Acteur et observateur privilégié, la FEHAP note des évolutions sensibles de fonctionnement du secteur associatif. Marie-Sophie Desaulle, sa présidente, nous en livre quelques tendances.
Diversification et souplesse, la force du secteur associatif
Selon vous, comment évolue le secteur non lucratif ?
La FEHAP compte parmi ses adhérents près de 1 720 établissements et services de soins et d'accompagnement pour personnes âgées. Notre secteur privé solidaire représente près de 45% de l'offre au sein du secteur privé non lucratif et près de 16% de l'offre nationale [1]. Comme tous les autres secteurs, nos établissements et services privés solidaires ont constaté une évolution dans la manière dont ils accompagnent les personnes âgées. Le profil des personnes accueillies a changé. Souvent atteintes de troubles neuro-évolutifs et du comportement, elles sont plus dépendantes et entrent en établissement pour une durée de séjour plus courte.
Nos adhérents doivent adapter leur organisation et leurs pratiques professionnelles aux attentes et aux besoins des personnes âgées qu'elles accueillent. Cela implique également de diversifier les espaces en fonction des besoins spécifiques des personnes ayant ou non des troubles du comportement. De la même façon, et grâce à la souplesse offerte par le modèle privé solidaire, nos adhérents proposent des réponses de plus en plus diversifiées : accueil de jour, hébergement temporaire, hébergement de nuit, voire EHPAD hors les murs.
Certains de vos adhérents semblent être en train de se regrouper. Est-ce une bonne chose selon vous ?
Oui, dans la mesure où les contraintes de gestion ont apporté beaucoup de complexité au secteur. L'intérêt du regroupement d'établissements réside dans la mutualisation des compétences et du pilotage par un siège associatif. Les fonctions supports, administratives, la démarche qualité et de gestion des risques sont assurées par une entité unique. Une gestion regroupée permet aussi de développer des perspectives de carrière, d'évolution et de mobilité pour les professionnels au sein d'un même groupe, éventuellement, sur plusieurs territoires.
Il ne faut toutefois pas oublier un enjeu majeur dans le cadre des regroupements, celui de la gouvernance. Afin d'anticiper d'éventuels conflits lors d'un rapprochement possible, les projets associatifs des organisations concernées doivent au mieux être similaires, sinon compatibles.
Quelles sont les mesures à prendre pour revaloriser efficacement les métiers ?
La question de la revalorisation des métiers du soin et de l'accompagnement est cruciale. Plusieurs vecteurs sont possibles. Bien sûr, il y a l'enjeu de la revalorisation salariale. Mais l'arbre ne doit pas cacher la forêt. En calant le modèle de la maison de retraite sur celui de l'hôpital, les métiers des soins et de l'accompagnement se sont eux-aussi technicisés. Il y a dès lors un risque que des métiers de lien social avec une forte dimension technique, deviennent des métiers à dominante technique, laissant une faible place au social. Redonner du sens, en redonnant sa place au social dans ces métiers est indispensable. Lors de la "Mission sur l'attractivité des métiers" menée par Myriam El Khomri, la Fédération avait proposé 6 axes de travail :
- La valorisation des métiers dans la fonction, qui permettrait de redonner du sens au périmètre de compétence pour que chaque professionnel puisse exercer pleinement son rôle. Cela passe notamment par le développement des pratiques avancées ou encore le renforcement des passerelles entre les métiers du grand-âge ou ceux du handicap.
- La valorisation de l'image des métiers via une campagne de communication positive.
- La valorisation financière, en commençant par les plus bas niveaux de qualification.
- La valorisation de la tâche, en augmentant les effectifs, en reconnaissant le temps nécessaire pour la coordination et en valorisant la promotion de la bienveillance et de la bientraitance, vis-à-vis des bénéficiaires mais aussi des professionnels.
- La valorisation du travail en équipe et des partenariats.
- La valorisation des métiers au regard des nouvelles technologies sont également des pistes à investir. Intégrer un axe innovation et nouvelles technologies aux projets associatifs permettrait, peut-être, aujourd'hui, de redonner envie aux plus jeunes de rejoindre nos métiers.