Alors que la crise sanitaire impacte le fonctionnement des établissements, Adef Résidences constate une montée des phénomènes de violence. Le groupe décide alors d'accompagner ses professionnels.
Des établissements bouleversés par la crise
« Le virus est très vite entré dans les Ehpad mais cela nous a paru essentiel de tenter de comprendre ce qui était éprouvé au sein des structures pour ne pas risquer de passer à côté des réalités humaines engendrées par cette crise », explique Sabrina Blot, Directrice de la stratégie et de l'innovation pour les enjeux humains. « Nous avons alors décidé de mener des entretiens avec chaque directeur pour comprendre ce que vivaient les professionnels, les directeurs, les résidents, les familles. » De ces échanges ressort l'émergence de phénomènes de violence, de deux types. Les violences factuelles, liées aux situations réelles vécues sur les structures comme le confinement en chambre, les décès très brutaux avec un accompagnement contraint compte tenu des circonstances ; et puis une part de violences émotionnelles liées à la peur et l'angoisse. « Nous avons identifié un niveau de violence émotionnelle identique dans tous les ehpad, qu'ils aient été touchés par la Covid ou non ; alors que les violences factuelles sont plus importantes dans les établissements touchés par la Covid. Les quantifier nous a permis de les intégrer dans nos stratégies et notre communication à destination des professionnels comme des familles ».
Des directeurs isolés mais pas seuls
Les directeurs du groupe ont au printemps dernier témoigné de difficultés liées au manque de moyens (EPI), mais aussi à la « fuite » de certains salariés. Les mesures de confinement, bien que nécessaires, ont aussi créé un repli des établissements, renforçant le sentiment de solitude. « En Ehpad, les fonctions et tâches sont généralement distinctes et structurées. Mais cette crise sanitaire a bousculé les rôles. Tout le monde portait la même blouse et travaillait activement. Des directeurs ont mis des résidents en housse mortuaire ou servi des repas. Tous ont vécu et affronté la même réalité, ensemble. »
Travailler avec les absents
Comme le souligne Sabrina Blot, « une des grandes difficultés a été d'appréhender le retour au travail des salariés absents. Comment partager cette réalité et cette violence avec ceux qui n'étaient pas là ? » Et ce, tout en distinguant les salariés qualifiés parfois outrageusement de « déserteurs » des absents « légitimes ». « Cette crise a aussi amorcé des questionnements individuels existentiels. Certains ont décidé de changer de profession, d'autres, dont les managers, ont choisi de se rapprocher de leurs équipes sur le terrain, afin de créer les conditions pour que la parole puisse circuler, et que les absents entendent quelque chose de ce qui a été vécu dans les établissements. » Cela se traduit par des groupes de paroles, des interventions de psychologues* qui proposent des dispositifs d'analyse de pratique, et la ligne d'écoute téléphonique créée par le groupe et toujours active pour accompagner des professionnels en souffrance.
Des institutions en mouvement
Cette crise interroge aussi les établissements sur leur mode de fonctionnement, les sujets à dominante éthique, les questions d'enfermement, de droits et libertés... « Il s'agit de poursuivre l'humanisation des établissements. Les psychologues accompagnent les équipes dans cette réflexion et dans le travail de transformation pour faire des Ehpad des lieux d'humanité ».