Crédits, forfait global ou Plan d'aide à l'investissement,... voici ce qu'il faut retenir d'une LFSS 2014 (Loi de finances de la sécurité sociale) controversée.
Bien... mais peut mieux faire
Par sa décision n°?2013-682 DC du 19?décembre?2013, le Conseil constitutionnel s'est prononcé sur la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2014. Il avait été saisi, en application de l'article 61 de la Constitution, par plus de soixante députés et plus de soixante sénateurs. Voici les éléments essentiels à retenir?:
ONDAM?: favorisé dans un contexte budgétaire tendu
L'ONDAM (Objectif national des dépenses de l'Assurance-maladie) 2014 des régimes obligatoires de base est fixé à 179,1 Mds d'euros. Il progresse d'un peu plus de 2,4?%, en comparaison aux 174,8 Mds de l'ONDAM 2013 rectifié.
A noter que la loi crée un nouveau sous-objectif de l'ONDAM, dédié aux fonds d'intervention régional (FIR). Cette enveloppe de 3,2?milliards d'euros est déléguée aux ARS (Agences régionales de santé) pour la mise en oeuvre de leurs politiques en matière de prévention, d'accompagnement des établissements de santé, au financement des MAIA et des GEM (groupes d'entraide mutuelle).
ONDAM médico-social?: bien loti dans le contexte budgétaire
- 8,6 Mds pour la contribution de l'Assurance-maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes âgées (contre 8,4 Mds au titre de l'ONDAM 2013 rectifié)
- 9 Mds d'euros pour la contribution de l'Assurance-maladie aux dépenses en établissements et services pour personnes handicapées (contre 8,7 Mds inscrits dans l'ONDAM 2013 rectifié).
Poursuite de la médicalisation?: un effort certain quoiqu'insuffisant
Le texte affecte 130 millions à la poursuite de l'effort de médicalisation. Le budget dédié en 2014 reste inférieur à celui de 2013 et dans tous les cas insuffisant pour couvrir toutes les conventions en attente de signature.
Tarif global : à nouveau ouvert mais réduit et sélectif
L'option tarifaire dite "globale" ouverte aux EHPAD par le code de l'action sociale et des familles sera de nouveau accessible (après sa suspension par l'administration par voie de circulaire en 2011). Le budget alloué s'élève à 10?millions d'euros. Réduite, la version 2 de l'option tarifaire globale s'annonce également sélective?: les établissements conventionnés au tarif partiel et disposant d'une PUI seront prioritaires. D'autre part, les ARS pourraient prendre part à la décision des EPHAD, selon un projet de décret très controversé.
Le taux reconducteur : insuffisant
Le taux de reconduction des moyens existants atteint 1 % contre 1,4 % en 2013. Avec 1,1 % pour les salaires et 0,6 % pour l'effet prix, l'augmentation des charges ne saura être couverte, a fortiori quand les conseils généraux mettent la pression sur les prix bas. L'accompagnement des personnes âgées risque d'en pâtir.
La CASA détournée une nouvelle fois de son objectif
Sur les 650?millions de recettes de la CASA *, seulement 100 seront dédiés au but initial de prise en charge des personnes privées d'autonomie. La répartition de cette somme gérée par la CNSA se fait ainsi : 30 millions pour le fonds de restructuration des services d'aide et d'accompagnement à domicile et 70 pour le PAI (Plan d'aide à l'investissement).
A noter que le gouvernement devra remettre au Parlement, avant le 1er septembre 2014, un rapport relatif à l'utilisation des fonds de la CNSA dont les 100?millions d'euros précités.
* CASA?: Prélèvement de 0,3?% sur les retraites depuis le 1er avril 2013
PAI : gestion décentralisée
La gestion des crédits du PAI est désormais affectée aux ARS. Le montant affecté à chaque ARS sera décidé par le directeur de la CNSA dans la limite d'un montant national déterminé par arrêté. Les investissements réalisés grâce au PAI devront, à compter de 2014, correspondre à la stratégie de santé définie dans les projets régionaux de santé.
La fin des indicateurs qualité
La LFSS abroge l'article 67 de la LFSS pour 2012. Il prévoyait une modulation du forfait global en fonction d'indicateurs de qualité et d'efficience. Le choix des indicateurs et surtout le processus de décision en cas d'indicateurs plus mauvais que la moyenne nationale rendaient plus d'un professionnel sceptique.
Expérimentation télémédecine
La LFSS autorise l'expérimentation portant sur la réalisation d'actes de télémédecine pour des patients pris en charge en médecine de ville ou en structures médico-sociales. Objectif : faciliter l'accès aux soins, optimiser les parcours de santé, renforcer l'efficience de la prise en charge. Ces expérimentations porteront sur la téléexpertise, la téléconsultation et la télésurveillance. Autorisées à compter du 1er janvier 2014 et pour 4 ans, elles seront pilotées par les ARS. Un prochain arrêté fixera cahier des charges, dérogations aux règles de tarification applicables aux ESMS et liste des régions pilotes.
Deux avis :
" Un fort sentiment d'amertume "
Claudy Jarry, président de la FNADEPA.
La LFSS 2014 est sous pression. Pour le médico-social, elle est moins catastrophique que ce qu'on pouvait craindre. L'évolution de l'ONDAM médico-social, bien qu'inférieur à celui de 2013, tire son épingle du jeu. Pour autant la LFSS n'est pas satisfaisante et avec une revalorisation de 1?% des dotations soin, les établissements et services verront leurs moyens d'actions diminuer encore en 2014 par rapport à 2013?! Ce LFSS laisse un fort sentiment d'amertume. Alors qu'on a fait cotiser les retraités par la CASA, les sommes allouées ne sont pas utilisées à l'effet prévu. Cela met en question la parole de l'État. Le secteur peine à se faire entendre. L'argent est là mais pas la loi...
Au-delà de la faible progression des moyens accordés par la LFSS, la crainte est grande de voir les départements de nouveau freiner des 4 fers... Ainsi l'inadmissible sous consommation des crédits de médicalisation risque de perdurer rendant insupportable le manque de moyens tant pour les personnes âgées et leur famille que pour les personnels?!
Le système de financement actuel, fondé sur les co-financements État/conseils généraux, est arrivé en fin de vie. Il faut un financement non dépendant des acteurs.
" Une LFSS de transition "
David Causse, coordonnateur du pôle médico-social de la FEHAP.
La LFSS 2014 apparaît comme une LFSS de transition, avec un léger arbitrage en faveur de l'ONDAM médico-social. L'annonce de la Loi Autonomie a peut-être empêché les parlementaires de s'investir plus avant. Aussi, je crains que les collègues sur le terrain ne perçoivent plus vite l'augmentation de la TVA ou la baisse des exonérations sociales en milieu rural (ZRR), que l'amélioration des conditions de prise en charge, même si une enveloppe de médicalisation des maisons de retraite est à nouveau annoncée pour 2014, en espérant que les crédits puissent enfin être consommés.