Assujettis au décret dit tertiaire, les Ehpad ont un an de plus pour déclarer leurs premières données de consommation énergétique sur la plateforme Operat. Un délai supplémentaire qu'ils peuvent mettre à profit pour lancer un plan d'action d'économies d'énergie.
Dispositif Éco-énergie tertiaire : le calendrier repoussé d'un an
Covid oblige, le ministère de la Transition écologique l'a annoncé le 17 juin à l'occasion d'un webinaire sur le dispositif Éco-énergie tertiaire, la date butoir pour la remontée des premières données de consommation énergétique des bâtiments tertiaires à effectuer sur la plateforme Operat*, gérée par l'agence de la transition écologique Ademe, est repoussée du 30 septembre 2021 au 30 septembre 2022. La publication d'un décret et d'un arrêté modificatifs confirmant ce report est attendue courant septembre.
Pour rappel, dans son chapitre dédié à la rénovation énergétique, la loi Elan du 23 novembre 2018 a prévu la mise en oeuvre « d'actions de réduction de la consommation d'énergie finale » par tous les propriétaires et occupants de bâtiments tertiaires de plus de 1 000 m2, écoles, bureaux, commerces, hôtels... et Ehpad.
Pour la grande majorité des bâtiments, anciens et énergivores, l'objectif de réduction à atteindre sera de -40 % en 2030, -50 % en 2040 et -60 % en 2050 par rapport à une année de référence postérieure à 2010. C'est l'objectif dit en valeur relative (%). Mais les assujettis qui ont déjà engage? des actions de réduction de leur consommation d'énergie peuvent s'orienter vers l'autre modalité : l'objectif exprime? en valeur absolue, définie selon le type d'activités.
L'arsenal réglementaire
Un décret du 23 juillet 2019, dit décret tertiaire, a précisé les conditions et les modalités relatives à cette nouvelle obligation.
Un premier arrêté appelé Arrêté méthode du 10 avril 2020 a concrètement mis en place le dispositif Éco-énergie tertiaire puis un arrêté modificatif du 24 novembre 2020 dit Arrêté valeur absolue 1 a fixé les objectifs exprimés en valeur absolue pour trois types d'activités représentant plus de la moitié des surfaces tertiaires (bureaux, enseignement primaire et secondaire, logistique de froid). Ce dernier arrêté précise aussi les informations à faire remonter sur la plateforme Operat pour justifier de la réalisation ou non des objectifs d'économie énergétique imposés. Le délai d'un an va lui permettre de devenir elle-même opérationnelle pour recueillir en septembre 2022 les premières données de consommation énergétique de 2021 puis de 2020 ainsi que les années de référence déterminées par les assujettis entre 2010 et 2019.
D'autres textes et un recours
D'autres textes sont attendus.
Un deuxième arrêté Valeur absolue 2 doit venir compléter celui du 24 novembre 2020, pour la majorité des autres catégories d'activités sur le territoire métropolitain, a indiqué le 17 juin Marc Lereau, chef de projet Éco-énergie tertiaire au ministère de la Transition écologique. La mise en consultation publique de cet arrêté est prévue fin septembre - début octobre 2021. Il intégrera en outre « des modifications sur les conditions d'ajustement en fonction des variations climatiques et quelques adaptations » a-t-il déclaré. Un troisième prévu pour mai 2022 fera la voiture-balai pour les activités restantes...
Mais entre-temps, quatre importantes organisations professionnelles de commerces, hôtels et blanchisseries ont annoncé le 1er juillet avoir formé un recours contentieux au Conseil d'État contre l'arrêté du 24 novembre 2020 modificatif de l'arrêté « méthode » du 10 avril 2020 qui, écrivent-elles dans un communiqué, conduit « à une réglementation inachevée, incomplète, inintelligible et donc inutile et inapplicable ». Plateforme de données Operat « toujours pas fonctionnelle », « modalités absconses », indicateurs d'usages toujours inconnus, la charge est lourde ! Contre la mise en oeuvre, pas contre la loi : les organisations professionnelles disent partager « l'objectif du législateur d'améliorer la performance énergétique des bâtiments tertiaires ».
Les investissement Ségur à la rescousse
La loi a donc créé une obligation de résultats, ce qui est une première dans l'existant. Jusqu'alors, l'obligation de moyens se réduisait à un audit énergétique dont les préconisations pouvaient rester lettre morte. Les Ehpad auront donc intérêt à mettre à profit le délai supplémentaire d'un an pour se mettre en ordre de marche.
Leur premier levier est d'agir sur la performance énergétique du bâtiment, isolation, chauffage... et pour eux, le plan d'aide aux investissements (PAI) du Ségur de la santé est incontestablement une opportunité inédite. Dès cette année. Côté gros travaux, une instruction de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie du 23 avril 2021 invite d'ailleurs clairement les assujettis au décret tertiaire à frapper à la porte des agences régionales de santé sur le volet immobilier - 300 millions d'euros sont prévus en 2021. Les opérations aidées peuvent par exemple intégrer l'isolation du bâti, combles, murs, menuiseries extérieures ou la mise en place d'outils de suivi de consommation énergétique du bâtiment et de système de régulation et de pilotage.
Côté travaux moins lourds, le Ségur de la santé prévoit aussi une aide de 125 millions d'euros en 2021 pour les investissements « du quotidien ». Elle cible entre autres la suppression de chaudière au fioul, la mise en place de pompe à chaleur ou de panneaux solaires thermiques ou photovoltaïques, géothermie, petit éolien ou encore le remplacement d'équipements « confort d'été » pour de plus performants, brasseurs d'air par exemple.
Par ailleurs, les Ehpad peuvent mobiliser les aides financières des fournisseurs d'énergie dans le cadre du dispositif certificat d'économie d'énergie (CEE).
Audits énergétiques, collecte et fiabilisation des données, détermination de l'année de référence, plan d'actions... Les établissements ont donc intérêt à avoir vite toutes les cartes en main pour dessiner leur trajectoire d'économies d'énergie jusqu'en 2050.