Leader sur le marché des maisons de retraite médicalisées, le groupe Korian compte bien sur l'innovation pour simplifier les process, développer les nouvelles technologies et faciliter la mise en réseau des professionnels et les parcours de soin des personnes âgées. Le point avec Charles-Antoine Pinel, directeur général France senior.
« Moderniser l'offre, répondre aux attentes d'un public de plus en plus médicalisé, former les professionnels d'intervention »
Korian a une politique dynamique d'investissement à l'étranger. Quel est l'état des lieux aujourd'hui et quelles sont les perspectives ?
Charles-Antoine Pinel :
Le groupe Korian est aujourd'hui implanté dans quatre pays européens (France, Allemagne, Italie et Belgique), qui représentent la moitié de la population européenne âgée de plus de 75 ans. Avec ses 715 établissements et 47 000 collaborateurs, le groupe se positionne dans ces pays, comme leader ou n°2, avec un chiffre d'affaires de 3 milliards d'euros. La moitié du chiffre d'affaires est réalisé en France, avec un parc de 365 établissements, composé de maisons de retraite médicalisées et de cliniques SSR. Nous avons lancé sous l'impulsion de Sophie Boissard il y a un peu plus d'un an, un plan stratégique « Korian 2020 » qui vise le renforcement de l'offre Korian et de son réseau dans les 4 pays. Il est intéressant d'observer comment les pays sont sources d'innovation et de développement de nouveaux concepts entre les différents types d'hébergement et de prise en charge des personnes âgées. En Belgique par exemple, le foyer de Lork intègre une maison de retraite médicalisée, une résidence services et des possibilités de soin à domicile, pour faciliter la prise en charge globale. Le parcours de soin doit être simplifié permettant un accueil de jour, un court séjour, du répit ou un long séjour. Nous travaillons aussi la notion de plateforme gériatrique, en capacité d'apporter des services et soins adaptés aux familles comme aux aidants. Concrètement, nous avons lancé une campagne « les courts-séjours », dans le prolongement de la loi ASV, qui vise à accueillir les proches dans l'établissement et d'offrir ainsi un droit au répit.
Vous avez annoncé récemment le renforcement du pôle seniors. Quels sont précisément les projets ?
CA Pinel :
Korian est une histoire intéressante avec plusieurs réseaux qui se sont rapprochés ces dernières années, à la fois dans les agglomérations urbaines et dans les territoires ruraux. Notre premier objectif est de moderniser et faire évoluer cette offre. Le cadre des CPOM nous aide. Il ouvre un schéma directeur d'amélioration de la prise en charge et des services dans ces établissements. Il faut comprendre que le profil des personnes accueillies a considérablement évolué. Ces dernières années, la médicalisation a augmenté de 20%. C'est un point sur lequel nous devons pouvoir répondre. De même, les personnes atteintes de troubles cognitifs types Alzheimer sont de plus en plus nombreuses. Nous avons donc lancé une démarche « Positive Care » pour accueillir, prendre en charge, développer des ateliers mais aussi des attitudes pour donner à ces personnes tout l'accompagnement et l'attention qu'elles méritent.
Le renforcement du pôle seniors passe nécessairement par la formation et l'accompagnement des collaborateurs qui exercent des métiers de soin et de services. Notre volonté est de former 100% de nos collaborateurs pour leur permettre de croître dans leur expertise et leurs compétences.
L'innovation enfin se traduit par de nouveaux concepts. Nous venons par exemple de créer à Saint-Germain-en-Laye un EHPAD intergénérationnel, construit dans le même environnement qu'une crèche, pour ouvrir la maison de retraite vers l'extérieur, vers d'autres populations.
La télémédecine est-elle intégrée chez Korian ?
CA Pinel :
C'est un des points clés dans l'évolution de notre offre. A Nancy, dans la région Grand Est, deux de nos établissements ont mis en place dans le cadre du dispositif PAERPA un système de télémédecine, dont l'un est en lien avec le CHRU de Nancy. Le bilan est très positif, notamment dans les domaines cardiovasculaires. Cela a permis d'optimiser les prescriptions, d'éviter des transports inutiles, souvent traumatisants pour nos aînés et d'accélérer le processus de soin.
Comment s'organise le passage au CPOM/EPRD dans vos établissements?
CA Pinel :
Ce passage est préparé depuis plusieurs mois. La loi ASV apporte un cadre intéressant dans la mesure où il nous projette dans les 5 années à venir sur chacun des départements pour bien repenser notre offre et être en capacité de développer des projets d'amélioration. Nous avons construit un vrai partenariat avec les autorités de tutelle, créant des échanges au-delà de l'aspect strictement réglementaire, sur l'amélioration de notre prise en charge et la capacité d'assurer une permanence des soins, de répondre aux attentes (accueil de jour, courts séjours...). Dans le cadre des CPOM, nous raisonnons sur un territoire, et non plus sur un établissement. Le but est d'accroître notre niveau de soin, de proposer un véritable parcours aux personnes âgées et de professionnaliser nos salariés. D'ailleurs nos 300 directeurs sont formés en e-learning aux enjeux du CPOM depuis plusieurs mois. Grâce à une plate-forme communautaire, chacun a la possibilité de poser de questions et nous y répondons quasiment en direct.
Quelles sont les attentes de Korian vis à vis de la nouvelle politique Macron ?
CA Pinel :
Plusieurs innovations ont été au coeur de la campagne d'Emmanuel Macron. Je pense notamment à la télémédecine, au développement des maisons de santé, à l'ouverture des EHPAD sur la ville, à la simplification des process... L'innovation répond à des enjeux cruciaux pour la personne âgée. Le tout doit être engagé dans un cadre pluriannuel, avec un ondam qui prenne en compte la réforme de la tarification. Aujourd'hui nous avons beaucoup d'attente et de bienveillance par rapport à ce qui a été annoncé. Mais il faut une volonté concrète et opérationnelle pour le réaliser de manière simple.