les approches non médicamenteuses en gériatrie sont nécessaires pour réduire la prise de traitements et le risque iatrogénique. Les effets ne peuvent qu'être bénéfiques.
Comment se déroule l'orientation des patients vers l'IMIC ?
Dans le cadre de la prise en charge de la douleur, les patients orientés au sein de l'IMIC sont généralement déjà inclus dans un parcours au sein d'un CETD. L'équipe va alors leur proposer des séances d'hypnose, dans une démarche d'autonomisation ou de méditation. Les patients présentant des troubles neurocognitifs peuvent être adressés par des collègues gériatres ou par le centre de ressource mémoire, pour des problématiques d'anxiété, des hallucinations ou des crises d'agitation. 60 % des patients en Ehpad sont douloureux. Les équipes ne doivent pas hésiter à les orienter vers le CETD, qui assurera ensuite le lien avec l'IMIC. La prise en charge au sein de l'IMIC se fait sur rendez-vous. Les délais d'attente sont plus ou moins longs, car nous ne sommes que cinq médecins, un psychologue et une infirmière à proposer des consultations, et ce même pas à temps complet.
L'IMIC oeuvre dans une vision institutionnelle et l'AMCA dans une approche sociétale du déploiement des pratiques complémentaires. Quelles sont selon vous les synergies à imaginer pour la qualité et la sécurité des usages ?
Notre objectif au sein de l'IMIC est de montrer que des méthodes complémentaires sont validées scientifiquement et qu'il faut les développer. De son côté, l'AMCA doit nous donner sa vision globale et stratégique de ce qu'elle observe sur le territoire et nous faire remonter les points sur lesquels travailler pour avancer ensemble dans une démarche de qualité et de sécurité pour les patients. Nous avons une réelle complémentarité. Cependant, pour avancer davantage, nous attendons des tutelles une réglementation et un encadrement des pratiques notamment dans le cadre des travaux actuels menés à l'échelon national.
Propos recueillis par Laure Martin