Daniel Cassé, directeur de l'Ehpad de Tonnay Boutonne (Charente-Maritime) préside depuis quelques mois la Conférence nationale des directeurs d'établissements publics pour personnes âgées et handicapées (CNDEPAH). Interview d'un D3S qui y croit encore.
" Les EHPAD publics doivent revendiquer leurs compétences "
Vous avez pris la présidence du CNDEPAH en octobre dernier. Quelles priorités souhaitez-vous donner à la Conférence?
Notre premier axe de travail est de renforcer la visibilité de la Conférence auprès des directeurs de structures de personnes âgées ou handicapées et des partenaires institutionnels. De faire entendre la voix des directeurs d'établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux (D3S) dans les instances de concertation sur les travaux en cours sur le CPOM, la réforme de la tarification des EHPAD auprès du Ministère.
Les directeurs d'EHPAD de l'hospitalière sont-ils désenchantés ?
Contrairement au secteur sanitaire dans lequel les directeurs d'établissements sont spécialisés, dans les EHPAD, le chef d'établissement doit être compétent en tout. Et pire, gérer des injonctions paradoxales. Le sens du service public est de faire de l'EHPAD, la dernière demeure et la meilleure demeure pour les résidents.
La charge de travail a augmenté avec les outils informatiques par les autorités de tutelles, les enquêtes, les questionnaires. Les contraintes budgétaires sont de plus en plus importantes. Il y a peu d'EHPAD publics qui ne sont pas déficitaires aujourd'hui. Les directeurs ne doivent pas rester isolés. Développons un esprit de groupe, échangeons avec les collègues, construisons un réseau ! Structurons-nous pour peser et être moteur dans les évolutions en cours, notamment avec la mise en place des Groupements hospitaliers de territoire !
Le groupement hospitalier de territoire (GHT) est l'un des derniers sujets d'inquiétude. Quel est votre point de vue ?
La question centrale est "qu'est ce que les GHT apportent aux EHPAD et qu'est-ce qu'ils leur enlèvent ?". L'EHPAD travaille davantage avec les soins de ville qu'avec le secteur hospitalier. 75% des résidents décèdent à l'EHPAD. Or, les GHT sont hospitalo-centrés. Comme d'autres, je m'interroge sur la place des EHPAD publics dans le projet médical partagé. En amont, en aval ? La notion de projet de vie qui est au coeur de la philosophie de l'accompagnement médico-social sera-t-elle prise en compte ?
Concernant les politiques de mutualisation des achats, les EHPAD n'ont pas attendu des mégastructures comme les GHT pour s'organiser. Des structures nationales existent déjà. Et pour la formation continue, l'offre de l'ANFH, l'organisme collecteur de fonds de formation pour la fonction publique hospitalière correspond aux besoins des établissements. L'EHPAD est toujours considéré comme la cinquième roue du carrosse. Or, il faut travailler sur des projets de territoire. L'EHPAD peut être une structure relais pour l'hôpital, être un lieu de consultations avancées, travailler avec les maisons de santé pluridisciplinaires. Nos établissements doivent revendiquer leurs compétences et devenir chefs de file dans certains territoires.