La survenue d'escarre n'est pas une fatalité. L'ARS Île-de-France a initié il y a dix ans la campagne « Sauve ma peau » destinée à mobiliser les services hospitaliers, Ehpad ou services de soins infirmiers à domicile.
« Sauve ma peau », dix ans de campagne
L'agence régionale de santé (ARS) Île-de-France a lancé en 2013 la campagne « Sauve ma peau » qui aurait pu s'appeler « Sauve sa peau »... Objectif ? Faire reculer le risque d'escarre chez les patients et résidents.
Cinq pratiques ont été identifiées comme à fort impact sur la maîtrise du risque d'escarre et la diminution des escarres graves : assurer une prise en charge pluridisciplinaire ; évaluer et réévaluer le risque d'escarre ; pour le patient à risque, changer de position régulièrement et utiliser les supports adaptés ; traiter tôt l'escarre, dès la rougeur ; former les professionnels et éduquer les patients et leur entourage.
Formations innovantes et ludiques
En dehors des traditionnels plans de formation qu'elle finance, l'ARS a lancé en 2017 un appel à projets... innovants et ludiques. Trois réalisations en sont nées, ouvertes à toutes les équipes.
Baptisé « Sauve ma peau 2.0 », un serious game a été développé par l'équipe plaies et cicatrisation du groupement hospitalier (GH) Sud Île-de-France (Melun). Plusieurs scénarios sont possibles en fonction du professionnel que l'on souhaite incarner (infirmier, aide-soignant, médecin), du profil du patient (âge, sexe, etc.), de sa pathologie ou encore du lieu où il se trouve. Un développement particulier est consacré aux plaies du pied des patients diabétiques (disponible en ligne).
Par ailleurs, un e-learning « Prévention et dépistage des escarres » pour les soignants et les aidants, conçu par les équipes de l'hôpital Marie-Lannelongue (GH Paris Saint-Joseph), regroupe du contenu théorique, des tests pédagogiques de compétences acquises, des tutoriels vidéo, des fiches pratiques, un glossaire et des notes de synthèse. Le temps total de la formation est estimé à 45 minutes.
Enfin un kit de formation pour formateurs, « Préserve ma peau », a été élaboré par les équipes de la Clinique Conti à L'Isle-Adam (95). Il s'adresse aux personnels soignants afin qu'ils puissent à leur tour réaliser des formations ludiques, faciles à mettre en place et rapides, pour tous publics, professionnels de santé comme aidants.
Enquêtes de prévalence
La dynamique d'amélioration des pratiques a été entretenue par trois enquêtes de prévalence en juin 2015 et décembre 2017 puis une troisième fin 2020... avec une inéluctable baisse de la participation dans un contexte de deuxième vague Covid - 89 structures contre 155 en 2017. Le taux d'Ehpad a lui aussi été moins élevé en lien avec le lancement de la vaccination.
Positif, côté campagne : l'enquête de prévalence 2020 montre une amélioration dans l'évaluation du risque d'escarre, dans sa réévaluation ainsi que dans les pratiques de prévention. Négatif, côté résultats : une augmentation du risque d'escarre et de leur gravité, avec des résultats proches de 2015. Mais l'épidémie et l'état de santé plus sévère et dégradé des patients/résidents est évidemment à prendre en compte. Et on ne peut en tous cas pas parler de retour à la case départ.
Marqueur de qualité ?
Alors l'escarre est-elle un marqueur de la qualité des soins en Ehpad ? À cette question de Géroscopie, l'ARS répond clairement non : « Le nombre d'escarres dans un Ehpad est corrélé à l'état de santé des résidents et à la maîtrise de ses facteurs de risque. Et la survenue d'une escarre est d'autant plus probable chez un résident s'il est grabataire (immobilisé), dénutri et polypathologique ! » État de santé habituel, contextes de survenue comme une hospitalisation, par exemple après une chirurgie orthopédique, mais aussi les séjours en famille... Beaucoup de paramètres entrent en jeu. Mais, a contrario, l'ARS ajoute aussitôt : « L'absence d'escarre de manière durable dans un établissement constitue indéniablement un marqueur de qualité des soins. »
Un bilan des dix ans ? 128 établissements ont effectué la démarche complète et 230 équipes ont reçu le certificat « Sauve ma peau » et ont ainsi permis d'éviter la survenue d'escarre à 24 911 patients à risque.