Lors du Salon Santé Autonomie, le 21 mai, Marie-Hélène Angelloz-Nicoud a été réélue à la tête de la Conférence nationale des directeurs d'établissements publics pour personnes âgées et handicapées (CNDEPAH). Quatre nouvelles années de présidence pour porter la voix des EHPAD de la fonction publique hospitalière.
" Les D3S subissent la même pression que les directeurs d'hôpitaux "
Quel est le rôle de la CNDEPAH ?
La Conférence nationale des directeurs d'établissements publics pour personnes âgées et handicapées (CNDEPAH) représente la parole des directeurs des établissements publics. Il y a avait des rassemblements fréquents des directeurs d'établissements associatifs du secteur médico-social mais il manquait une instance pour porter les préoccupations et les revendications des directeurs des structures de la fonction publique hospitalière. Pour le sanitaire et les directeurs d'hôpitaux, il existait dans les CHU, la Commission médicale d'établissement (CME). La Fédération hospitalière de France (FHF) représente ses adhérents, assez peu nombreux dans le secteur médico-social. La CNDEPAH n'a pas toujours eu une activité forte, elle a été remobilisée depuis 2012 pour mettre en place des groupes de travail et être un interlocuteur dans les instances de concertation auprès du Ministère comme dans les groupes de travail initiés par la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS) et Direction générale de l'offre de soins (DGOS). La CNDEPAH participe, par exemple, au Comité national pour la bientraitance et les droits des personnes âgées et des personnes handicapées (CNBD).
Quelle est la situation des EHPAD de la fonction publique hospitalière ?
Le secteur public n'est pas moins innovant que les autres. Il n'est pas moins porteur d'envie et de projets. Mais il existe aujourd'hui trop d'éléments de contraintes. Les autorités de tutelle ont poussé les EHPAD vers la prise en charge de la maladie d'Alzheimer et des cas complexes sans que les moyens ne suivent en parallèle. Les établissements d'hébergement sont confrontés à une augmentation du niveau de dépendance et de besoins de soins des résidents. On demande aux EHPAD de rester des lieux de vie avec des ratios de personnel insuffisants et des GMP qui atteignent 772 et qui s'approchent de plus en plus des seuils des USLD. Or, la personnalisation des soins des résidents demande de plus en plus de temps. Le secteur est passé de la culture orale de la transmission à l'informatisation des dossiers médicaux mais sans les mêmes moyens que l'hôpital.
Le contrôle des prises de médicament, des heures des toilettes, des heures des changes des protections prennent beaucoup de temps. Les équipes doivent consacrées de plus en plus de temps à la traçabilité et aux tâches administratives. Les directeurs se plaignent de dotations soins insuffisantes. Les agences régionales de santé appliquent une convergence tarifaire qui ne dit pas son nom. Dans ce contexte, la seule marge de manoeuvre, entre les coupes Pathos, est d'aller vers une sélection à l'entrée des résidents par rapport à leur niveau de dépendance.
Quel regard portez-vous sur les travaux menés depuis le début de l'année sur la réforme de la tarification des EHPAD ?
La CNDEPAH ne compte pas parmi les participants à ce groupe de travail. A vrai dire, la réflexion sur les tarifs socles ne concerne pas directement les établissements publics. Il n'y a pas d'établissements publics qui font payer des prestations en dehors du tarif hébergement. Même le linge est inclus par la très grande majorité des établissements publics dans le cadre du tarif hébergement. S'agissant de remplacer les conventions tripartites par des CPOM, cela ne changera pas la donne s'il n'y a pas une prospective budgétaire pluriannuelle. Le CPOM sera une boîte sans rien dedans.
Il existe une vraie problématique de postes de direction vacants dans les EHPAD de l'hospitalière. Quelle incidence sur les structures ?
Les carences de nomination et, de fait, les intérims se prolongent sur 12, 18, 24 mois pour certains établissements qui n'ont pourtant pas de démarches de fusion ou de regroupements. On le constate au sein de la CNDEPAH, des directeurs n'ont plus la possibilité de se déplacer dans les réunions de coordinations départementales. Quand les intérims se prolongent sans trouver de candidats au poste de direction, cela ralentit la dynamique des établissements et crée de grosses difficultés. Les directeurs en intérim ne sont pas en mesure de mener à bien des projets, d'animer des groupes de travail. Comment le pourraient-ils ? L'intérim représente une journée et demie par semaine. Durant ce temps, le directeur va s'occuper de la gestion courante, de la trésorerie, du remplacement du personnel. Conséquence, les projets avancent peu ou sont mis en sommeil dans ces EHPAD.
Cinq ans après leur mise en place, quelles sont les relations des chefs d'établissements avec les agences régionales de santé ?
La parole des directeurs des EHPAD de la fonction publique hospitalière est soumise à la même pression que celles des directeurs d'hôpitaux. Les chefs d'établissements avaient plus de reconnaissance avec les DDASS. Les inspecteurs connaissaient les structures, on pouvait, dès lors, travailler dans une relation de confiance réciproque. Ce lien a été perdu avec la mise en place des Agences régionales de santé et leurs délégations territoriales. Les directeurs doivent faire face à des injonctions paradoxales, des préconisations, des contrôles, les évaluations internes, externes, etc. Faire plus mais à moyens constants !
Le projet de loi de santé organise la création de groupements hospitaliers de territoire (GHT), voués à remplacer les communautés hospitalières de territoire (CHT). Comment les EHPAD devront-ils s'inscrire dans les Groupements hospitaliers de territoire ?
La mise en oeuvre des Groupements hospitaliers de territoire (GHT) va nécessiter une réflexion sur le médico-social, sur le projet médical partagé et le lien avec les filières gérontologiques. Il s'agira d'une nouvelle étape dans la conception du service public territorial de santé, associant l'ensemble des acteurs d'un territoire pour une prise en charge sanitaire, médico-social et sociale. L'esprit du service public sanitaire est le même que celui du médico-social. Si la dynamique est porté par des établissements hospitaliers, il peut y avoir un rapport de confiance et un maillage intéressant. Il faut parvenir à construire des parcours cohérents.