Outre les prises en charge médicamenteuses, les patients vivant avec la maladie d'Alzheimer et maladies apparentées peuvent également bénéficier d'accompagnements non médicamenteux. Ces interventions doivent toutefois être encadrées.
Des pratiques complémentaires pour soutenir les patients
Activité physique adaptée (APA), art-thérapie, hortithérapie, interventions assistées par l'animal ou la danse, réhabilitation cognitive, stimulation multisensorielle, thérapie de réminiscence ou stimulation cognitive : en parallèle des traitements médicamenteux, les interventions non médicamenteuses (INM), proposées aux personnes vivant avec la maladie d'Alzheimer, sont variées. La société savante Non-pharmacological intervention society (NPIS) les définit comme des méthodes de santé référencées, efficaces, non invasives, personnalisées, encadrées par un professionnel qualifié et intégrées dans un parcours individuel. « Une grande revue de la littérature a démontré que ces interventions produisent des effets sur l'autonomie fonctionnelle, le comportement, la sphère affective et la qualité de vie des personnes malades », énumère Jean-Bernard Mabire, psychologue, responsable de projets à la Fondation Médéric Alzheimer.
Des bienfaits à plusieurs échelles
« Dans ce cadre, la mobilisation individuelle ou collective des résidents permet le maintien du lien social et participe à rompre l'isolement dans lequel certains peuvent s'enfermer », explique Christine Tabuenca, directrice générale de la Fondation Médéric Alzheimer. Ces activités, choisies de manière personnalisée afin de répondre aux besoins et aux envies de chaque résident, contribuent également à sa valorisation. « Les sciences humaines et sociales sont indispensables pour améliorer leur qualité de vie et de soins », ajoute-t-elle. De plus, en ayant recours aux INM, les établissements médico-sociaux agissent certes sur le bien-être des résidents, mais l'impact est plus large. « L'amélioration de leur qualité de vie se ressent aussi sur leurs soignants et leurs aidants », insiste Jean-Bernard Mabire. Avant de proposer une INM, la structure doit toutefois toujours s'interroger sur les contre-indications éventuelles. « Il est important de personnaliser les orientations car les effets indésirables existent, ajoute-t-il. À titre d'exemple, une personne encouragée à participer à un atelier mémoire, qui se retrouve en échec, peut ressentir une baisse d'estime d'elle-même. » De même, les EMS doivent s'assurer de la formation et de l'expertise des intervenants sollicités.
Trois pratiques à la loupe
La Fondation Médéric Alzheimer a publié un guide décrivant une dizaine d'INM adaptées aux personnes âgées et/ou vivant avec la maladie d'Alzheimer ou une maladie apparentée.
L'hortithérapie
Cet acte thérapeutique holistique consiste à utiliser le jardin, le jardinage, la culture des plantes ou, d'une façon plus générale, la relation aux plantes et aux matériaux issus de la nature, dans le but d'améliorer la santé physique, mentale et sociale de la personne. La relation à la nature procure de nombreux bienfaits : mobilisation du corps, diminution du niveau de stress, récupération des capacités d'attention et de concentration, stimulation de la cognition, soutien de l'imagination et de la créativité. L'hortithérapie participe également au renforcement de l'estime de soi et à la sociabilité. Cette activité favorise la réminiscence et l'entraînement mnésique, et d'un point de vue social, l'ouverture, l'écoute, la confiance ainsi que les interactions sociales. « Lors d'une étude menée par la Fondation en 2021, sur les bienfaits de l'hortithérapie, les résidents d'un Ehpad participant aux ateliers étaient fiers de nous montrer avant chaque atelier les plantations et les semis réalisés la séance précédente et d'observer avec nous leur évolution, confie Jean-Bernard Mabire. Nous étions heureux d'observer ce sentiment d'appropriation révélateur de l'implication des résidents dans ces ateliers, porteur de sens et vecteur de bien-être. » Aucun programme en France ne délivre de diplôme d'hortithérapie. Cependant les soignants peuvent y être sensibilisés par une formation dédiée.
La médiation par la danse
La danse-thérapie fait partie des disciplines majeures de l'art-thérapie. L'utilisation psychothérapeutique du mouvement et de la danse permet aux participants de s'engager de façon créative dans un processus conçu pour promouvoir l'intégration émotionnelle, cognitive, physique, sociale et spirituelle de soi. « La danse est une activité sociale et culturelle dans laquelle chaque personne exprime sa singularité et sa personnalité, souligne Jean-Bernard Mabire. Cette liberté d'expression est importante et source de bien-être et d'échange avec l'autre. » D'un point de vue cognitif, elle encourage l'attention, la coordination spatiale des mouvements, la synchronisation dans l'espace et le temps ou les interactions sociales. Elle aide aussi à réduire le stress psychologique et à développer de nouvelles connexions neuronales, en particulier dans les aires cérébrales impliquées dans les fonctions exécutives, la mémoire à long terme et la reconnaissance spatiale. Ces interventions doivent être animées par un danse-thérapeute, un thérapeute ou un psychothérapeute de la danse et du mouvement, ayant suivi un programme spécifique de formation.
Le travail de réminiscence
Le travail de réminiscence chez les personnes vivant avec la maladie d'Alzheimer ou une maladie apparentée implique une conversation sur les activités, les événements et les expériences passées à l'aide d'éléments tangibles ou de déclencheurs de souvenirs (photographies, objets domestiques, familiers, musique, enregistrements sonores ou vidéo, etc.). Dans un contexte de groupe, l'objectif est d'évoquer des souvenirs personnels et d'encourager la communication. Le travail de biographie contient souvent une partie individuelle et se traduit par la production d'un « livre biographique » (numérique ou papier) afin que le résident raconte son histoire de vie. Ce travail permet un processus cognitif car la mémoire des événements et des souvenirs anciens est relativement intacte dans la maladie d'Alzheimer. « À travers l'évocation de souvenirs anciens, longtemps préservés dans la maladie d'Alzheimer, les personnes sont dans le partage, dans l'interaction avec les autres et cela renforce grandement l'estime de soi et l'inclusion sociale, observe Jean-Bernard Mabire. Les professionnels et les aidants familiaux voient chez la personne non plus des déficits mais des compétences, ce qui maintient et renforce la relation avec la personne malade. »