Définitivement adopté par l'Assemblée nationale, le 3 décembre, le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) 2019 prévoit d'élargir le droit de prescription des médecins coordonnateurs en EHPAD, qui ne s'exerce aujourd'hui que dans les cas de situation d'urgence ou de risques vitaux, ou lors de la survenue de risques exceptionnels ou collectifs.
Un "pouvoir général de prescription" aux médecins coordonnateurs en EHPAD ?
La mesure (article 41 du PLFSS) prévoit donc que ce droit de prescription s'exerce "en articulation avec le médecin traitant" et que les conditions d'exercice de ce droit soient définies par décret. "Des clauses spécifiques sont prévues dans le cas où le médecin coordonnateur de l'établissement intervient également auprès d'un ou de plusieurs résidents comme médecin traitant", ajoute le texte.
Cette mesure, issue d'un amendement déposé par Bernard Bonne, sénateur (LR) de la Loire et auteur, en mars dernier, d'un rapport d'information sur la situation des EHPAD et lui-même... médecin généraliste vise à attribuer "un pouvoir général de prescription médicamenteuse" aux médecins coordonnateurs des EHPAD. Une intention qui a fait réagir, dès le 23 novembre, la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) qui y voit là un risque "[d'ouvrir] la porte à un désengagement global et généralisé des médecins traitants, médecins généralistes, des EHPAD de France."
La CSMF est plutôt partisane de "solutions alternatives" telles que le développement et le déploiement à l'ensemble des EHPAD de la téléconsultation "pour que les médecins traitants et les médecins correspondants puissent continuer à suivre les résidents dans de bonnes conditions dans le cadre d'un parcours de soins coordonnés."
"Des conflits risquent de surgir"
La polémique n'est pas nouvelle. Depuis des années, cette question de l'élargissement du droit de prescription médicamenteuse des médecins coordonnateurs en EHPAD suscite la ferme opposition des syndicats de médecins généralistes et celle du Conseil national de l'Ordre des médecins (CNOM). Quid du côté du ministère des Solidarités et de la Santé ? "Inscrire cette proposition dans la loi risquerait de déstabiliser un certain nombre d'EHPAD dont les résidents sont suivis par leur médecin généraliste et où tout fonctionne correctement. Si le médecin coordonnateur se met à prescrire à la place des médecins traitants, des conflits risquent de surgir", a considéré, Agnès Buzyn, lors de l'examen du texte au Sénat, le 17 novembre. La ministre s'était déclarée plus favorable à l'idée de poursuivre la réflexion du groupe de travail avec les médecins coordonnateurs sur l'évolution de leurs missions, "y compris, éventuellement, en envisageant la possibilité de les autoriser à prescrire dans un certain cadre, plutôt que d'inscrire dans la loi une telle autorisation de façon un peu brutale, sans en avoir anticipé toutes les implications potentielles sur le terrain."