Le 7 mai, le ministre de la Santé, Olivier Véran, a annoncé une prime pour les personnels des Ehpad, ainsi que l'octroi de « 475 millions d'euros de crédits supplémentaires » pour ces établissements. Des mesures jugées insuffisantes par Frédéric Cecchin, Directeur adjoint de l'Ehpad de Villefranche-sur-Mer et vice-président D3S du Syndicat des Managers publics de santé (SMPS).
« Primes et revalorisations salariales doivent être les mêmes partout et pour tous »
« Comme pour les soignants, nous annonçons que tous les personnels des Ehpad, quel que soit leur statut, percevront une prime pour valoriser leur engagement sans faille», a déclaré Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé le 7 mai dernier. « Cette prime sera de 1500 euros dans les 33 départements où l'épidémie aura été la plus forte. Et de 1000 euros ailleurs ».
Dans l'attente du décret, déjà paru pour le personnel des établissements publics de santé (1), Frédéric Cecchin, Directeur adjoint de l'Ehpad de Villefranche-sur-Mer et vice-président D3S du SMPS regrette les inégalités de traitement territoriales : « Le travail réalisé dans tous les Ehpad de France a permis d'éviter un trop grand recours aux services d'urgence hospitaliers. Tout a été mis en place pour prévenir l'épidémie. Ne démotivons pas les soignants qui ont été méritants sur l'ensemble du territoire. Il ne faudra pas oublier non plus les établissements accueillant des personnes handicapées, des enfants ou des adolescents. Dans l'établissement où je travaille, nous avons anticipé la mise en place des mesures barrières et nous avons puisé dans nos stocks de protections alors qu'à ce jour (2), nous n'avons reçu ni surblouses, ni gants, ni masques FFP2. Par ailleurs, dans certains départements, la délivrance de masques chirurgicaux a été contingentée à 1,8 par résident et par semaine au lieu des 5 annoncés ».
A l'Ehpad de Villefranche-sur-Mer, seuls cinq cas de Covid-19 et un décès lié au virus ont été enregistrés (sur 200 résidents) grâce notamment, selon le Directeur adjoint, à la création d'un secteur spécialisé Covid employant une infirmière et deux aides-soignants à temps plein. « Les primes et les revalorisations salariales doivent être les mêmes partout et pour tous, poursuit Frédéric Cecchin. Les personnels médicaux, soignants, administratifs, techniques, les animateurs, les cuisiniers,les psychologues, les ASHQ... Tous ont réalisé un formidable travail. »
Comptabilité ternaire
Mais avant même d'envisager leur extension à l'ensemble des personnels, comment les primes seront-elles versées en Ehpad ? La comptabilité ternaire -Assurance maladie, département, famille-, ne risque-t-elle pas de générer des inégalités entre les secteurs sanitaire et médico-social ? « Dans un Ehpad, le salaire d'un psychologue relève de la section "dépendance", donc du département. Que se passera-t-il s'il ne veut pas payer ? », interroge Frédéric Cecchin qui appelle le vote le plus rapidement possible d'une « loi Solidarité grand âge qui prenne en considération les conséquences de la crise et qui permette à nos établissements de disposer de suffisamment de moyens financiers et humains. Il y a eu assez de rapports. Passons aux actes ! »
Dans ce contexte, l'annonce de crédits supplémentaires de 475 millions d'euros pour les Ehpad lui apparaît clairement insuffisante. « Le secteur médico-social a besoin de cinq milliards. Le soutien aux entreprises s'élevant à 100 milliards, j'ose espérer que le gouvernement acceptera d'en débloquer quelques-uns pour la santé et l'accompagnement de nos concitoyens les plus fragiles ».
Le vice-président du SMPS attend aussi de la future loi une réforme de la tarification des Ehpad, une reconnaissance budgétaire des actions menées en faveur de l'autonomie ainsi qu'une harmonisation de la valeur du point GIR départemental. « La valeur du point est de 5,73 euros dans les Alpes-Maritimes contre 7,50 euros dans le Var et 9,47 euros en Corse. Nous demandons également une revalorisation du point d'indice dans la fonction publique car la situation actuelle pénalise fortement nos personnels. Il faut aussi que le Ministère prenne en considération le véritable coût des postes : le salaire d'un aide-soignant est plus proche des 42 000 euros annuels que des 35 000 retenus par le gouvernement... », conclut Frédéric Cecchin.