Vieillir en bonne santé est le rêve de tous, mais la malvoyance, quelle soit de naissance ou due à l'âge vient parfois compliquer les choses. Un habitat adapté dans un environnement sécurisé est nécessaire, ainsi que l'organisation d'activités permettant une plus grande autonomie malgré le handicap. C'est tout l'intérêt du Centre Résidentiel Valentin Haüy de Paris, rarissime structure de ce type en France.
Activités et vie sociale pour retraités déficients visuels
L'admission ne se fait qu'avec l'accord du résident, qui doit maintenir ou conquérir son autonomie.
La résidence dont le concept adapté est celui de " Résidence avec services " est un foyer-logement, créé en 1994. Intergénérationnel, il est destiné aux seniors valides d'une part (61 studios et F2) et à des étudiants ou jeunes travailleurs d'autre part (39 logements), tous déficients visuels.
Laurence Sisman, directrice du Centre Résidentiel depuis 10 ans et son équipe, encadrent les admissions, qui se font sur la base du volontariat affirmé du futur résident : l'avis de la famille compte mais seul le résident décide de son avenir.
L'objectif est de lui permettre de regagner une certaine autonomie malgré son handicap, et de mieux gérer psychologiquement sa perte de vision.
Ici, il se sentira écouté, compris, sécurisé, pourra se faire de nouveaux amis, rompre avec son isolement et s'alimenter correctement car il aura la possibilité de prendre vingt repas au cours du mois : il faut savoir que la survenue de la malvoyance peut entraîner une perte de l'appétit, qui peut conduire à une dénutrition sévère.
L'équipe du Centre Résidentiel, toujours attentive au respect de l'indépendance de chaque résident, propose son soutien en cas de difficulté liée au handicap visuel : accompagnement pour les sorties en ville, aide à la lecture, développement de l'autonomie par les techniques de l'ergothérapie.
Pour les sorties culturelles, l'Association Valentin Haüy est partenaire de lieux culturels dans toute la France : films, opéras et pièces de théâtre sont proposés en " audio description ". Les musées proposent des visites guidées tactiles.
L'ergothérapie est l'élément pivot de la vie sociale et des activités de la résidence.
Rappelons que l'ergothérapie se caractérise par l'éducation, la rééducation ou la réadaptation par et pour l'activité et que son but est d'évaluer et de traiter les personnes au moyen d'activités, afin de préserver et de développer leur autonomie dans leur environnement quotidien et social.
Concernant le handicap visuel, cécité ou malvoyance, l'ergothérapeute s'appuie sur des techniques spécifiques dites " de compensation du handicap visuel " pour développer l'autonomie, la sécurité et le confort dans la vie quotidienne de chacun en fonction de ses besoins et de ses capacités.
Certains résidents sont déjà " braillistes ", beaucoup ont recours au matériel spécialisé d'aide à la lecture : vidéo-agrandisseurs, machines à lire à synthèse vocale...
D'autres encore se forment sur place au sein de la résidence et participent aux nombreuses activités proposées, dont le programme ressemble beaucoup à celui d'un EHPAD classique : gym douce, tricot, modelage, TV (en audiovision), tissage, sculpture, vannerie, poterie, chants, lecture, atelier informatique (à synthèse vocale), jeux (tactiles) de domino, jeux oraux de mots croisés ou de scrabble...
Ici, pas d'animatrice en tant que telle, mais une ergothérapeute, Corinne Levindrey, qui programme des ateliers de travail en commun : atelier " mémoire ", atelier " bibliothèque sonore " ou encore atelier " cuisine " par exemple.
Premier exemple : les ateliers cuisine car, comment peut-on cuisiner quand on ne voit pas du tout ou très mal ?
Beaucoup d'éléments de rangement sont étiquetés en braille, les boutons du four aussi, et de nombreux trucs et astuces agrémentent le confort : balance parlante, casse-oeufs adaptés. ici on travaillera sur les gestes et techniques pour redonner confiance et l'envie de faire ses petits plats.
Deuxième exemple : le travail sur la mémoire qui permet de compenser la vue par les autres sens !
- mémoire auditive : bruits d'oiseaux, bruits de la nature à repérer
- mémoire du toucher : contenu d'une valise à analyser
- mémoire olfactive et du goût : reconnaître et mémoriser des odeurs, des épices...
Qui dit déficience sensorielle, ne veut pas dire ambiance triste : la résidence reçoit beaucoup de bénévoles, de concerts avec le CNSM de conférenciers, de lecteurs, de chorales, de musique.
Certains EHPAD pourraient même s'en inspirer...
CNSM : Conservatoire National Supérieur de Musique