Offrir des repas attractifs constitue un réel enjeu pour les EHPAD. Du goût des aliments à l'environnement, de nombreux facteurs vont contribuer à améliorer la consommation des repas chez les résidents. Paroles d'experts.
Ces petits riens qui changent tout
Virginie Pouyet, Docteur en sciences des aliments chez Nutrisens
"Capitaliser sur les notions de plaisir et de convivialité"
« Valoriser le temps du repas est aujourd'hui une tendance de fond dans l'EHPAD. Cela permet de capitaliser sur les notions de plaisir et de convivialité et surtout d'assurer une meilleure consommation notamment pour les "petits mangeurs" qui ont du mal à finir leur repas. Il y a aujourd'hui de nombreuses initiatives prises par les professionnels au sein des EHPAD. Nutrisens a lancé son trophée NutriD pour récompenser et faire connaître les acteurs qui proposent des solutions innovantes, répondant à des problématiques liées à la nutrition, au plaisir et à la santé. Pour lutter contre la dénutrition des résidents, l'enjeu en terme d'innovation culinaire est aujourd'hui l'enrichissement des plats. Cela consiste à augmenter la densité protéino-énergétique des repas c'est-à-dire à augmenter les apports en protéines et calories des éléments constitutifs du repas sans en augmenter leur volume (entrées, plats, laitages, desserts, collations, boissons...). Cette stratégie permet d'atteindre, pour un même grammage, des apports accrus en protéines et en énergie. C'est toutefois une contrainte technique pour les chefs cuisiniers car il faut savoir bien choisir les enrichissements et ne pas altérer le goût des plats. Les établissements ne savent pas toujours comment mettre en place des stratégies d'enrichissement de l'alimentation. Qui est concerné ? Comment réaliser ces repas au quotidien ? Les chefs cuisiniers n'ont pas tous le même niveau de maîtrise de ces techniques. Nutrisens a lancé en octobre un kit d'accompagnement pour les établissements, baptisée la Startbox qui contient notamment des solutions d'enrichissement (poudres de protéines, boisson enrichie à réhydrater, crème dessert déshydratée, bouillie de céréales HP/HC, bonbons de chocolat enrichis) et un livret sur les méthodes d'enrichissement des repas, une fiche procédure avec les étapes de réalisation d'une soupe hyperprotéinée. »
Laure Cloarec Blanchard, Médecin Gériatre, référent Nutrition Adef Résidences
« Faire du résident, un acteur de son alimentation »
« L'environnement joue à 80 % sur la consommation du repas. L'accueil, la lumière, la gentillesse, l'annonce des plats, se sentir bien avec les autres, la convivialité... Tous ces éléments vont contribuer à la consommation des repas chez les résidents. Laisser le temps de manger aux résidents est primordial. Le fait de pouvoir manger spontanément à son rythme augmente de 30 % la consommation du repas. Au petit-déjeuner, il faut laisser une demi-heure ; au déjeuner, une heure et au dîner, ¾ d'heure. Avoir le choix est un autre élément important, ce qui n'est pas facile à mettre en place en restauration collective. Il faut évoluer pour redonner du choix au résident, qu'il soit acteur lui-même dans son alimentation, qu'il ne soit pas passif. Dans certains EHPAD, une carte de menus de remplacement anticipée est présentée le vendredi aux résidents pour les repas de la semaine suivante. Pour les résidents qui ont des troubles cognitifs, beaucoup d'établissements ont une carte de substitution minute. Cela permet de faire, sur place, quelque chose de simple que le résident aura envie de manger, au dernier moment. L'objectif principal est de donner envie au résident de manger en respectant ses choix. La plupart des résidents consomment partiellement leur repas du soir. Ils mangent la soupe, sautent le plat, passent directement au laitage ou au dessert. Ce problème de nombre de composantes du dîner en EHPAD est en train d'être retravaillé dans les établissements. L'objectif est de diminuer le nombre de composantes du dîner pour les faire glisser sur le petit-déjeuner. Le tout étant de respecter les apports nutritionnels sur une journée mais aussi de répondre aux besoins du résident et au profil de mangeur (petit, moyen, gros mangeur). »