A chaque campagne budgétaire, les Ehpad sont dans l'inquiétude. Le budget prévu pour la dotation Soins sera-t-il validé ou raboté?? A quelques semaines de la date limite d'envoi des propositions aux ARS, voici quelques conseils, avec l'aide de la FNAQPA (Fédération Nationale Avenir et Qualité de vie des Personnes Âgées) pour anticiper et le cas échéant déposer un recours.
Contester sa dotation Soins : pourquoi, comment ?
Depuis la loi FSS pour 2009, le budget des établissements ne dépend plus des charges mais des ressources dont il a besoin. Le niveau des ressources nécessaires est déterminé en fonction du niveau de dépendance moyen des personnes accueillies (GIR moyen pondéré ou GMP) et de leurs besoins en soins médico-techniques (Pathos moyen pondéré ou PMP), qui conjugués donnent le GMPS. La dotation Soins résulte ainsi d'une équation qui donne la dotation de référence de l'établissement. Conçue au départ comme une norme de financement, cette référence constitue simplement maintenant un plafond dont le montant est non opposable aux pouvoirs publics.
Depuis le décret du 8?janvier 2013, au moment des renouvellements des conventions tripartites et une fois pendant la durée de la convention, les établissements doivent évaluer le GMP et le PMP.
L'établissement alors envoie les résultats aux médecins du Conseil général et de l'ARS qui valident. «?Certaines ARS valident avec beaucoup de retard, regrette Clémence Lacour, de la FNAQPA. À ce jour certains indicateurs ne sont pas encore réactualisés alors même que leur dernière évaluation date de 2007. Le fait est tellement notoire que le rapport IGAS 2011 sur le tarif global * pointe ce délai comme une façon pour les ARS de réguler l'enveloppe financière du secteur Personnes âgées.?»
Transmission des propositions budgétaires
Le gestionnaire prévoit ses dépenses et ses recettes sous forme d'une proposition budgétaire qu'il transmet à l'ARS (art. R.?314-3 CASF).
Délai?: cet envoi se fait le 31?octobre de l'année qui précède celle à laquelle se rapporte la proposition budgétaire. Ex?: le budget prévisionnel pour 2015 doit être transmis avant le 31?octobre 2014.
La décision
- Délai de réponse de l'ARS?:
La publication de l'arrêté fixant les dotations régionales limitatives ou DRL (art. R.?314-36 CASF) donne le départ du délai de réponse.
L'ARS doit transmettre ses propositions de modification budgétaire au plus tard 12 jours avant l'expiration de ce délai de 60 jours (soit jusqu'au 48e jour à compter de la publication de l'arrêté).
- Motivation de la décision
Selon le CASF (art. R 314-22), l'autorité de tarification a l'obligation de motiver les modifications ou abattements auxquels elle procède. Une baisse de 10?% de la DRL ne saurait impliquer une baisse des dotations de tous les établissements. «?Les ARS ne peuvent pas prévoir un abattement mécanique pour tous les établissements?», confirme-t-on à la FNAQPA. Une telle décision est contraire au droit positif. Cela crée une inégalité de traitement entre citoyens devant la loi et ce alors même que la loi HPST de 2009 prévoit en son titre?II "un accès pour tous aux soins de qualité".
Le caractère limitatif de la DRL est un motif valable d'abattement si les autorités de tarification démontrent en quoi les demandes de l'établissement sont incompatibles avec leur enveloppe de financement.
Contester la décision de l'ARS
Les réductions proposées par les ARS, au vu d'indicateurs non à jour, entrent en contradiction avec la norme de financement consacrée depuis 2009. Celle-ci permet, en principe, d'octroyer aux établissements les moyens dont ils ont besoin pour assurer une prise en charge au plus près des besoins objectivement évalués des personnes qu'ils accueillent.
La contestation est possible et peut être mise en oeuvre à deux occasions?:
a) Contestation pendant la discussion contradictoire
Délai?:
À la réception de la dernière proposition, l'établissement a 8 jours pour motiver de façon circonstanciée son désaccord à l'ARS (art R.314-24 CASF). Attention?: si la proposition budgétaire n'a pas été transmise dans les délais, l'établissement n'est plus en position de contester le tarif qui lui est alloué.
Forme?:
- la contestation doit être «?expresse?»?: l'établissement doit manifester son désaccord.
- la lettre recommandée avec accusé de réception
Fond?:
L'établissement doit donner les raisons qui rendent impossibles l'application de la proposition?: il manque un financement pour une aide-soignante, les PMP n'ont pas été revalorisés depuis trois ans, le budget proposé est en phase avec la circulaire nationale (voir encadré). La formulation peut être délicate...
Pour faire valoir son dossier, il convient de mettre en perspective sa dotation par rapport aux autres établissements. Le mieux est de se faire communiquer (certaines ARS refusent) les valeurs nettes moyennes départementales et régionales des indicateurs nationaux de référence. Et montrer, le cas échéant, que son établissement ressort à des valeurs inférieures à celles de son territoire.
b) après la parution de l'arrêté de tarification
Délai?: après la réception du courrier, l'établissement dispose d'un mois pour saisir le TITSS dans lequel l'établissement ou le service a son siège.
«?Certains gagnent..., précise-t-on à la FNAQPA. Toutefois cela peut être aussi le début d'une longue procédure?: cela peut aller en appel devant la CNTSS (Cour nationale de la tarification sanitaire et sociale), puis en cassation devant le Conseil d'État...?»
* Financement des soins dispensés dans les EHPAD-Evaluation de l'option tarifaire dite globale, IGAS, octobre?2011).
Extrait CIRCULAIRE N° DGCS/SD5C/DSS/CNSA/2014/94 du 28 mars 2014 relative aux orientations de l'exercice 2014 pour la campagne budgétaire :
« Tout comme en 2013, le contexte financier global vous impose d'être particulièrement attentifs au respect de vos dotations régionales limitatives. Cette attention doit s'inscrire dans un dialogue tarifaire de nature à promouvoir la qualité des prises en charge, à la faveur du déploiement des évaluations externes des établissements et services médico-sociaux qui doivent impérativement être réalisées en 2014 pour les établissements dont l'autorisation doit être renouvelée en 2017. »
« Un secteur "Personnes âgées" mobilisé prioritairement sur la poursuite de la médicalisation, la réouverture du tarif global et l'achèvement du plan Alzheimer 2008-2012. »