Brève de buraliste...
Elle cafouille dans son porte-monnaie et perd patience ne trouvant pas sa monnaie. La buraliste chez qui Lucette* est venue acheter ses journaux, comme moi, lui sourit. Lucette est désolée, ressentant avec tristesse le fait de faire attendre d'autres clients. Son visage est pourtant lumineux et elle « porte » bien un âge que j'estime autour de 85 ans. Ses mains s'agitent et tout en elle s'impatiente. Je lui souris et lui fais ressentir la compréhension de tous.
« Prenez votre temps ».
« Ah... Vous savez il ne faudrait pas vieillir » !
Lucette vient d'exprimer brusquement une affirmation bien trop courante. La buraliste bondit : « Mais enfin Lucette, ne dites pas cela, c'est une chance de vieillir ! »
Lucette n'en revient pas et reste sans voix. Interloquée par ce retour aussi rapide qu'un « Ace » au tennis. Et sourit enfin, égalité ! Anecdote réelle et vécue cet été si particulier, contraignant et anxiogène. Cette buraliste ne savait pas, qu'entre un Paris Match, l'équipe et le quotidien local, elle venait d'exprimer en peu de mots les bases de cette société inclusive du grand âge que de nombreux colloques, rapports et débats tentent de faire admettre à une société qui n'écoute que d'une oreille distraite ou affaiblit. Mais comment comprendre cette « chance de vieillir » lorsque les fonctions « régaliennes » du corps commencent à faire défaut et que l'environnement sociétal développe et promeut un jeunisme où la vitesse et « l'utile » le disputent au temps.
Lucette est repartie, souriante et probablement sans savoir qu'elle venait, involontairement, de contribuer à l'avenir.