Le réseau des Villes amies des aînés cultive le souci du détail pour aider leurs habitants âgés à rester piétons.
Avancée en âge : les enjeux du « rez-de-ville »
Outre la fatigue, le principal facteur de renoncement des personnes âgées à marcher en ville est la peur de chuter. Ensuite d'être accidentées, bousculées... Mais elles ne passent évidemment pas du tout au rien. Leurs habitudes évoluent : d'abord elles ne modifient pas leurs déplacements mais marchent plus lentement ; ensuite elles prennent conscience de leurs limitations fonctionnelles, et restreignent leur territoire de vie, évitent les rues trop ou pas assez fréquentées, choisissent le chemin le plus court quitte à prendre des risques ; enfin elles renoncent aux sorties du domicile. Les chiffres sont là : 14 % des 75-85 ans ne sortent pas de chez elles de la semaine et 30 % des plus de 85 ans.
Rien d'inéluctable ou du moins de réfrénable à cela, ont décidé de nombreuses Villes amies des aînés. En dehors des travaux d'accessibilité, obligatoires, les « aménités » des espaces publics peuvent continuer de faire sortir les habitants âgés dans leur quartier, leur village, leur rue, au moins dans le rayon communément admis de 300 à 500 mètres. Ce qui permet de maintenir autonomie, lien social et état de santé.
Nancy lance son « Plan Banc »
Le maire de Nancy, Mathieu Klein, des élus et le président de l'Office nancéien des personnes âgées (ONPA) ont présenté le 24 août dernier, dans le quartier Rives de Meurthe, le « Plan Banc » de la ville destiné à créer des espaces de repos adaptés permettant aux seniors de se déplacer régulièrement, d'être autonome, et de retrouver une vie sociale. La lutte contre leur isolement étant une priorité après les différents épisodes de confinement.
La ville a identifié huit parcours et rassemblé 28 balades.
Lors du conseil municipal de décembre dernier, la Ville de Nancy a annoncé un projet d'installation de 100 bancs par an pour un budget de 20 000 euros. Cinq modèles ont été retenus. « Ils procurent un bien-être physique et psychique et vont lutter contre l'isolement et le vieillissement accéléré », a fait savoir Guy Vançon, président de l'ONPA, ancien gériatre pendant 40 ans.
Dijon : un strapontin pour faire son marché
La pionnière des Villes amies des aînés, Dijon, a engagé depuis de nombreuses années une politique de l'âge qui marie ambition et souci du détail au quotidien. Il y a presque dix ans, l'une de ses premières innovations a ainsi été d'installer huit strapontins dans ses halles centrales, avec un principe... central : pour favoriser la marche des personnes âgées, il faut favoriser leur repos. « S'ils n'étaient pas là, je ne viendrais pas ici faire mon marché, par peur de ne pouvoir en repartir, reconnaît une habitante âgée. Le marché est vaste, la foule nombreuse et les files d'attente parfois longues. »
Angers : fontaine, je boirai de ton eau
Pauline Gesta a remporté la première place de l'édition 2020 du budget participatif de la ville d'Angers (Maine-et-Loire) avec plus de 3 000 voix. Son projet ? Installer des fontaines à eau pour encourager les habitants à s'hydrater et en particulier les personnes âgées. 35 000 euros de budget prévisionnel ont été octroyés. Avec l'aide des services techniques, elle doit dans un premier temps déterminer l'emplacement des cinq futures fontaines.
Rennes : c'est peut-être un détail pour vous...
La mission gérontologie de la Ville de Rennes organise des marches exploratoires pour et avec des aînés, dans leur quartier. Plusieurs itinéraires possibles de 500 à 600 mètres sont proposés, correspondant à des trajets du quotidien : accès aux commerces, aux services, aux espaces verts, aux transports en commun... Les échanges avec les agents municipaux, soigneusement consignés, portent sur les cheminements, la signalétique, l'éclairage public, la présence et l'implantation de mobilier d'assise, le partage des trottoirs, l'accès aux transports en commun, le revêtement de sol, la sécurité, etc. Par ailleurs, la Ville de Rennes a fait l'acquisition de simulateurs de vieillissement pour ses agents. Composé de poids, de lunettes limitant la vue et d'un casque atténuant les sons, le harnachement oblige à une attention aux détails qui font ou ne font pas la marchabilité d'une rue pour les plus âgés.
Meaulne : tout d'une grande !
Meaulne, dans l'Allier, est la plus petite Ville Amie des ainés, 900 habitants - devenue Meaulne-Vitray après fusion avec la commune voisine. Mais elle a tout d'une grande ! De sa première consultation auprès de ses 150 habitants de plus de 70 ans est sortie une priorité, inattendue, l'aménagement du cimetière : en dénivelé, avec un seul point d'eau en bas de la côte et aucun banc. Des travaux ont donc été engagés avec un accès par la partie haute et de nouvelles places de parking. Dans le centre du village, l'achat de toilettes publiques automatiques a constitué un très gros investissement mais « elles étaient indispensables, souligne Jacques Bardiot, l'élu municipal chargé des personnes âgées, ancien généraliste du village et aujourd'hui médecin-coordonnateur d'un Ehpad voisin : nous avons balisé avec des marguerites un parcours sécurisé dans le village. Il porte le nom de Fernand Guther, un habitant nonagénaire qui a été une figure locale, un peu anar et caractère rugueux ». Des cannes-sièges sont même disponibles en mairie.