A la Fondation Roguet (92), la Compagnie Clastic Théâtre anime un atelier de marionnettes hebdomadaire. Une heure trente de plaisir et des bénéfices thérapeutiques certains.
Ainsi font, font, font...ou les bénéfices d'un atelier Marionnettes
Clastic Théâtre : l'art de la marionnette.
Créé il y a 13 ans, le Clastic Théâtre est une compagnie de théâtre professionnelle (directeur : François Lazaro). Elle se dédie à l'art de la marionnette, à la défense du texte contemporain et au compagnonnage avec les auteurs vivants.
La compagnie se veut très impliquée dans la vie culturelle de la cité. Elle se produit dans les appartements des Clichois, dans les collèges et les lycées et à la Fondation Roguet.
Repères
Etablissement public de santé gérontologique Fondation Roguet Clichy
Directrice : Madame Dominique Richard
Capacité (lits & places) :
Moyen séjour : 85
Long séjour : 75
EHPAD : 198.
Activités :
- SSR et Hôpital de Jour
- consultation mémoire
- USLD/SMTI
- EHPAD et accueil de jour
Ce jour-là, autour de la table, il y a Violette, Marcel, Jeanne, Denise et Françoise. Certains sont venus de l'unité Alzheimer, d'autres non. Certains sont en fauteuil roulant, d'autres non. Mais peu importe : nous sommes mercredi et à l'EHPAD de la Fondation Roguet (Clichy, Hauts-de-Seine) c'est l'heure de l'atelier Marionnettes. Aussi autour de la table, il y a aussi les comédiens de la compagnie Clastic*, Véra et Guillaume, et Saliha Hammoudi, psychomotricienne de l'EHPAD. Le but de l'atelier ? " Le travail artistique et la construction de marionnettes doivent d'abord être un moment de plaisir ! répond Guillaume, qui intervient dans l'établissement depuis six ans. Grâce à ce médium, nous sollicitons l'imaginaire, la mémoire, la dynamique de groupe."
L'atelier commence par un tour de table car d'une fois sur l'autre, certains participants peuvent avoir oublié les comédiens et l'atelier. Guillaume enchaine avec la lecture de Cendrillon, un conte des frères Grimm. En effet cette année, - après deux ans centrés sur la relation son-mouvement, les comédiens proposent un travail autour de la narration et du " théâtre de papier ". Il faudra à terme confectionner des silhouettes à coller sur des supports rigides, des marionnettes légères et facilement manipulables. " Les personnes âgées fatiguent vite et ont des difficultés de préhension et de manipulation des objets, et d'orientation dans le temps et l'espace, fait remarquer la psychomotricienne. D'ailleurs, avant les manipulations, j'anime un petit temps d'échauffement segmentaire des différentes parties du corps en privilégiant les poignets et les mains." Une façon ludique de travailler sur le schéma corporel.
La lecture est terminée. " Bravo !, lance Françoise au comédien. Je peux dire bravo, non ? J'ai noté que vous parliez avec les mains..." Puis c'est le moment des échanges. " Quels sont les personnages qui vous ont marqués ? " demande Véra. La jeune femme a suivi une formation d'art-thérapie et c'est au cours d'un stage qu'elle découvert la Fondation Roguet. Les réponses sont variées. " La fée !", répond Violette. Les comédiens échangent un regard complice. Le conte, dans cette version originale, ne parle pas de fée ! mais cette dame, ils le savent, est sensible au merveilleux et elle s'est réapproprié le conte. " Ces contes-là, on aime bien se les rappeler, cela fait du bien ! " poursuit Violette. D'autres résidents mentionnent le prince, les trois soeurs de Cendrillon (elles ne sont que deux...), les colombes...
La création de marionnettes est un processus long. Aussi avant de dessiner les personnages, une exploration de l'univers de Cendrillon s'impose. Aujourd'hui, ce sera sous forme de collage. Véra donne à chacun un carton de couleur vive puis dispose sur la table des photos découpées dans des magazines : chaussures, visages, voitures, robe de soirées, masques,... Si Denise récupère toutes les paires de chaussures, Marcel opte d'entrée pour une photo de forêt. " Elle me fait penser à Vassilissa, le conte que vous avez lu la semaine précédente" commente-t-il. Jeanne tente de poser une photo de mannequin. " L'image est trop grande, il faudrait que quelqu'un la découpe ", suggère-t-elle. Guillaume s'approche. " Je vous donne des ciseaux, vous allez le faire ", affirme-t-il. Car l'atelier c'est aussi une réassurance sur ses capacités. " L'atelier est spécifique mais je ne vois pas l'âge de la personne, renchérit l'artiste. L'artistique touche au coeur de l'humain, c'est tout !" Devant son collage, Françoise, résidente de l'unité protégée, fait de nombreux commentaires. Sur son grand-père, son jardin d'enfance et mille autre choses. Saliha écoute, répond et plus tard livrera les clés. " Les réflexions de cette dame semblent pertinentes dans l'instant mais elles sont en réalité discordantes, fait-elle observer. Ce sont des réactions de suradaptation face à la maladie. Ici en atelier, ces remarques sont les bienvenues et ne gênent pas. Dans l'imaginaire, personne ne recadre personne, tout est permis ! "
Le temps passe, midi approche. Les collages ne sont pas terminés et les résidents les reprendront la semaine prochaine. En attendant les comédiens proposent un rafraîchissement. " Jus de pomme ou jus de raisin ?" lance Véra. " Une coupe de champagne ?" réplique en riant Denise. La bonne humeur est là, une autre réussite de l'atelier Marionnettes. Il faudrait encore parler de cette participante qui au fil des ateliers est passée d'une posture de " non, je ne veux pas " à un rôle de moteur du groupe... " La dynamique vient aussi du fait que les animateurs sont extérieurs et ne portent pas de blouse blanche, insiste la psychomotricienne. C'est très valorisant pour les résidents que des artistes s'intéressent à eux." Les comédiens sont gagnants aussi. " Et en tant qu'artiste, c'est vital d'être confronté à cette réalité ! " murmure Véra. Un message qu'il faudra répandre dans toute la société.