De la vie de H. de R. Morgan l'histoire n'a presque rien retenu puisque même son prénom reste une énigme.
"Prendre la mouche"
Par contre ses travaux scientifiques nous restent heureusement accessibles. En 1906 et 1907, il publie dans le fameux British Medical Journal deux articles concernant l'investigation d'épidémies estivales de diarrhée chez des enfants l'amenant à identifier un nouvel agent pathogène qu'il nome " Bacillus n°1 ". Le 26 février 1906 il présente ses travaux devant la section d'épidémiologie présidée par Antoine Newsholme qui n'était autre que l'éminent " Chief Medical Officer " du gouvernement de sa majesté. Le pathogène des diarrhées estivales est désormais appelé " Bacille de Morgan " et si la transmission interhumaine via le portage digestif est consensuelle, les scientifiques de l'époque s'interrogent sur le rôle des mouches. En effet le pathogène avait été retrouvé sur 9 des 36 mouches capturées dans des maisons où sévissait la maladie entérique contre une seule des 32 issues de foyers indemnes d'affection diarrhéique. Il fut statué que la mouche ne pouvait être qu'un agent additionnel de transmission et que sa léthargie hivernale pouvait expliquer en partie la décrue saisonnière des cas. La même analyse réalisée sur le lait montra une culture positive sur 29 échantillons en provenance de maison avec des cas contre aucune sur 36 échantillons de foyers indemnes. De plus en inoculant du lait à température ambiante avec le bacille on n'en trouvait pas trace à 6, 12 et 24 heures. Cela fit dire en séance au Docteur Copman que le lait ne représentait pas un danger car il était peu probable qu'une famille le consomme avant 6 heures de délai. Peu commenté mais très intéressant était le fait que sur du lait stérilisé le bacille de Morgan poussait très facilement et durablement, faute probablement de compétition avec d'autres microorganismes comme dans le lait habituel.
Appelé ensuite Bacillus puis Proteus morganii il devint en 1943 Morganella morganii appellation toujours en vogue. Le concept de pathogène opportuniste, comme suggéré par l'expérience du lait de Morgan, est resté bien ancré. L'évolution du niveau d'hygiène des populations, en particulier alimentaire, a tari les occasions pour M. morganii de générer des épidémies de gastro-entérites. La seule vraie épidémie d'infections associées aux soins décrite s'est produite à Long Island en 1974. A partir d'un cas index chez une femme immunodéprimée on retrouva la bactérie dans le site opératoire d'un homme de 74 ans puis chez une femme de 75 ans pour un total de 11 patients atteints. Par contre, ce bacille à gram négatif de la famille des entérobactéries, est responsable de tout type d'infection isolée de l'infection urinaire à l'abcès cérébral. On a rapporté chez un sujet turc de 77 ans la surinfection à ce pathogène d'un kyste hydatique géant ou encore chez un chinois de 65 ans la surinfection d'un anévrisme de l'aorte abdominale.
Et vous, avez-vous bien coupé les voies d'accès au bacille de Morgan ?
En savoir plus :
http://www.kuleuven.ac.be/vesaliusonline/UNIKEN%20KONGO.doc