Dans le n° 91-avril 2018  9844

Quand le réel se rattrape...

Les retraités se sont mobilisés ces derniers temps à plusieurs reprises à la fois contre la hausse de la CSG qui leur est imposé, mais peut-être plus encore contre les représentations négatives et méprisantes qu'ils subissent.

Remarquons combien la tentation d'opposer aux jeunes, les retraités " privilégiés " qui " osent " 1 se plaindre est présente chez les décideurs, chez ceux que l'on dénomment maintenant comme les premiers de cordée. Il y a un véritable mépris pour les seniors, les retraités, les vieux. Autre exemple, un député En Marche évoquait dans L e Parisien la " génération dorée " qui vraiment ne devrait pas se plaindre et être heureuse d'avoir une retraite...

Le président Macron, qui doit largement aux seniors, sa qualification au 2ème tour de la présidentielle puis sa victoire 2 , au-delà d'un projet nécessaire de réforme structurelle des retraites, tend aussi à opposer les retraités aux actifs 3 . En témoigne les conditions de la hausse de la CSG pour les retraités les plus " aisés " (c'est-à-dire disposant d'une pension nette égale ou supérieure à 1 289 € par mois, pour les retraités de moins de 65 ans et de 1 394 € par mois, pour ceux de plus de 65 ans ...) qui selon le rapport du député En Marche (LREM), Joël Giraud, ne sera pas du tout compensé pour 2,5 millions de retraités, et en partie sur le moyen terme, pour 4,5 millions d'entre eux.

Des discours inadaptés

Entendons-nous bien : la hausse de la CSG est parfaitement légitime pour les retraités réellement aisés (par exemple les 7% d'entre eux qui touchent plus de 3 000 € par mois, voire les 15% dont la pension mensuelle dépasse les 2 400 €). Mais c'est le niveau choisi et le discours associé qui apparaissent totalement en dehors des clous. Une décision qui souffre aussi de la comparaison avec la suppression de l'ISF. Il n'est pas sûr que l'augmentation de l'Allocation de solidarité (Aspa, ex minimum vieillesse) de 35 € par mois prévue en 2018 suffise à équilibrer les choses. Ni la décision d'Edouard Philippe de prendre en compte la situation de 100 000 retraités dont les revenus sont justes à la limite.

Des acteurs sociaux

Rappelons surtout que ces discours et décisions s'appuient sur des représentations négatives et éculées de l'avancée en âge mais aussi sur une vision contestable des disparités sociales entre les générations. Ces représentations restent au niveau d'une vision productiviste de la société sans mesurer combien les retraités sont des acteurs sociaux, impliqués dans les solidarités familiales et de proximité, matérielles et informelles, dans le tissu associatif ou encore dans la vie des communes, sans compter l'apport des 4 millions de retraités aidants bénévoles d'un proche (ce qui représente, toutes choses égales par ailleurs, l'équivalent de 80 Mds€ d'économie pour la santé publique).

Plutôt qu'inventer une pseudo lutte des âges, nous avons besoin plus que jamais d'une intergénération active et solidaire pour tisser et retisser le lien social.

Serge Guérin, sociologue. Professeur à l'INSEEC où il dirige le MSc Directeur des établissements de santé.

Co-auteur de " La guerre des générations aura-t-elle lieu ? ", Calmann-Lévy et de " La Silver économie ", La Charte.


01/10/2024  - Ce qui se voit...

Luxe, calme et propreté

S'il est bien une condition indispensable au bon fonctionnement des Ehpad, c'est à n'en pas douter l'hygiène des locaux. Nettoyage, bionettoyage, hygiène du linge... Les consignes et protocoles ne manquent pas pour assurer l'organisation et l'évaluation de ces tâches quotidiennes. Et pourtant, ce travail reste invisible. Ou plutôt, il n'est visible que quand il n'est pas fait. Paradoxe ?
01/10/2024  - Billet

Les vieux aussi !

Serge Guérin me pardonnera de paraphraser le titre de son dernier ouvrage en date* pour titrer mon billet. Vous l'avez lu ou en connaissez le thème : bousculer les idées reçues sur le désintérêt des « vieux » en matière de gestes écologiques et solidaires. Tribune pour répondre à ceux qui pensent que ces générations issues de la deuxième guerre mondiale et des années cinquante ont abusé des trente glorieuses et se moquent des incidences climatiques et générationnelles futures. Elles pourraient pourtant donner des leçons d'économies à beaucoup en matière d'eau, de déchets et de courage. Une anecdote a fini de me convaincre. Récemment par une belle journée je me dirigeais vers la déchetterie suite à des travaux de jardin et je vis sur le bord de la route une personne âgée, courbée et tirant deux chariots utilisés pour les courses. Je me fis la remarque du courage de cette personne sachant que le commerçant le plus proche était à bonne distance. Sur la route de mon retour, je la revis. Quelle ne fut pas ma surprise de constater qu'en fait cette dame âgée ramassait des deux bords de la route les déchets que les « clients » de la déchetterie laissaient tomber de leurs remorques en roulant. Je ralentis pour en avoir la certitude et raconter ce vécu à l'ami Serge. Plus encore, je décidais en ces temps riches d'à priori primaires d'en faire le thème de ce billet. Méfions-nous de ces raccourcis trop faciles. Oui, les vieux « aussi » sont sensibles à ces sujets qui mobilisent beaucoup de jeunes, à juste titre. Gardons-nous de ces clichés clivants. Demain ne pourra se construire qu'en faisant société, intelligemment, avec tolérance et respect. Et dès lors, même si mon propos est naïf, il fera bon vivre ensemble. ...
01/07/2024  - Billet

La victoire appartient au plus opiniâtre

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01/06/2024  - Toucher

Découvrir le corps

Toucher des corps qui ne sont ni les nôtres ni ceux des proches aimés. Les couvrir et les découvrir, au gré des soins et des besoins de chacun. Les toucher avec pudeur et respect, dans l'intimité d'une chambre. C'est notre quotidien de soignants, qui prenons soin de ceux qui ont besoin d'assistance pour les actes simples de la vie.
01/06/2024  - Partie I

Virage domiciliaire: Les risques du tête à queue...

Le « virage domiciliaire » est une formule qui sent bon la novlangue administrative et le poncif bureaucratique. Voici des années que ce virage est annoncé, que de nombreuses caravanes publicitaires stationnent sur les aires d'autoroute de la seniorisation... Pour autant, le bilan est maigre.
16/05/2024  - Billet

Éloge du temps

Le débat sur la fin de vie est en cours. Tel un marqueur politique nécessaire, il a été décidé d'en accélérer la réflexion. Il est vrai que le sujet est plus que sensible car on le constate déjà, la sémantique le dispute au fond. On évoque un « modèle français », qui de mon point de vue sera difficile non seulement à construire mais aussi à mettre en oeuvre. Il a été dit qu'il fallait donner du temps au temps. Et cette formule est reprise bien souvent et complaisamment. Sans vouloir procrastiner, car il est légitime qu'une société évolue, j'ai pour autant l'humilité de penser que notre pays est assez enclin à légiférer et « sur-légiférer » sans s'assurer de la réelle application des lois déjà votées. Un consensus se dégage ainsi pour affirmer qu'en matière de fin de vie, la douleur est le facteur essentiel. Et que le nombre de places en soins palliatifs est non seulement insuffisant mais géographiquement injuste. Le sujet presque tabou est difficilement évoqué. Triste constat. La loi Claeys-Leonetti est incomprise, souvent non mise en oeuvre. Elle correspond pourtant à un encadrement important et nécessaire de ces moments si difficiles. ...
01/05/2024  - Billet

Marqueurs de bienveillance

Les débats sur la loi « Bien vieillir » agitent les acteurs du secteur médico-social. Le grand public est plus préoccupé par d'autres sujets sociétaux, anxiogènes et médiatiquement plus à la « une ». Encore une fois, le grand âge est victime du syndrome de l'indifférence et d'un manque de volonté politique face au mur qui se rapproche de plus en plus. C'est un combat permanent, lassant, décourageant souvent, mais essentiel cependant selon le terme si employé lors de la récente pandémie. ...
01/05/2024  - Partie IV

Pas de société de la longévité sans volonté de valoriser les métiers du care

Pour poursuivre notre série sur la valorisation des métiers du care, évoquons les initiatives visant à améliorer très concrètement le quotidien des femmes et des hommes (surtout des femmes) qui travaillent auprès des plus fragiles.
01/05/2024  - Chronique

Et si on arrêtait de cacher les vieux?

La France des vieux, c'est la France du passé, la France d'hier. Place aux jeunes, à la modernité et à l'innovation digitale ! Bien entendu, je ne suis pas sérieux... Je vous imagine déjà sursauter...