Le conseil de la CNSA a adopté le 19 mars 2021 un avis et des recommandations sur le financement des politiques de soutien à l'autonomie, pour répondre à l'enjeu de 2030. Ils constituent le cadre de référence qui structurera la poursuite des travaux engagés sur la base du rapport de travail ci-joint.
Vers un financement des politiques de soutien à l'autonomie par la solidarité nationale
Ce texte largement débattu avec les acteurs du secteur, a obtenu 22 voix pour, 2 voix contre et 47 abstentions. 2 membres ont pris acte de ces travaux.
Comme l'explique Marie Anne Montchamp, « cet avis s'inscrit dans la droite ligne de l'article 33 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2021, qui dispose que le Conseil de la CNSA à l'issue d'une large concertation, rende un avis et des recommandations sur le financement des politiques de soutien à l'autonomie. »
Les différents rapports publiés ces dernières années (Libault, Haut Conseil de l'Âge, El Khomri, Vachey...) énumèrent l'ensemble des possibilités « mais cette addition ne fait pas recommandation pour un système de financement, ajoute Marie-Anne Montchamp. C'est pour cette raison que cet article 33 prend tout son sens et nous nous sommes mis au travail, en tant que parties prenantes ». Le but : ouvrir les débats au-delà de 202. « Aujourd'hui on voit bien que tout bute dès lors qu'on en arrive à la question des financements ». Cela explique pourquoi tant de gouvernements ont repoussé chaque fois les travaux sur le vieillissement de la société française et l'organisation de la protection sociale. « Tant qu'on n'a pas défini le modèle et tranché sur la manière de le financer, on ne peut pas avancer ».
Un modèle fondé sur l'approche domiciliaire
Imaginer la transformation passe dès lors pour le conseil par un chapitre prospectif qui tend à adopter un modèle domiciliaire « car c'est ce que nous avons compris de l'attente des français ». Maintenant que la CNSA et son conseil sont devenus l'organe de gouvernance de la 5 e branche de Sécurité sociale, « nous sommes désormais arrimés en tant qu'institution de la sécurité sociale. Nous avons donc pris en compte les déterminants, les principes de la sécurité sociale », à savoir le fait que chacun apporte en fonction de ses moyens, et reçoit en fonction de ses besoins ; l'égalité des chances, l'organisation décentralisée de la République et donc la prise en considération des responsabilités des différents échelons territoriaux, dont l'échelon du département pour rappeler qu'il faut soutenir le principe d'égalité des chances, quel que soit l'endroit où l'on réside. « Cette variable territoriale est très importante car elle détermine les conditions vie de nos concitoyens », ajoute Marie Anne Montchamp.
Des financements utiles et affectés
Financer plus d'accord, mais pourquoi ? Pour aller où ? interroge Marie Anne Montchamp, qui précise « avoir pris soin d'inventorier toutes les natures d'affectation de ressources nouvelles, pour bien vérifier que cette approche cocherait toutes les cases de notre système de protection sociale. » Dès lors, ils doivent permettre de produire des biens et des services nécessaires à la vie autonome, de rattraper et valoriser les salaires et rémunérations des professionnels, en priorité dans le champ du domicile, en incluant le rattrapage pour tous ceux qui n'ont pas bénéficié des mesures Ségur, de revaloriser les métiers et la formation des professionnels, d'aider les infrastructures à se transformer et faire face aux besoins supplémentaires...
Pour structurer ces financements, la caisse s'est appuyée sur 4 principes et constats :
- la prise en compte de la longévité, c'est-à-dire de l'augmentation du nombre de personnes âgées d'ici à 2030 ;
- l'extension des dispositifs (places, financement des parcours), le financement des besoins non pris en compte ou non satisfaits(extension de la PCH aux publics qui aujourd'hui n'en bénéficient pas), la suppression des barrières d'âge entre personnes de moins ou de plus de 60 ans, notamment.
- La transformation du modèle, dans le sens de l'approche domiciliaire, qui rappelle Marie-Anne Montchamp « ne peut pas être un modèle low-cost, mais bien un changement de paradigme ». La personne doit être chez elle !
- La mobilisation et la coordination des différentes politiques publiques de protection sociale et territoriales, selon des modalités de pilotage profondément redéfinies.
Un financement sur 3 étages
Le modèle de financement proposé se construit dès lors sur trois étages, complémentaires et irremplaçables.
Le 1er niveau concerne les politiques publiques. La Caisse alerte sur la nécessité d'intégrer l'enjeu de l'autonomie à l'agenda des politiques publiques, sous réserve de ne pas atteindre les objectifs fixés à 2030. Un agenda Autonomie 2030 signifie, dans une approche concertée, après une évaluation à 360° de l'impact des dispositions et des mesures que chaque politique publique peut prendre, d'inscrire une montée en charge progressive des politiques publiques pour l'autonomie dès 2022.
Pour réussir cet agenda autonomie, la CNSA propose qu'une loi de programmation pluriannuelle puisse être débattue et qu'elle retienne les objectifs année après année. Cet agenda serait dès lors mesurable et pilotable.
L'effet de la longévité est irréversible et doit s'inscrire sur les territoires.
Ce raisonnement doit pouvoir se décliner pour toutes les branches de la sécurité sociale. Et c'est le 2e étage de la fusée. Chacune des branches doit dès lors intégrer dans ses objectifs la préoccupation de l'autonomie.
Enfin et c'est essentiel, la Caisse insiste sur la nécessité de financer l'autonomie par la solidarité nationale, parce qu'elle s'inscrit dans la Sécurité sociale. « Nous prenons le risque, de réaffirmer que c'est la solidarité nationale qui doit financer la politique de l'autonomie ». Et parce que chacun doit apporter sa contribution aux dépenses de la vie quotidienne, elle propose la création d'un compartiment de CSG affecté à la branche autonomie, « CSGA ». Cet effort correspondrait à 0,28 point de CSG, un revenu additionnel qui équivaut à une recette de 4 milliards d'euros supplémentaires en 2024, et 5 milliards en 2030.
Au-delà il faut instaurer une gestion prudentielle des réserves car les aléas économiques rendent préoccupante la « fonte » des réserves dans l'ancienne CNSA. Le principe strict de l'affectation des ressources à l'autonomie doit être maintenu « jusque et y compris » dans la gestion de ces réserves, qui ne doivent pas être réorientées vers d'autres réponses. Cela permet d'obtenir un rendement de ces ressources.
Le pilotage territorial doit enfin être partagé et intégrer la branche mais aussi le conseil départemental et les représentants des politiques publiques (Préfet, DG ARS...).
Création d'une contribution individuelle à la vie quotidienne
Fini le reste à charge en Ehpad ! La CNSA veut aussi créer une contribution individuelle à la vie quotidienne, c'est-à-dire que la participation des personnes sera limitée à la part d'hébergement, moins le forfait dépendance. Elle se limitera donc au gite et au couvert, sera proportionnelle aux revenus et exclura les personnes vivant avec les minima sociaux. « Notre conception du reste à charge est à la fois une anomalie du système et une grande injustice pour les citoyens issus des classes moyennes à revenus modestes ». Il est grand temps d'y remédier.