3 questions à Pascal Meyvaert, médecin coordonnateur en Ehpad
Que pensez-vous des initiatives parlementaires ?
Les députés nous sortent du chapeau des propositions de loi détachées des réalités du terrain ! De plus, ils court-circuitent la négociation engagée depuis un an avec la direction générale de la cohésion sociale (DGCS) pour une refonte de nos missions. Ils se passent de l'expertise des partenaires sociaux et ils vont complètement à l'encontre des propositions entièrement consensuelles des représentants de médecins coordonnateurs : sanctuariser la coordination. Élaboration et suivi du projet de soins de l'Ehpad, évaluation médicale des résidents et animation de l'équipe soignante, elle est garante d'une vision gérontologique globale et d'une prise en compte de la prévention, alors que la médecine d'aujourd'hui telle qu'elle est voulue par le législateur court après le symptôme et n'a rien à voir avec une véritable politique de santé !
Et le soin ?
Hors urgence, il ne doit pas être imposé au médecin coordonnateur, les syndicats sont unanimes à ce sujet. Tous ensemble, ils plaident pour deux métiers, deux contrats et deux rémunérations distincts, et de préférence deux médecins, tout en laissant une souplesse selon les territoires et les Ehpad : un même praticien, s'il le souhaite, peut avoir une double casquette. Si le temps alloué pour la coordination dépend de la taille de l'Ehpad, il faudrait faire dépendre celui du médecin traitant/prescripteur du nombre de patients pris en charge.
Nous avons bien avancé avec la DGCS, et nous étions en passe d'infléchir sa position. Mais aujourd'hui, nous avons des craintes pour la suite : nous n'avons toujours pas de date de prochain rendez-vous. Ce qui laisse aussi en suspens le rôle des infirmières coordinatrices en négociation avec leurs représentantes.
La pénurie de médecins n'est-elle pas une pression pour les députés ?
Sans doute, mais je qualifierais leur réponse de populiste. Et elle sera contreproductive ! Leurs propositions de loi vont avoir un effet répulsif, y compris auprès de médecins coordonnateurs en exercice qui ne veulent pas se voir imposer l'obligation de soigner. Les démissions risquent de s'accélérer alors qu'il y aurait déjà 30 % de postes vacants dans les Ehpad. Les députés veulent déconstruire la profession et imposer un carcan, sans comprendre que l'attractivité passe d'abord par le libre choix. Ils vont de même faire fuir les médecins généralistes traitants qui suivent leurs patients en Ehpad.