Après le Lab'Ehpad, c'est aujourd'hui vers le domicile que se tournent AG2R LA MONDIALE et la fondation I2ml [1]. L'idée : développer l'autonomie des plus âgés et améliorer leur « environnement de vie ».
DomIciLab, pour mieux vivre à domicile
Les Lab'Ehpad comme les Lab'Autonomie, initiés dans les groupes et notamment chez AG2R LA MONDIALE depuis plusieurs années pour améliorer la vie quotidienne des résidents, trouvent aujourd'hui un prolongement d'autant plus pertinent que les situations à domicile sont nombreuses et leur incidence économique majeure. Comme l'explique Eric Sanchez, Directeur des particuliers au sein des activités sociales d'AG2R LA MONDIALE, « éviter une institutionnalisation permet de limiter les coûts, pour la collectivité, pour les Agences régionales de santé qui financent les hébergements collectifs mais aussi pour les hôpitaux et les individus eux-mêmes, grâce à une démarche de prévention. Mais cela ne peut fonctionner qu'à la condition de permettre aux personnes de rester des citoyens engagés, et a minima des acteurs de leur vie. Cette philosophie s'inscrit ainsi dans une démarche vertueuse pour la personne comme pour l'économie du pays ».
Six champs d'observation
L'expérimentation qui doit démarrer sa phase opérationnelle dans quelques jours à peine se concentre sur six thèmes de travail : la nutrition, la culture, l'activité physique adaptée, les interventions non médicamenteuses, la fracture numérique, le lien social. « Il s'agit des conditions au bien-vieillir reconnues indispensables dans les différentes études », confirme Matthieu Faure, ingénieur des Mines, docteur en informatique à la fondation I2ml. « Notre priorité n'est pas de proposer des aides techniques pour adapter le logement mais bien d'évaluer les manques et besoins afin de permettre aux plus âgés de vivre sereinement chez eux ».
Quatre volets complémentaires
DomIciLab entend répondre à des questionnements multiples. Pour ce faire, les partenaires proposent quatre axes de travail et de réflexion.
Devenir un véritable centre de ressources et de documentation. Il s'agit ici d'identifier les besoins des personnes âgées en analysant la littérature existante, mais aussi de repérer les manques afin de mener des études complémentaires. « Si l'on s'aperçoit qu'il y a besoin de moderniser certaines études, la fracture numérique en est un bon exemple car les évolutions sont très rapides, nous pourrions être amenés à questionner les adhérents de nos partenaires, comme AG2R LA MONDIALE », ajoute Matthieu Faure. « Nous voulons surtout travailler au plus près des bénéficiaires. Nous construirons des cohortes en fonction des besoins émergents ».
Recenser les services existants, au niveau national et territorial.« Dans un premier temps, nous allons travailler sur les territoires du Gard, des Bouches-du-Rhône et de l'Alsace, puis nous étendrons l'expérimentation à d'autres régions », ajoute Matthieu Faure. L'objectif est à la fois d'essaimer les solutions éprouvées et testées, mais aussi de les améliorer, toujours en lien avec les bénéficiaires, par des ateliers de co-création, de prototypages, voire d'en créer de nouvelles s'il s'avère qu'aucune solution ne répond pleinement à leurs besoins.
Animer une coalition nationale et territoriale. Aujourd'hui, beaucoup de produits existent, soutenus par des acteurs locaux. « Mais sont-ils coordonnées, organisés en réseaux ? Utilisent-ils des outils compatibles et communicants ? », interroge Matthieu Faure. Les partenaires ambitionnent ainsi de créer un groupe de travail sur ces différents axes pour définir des objectifs, identifier des priorités, mobiliser compétences et savoirs et les soumettre à l'échelle territoriale. « Le terrain peut apporter des solutions, mobiliser son intelligence locale et ne doit pas être considéré seulement comme un expérimentateur ».
Former les jeunes, et notamment les jeunes précaires. Ce travail, engagé avec l'université de Nîmes, part d'un constat édifiant. Quantité de jeunes s'inscrivent à l'université, sans projets ni perspectives d'emploi, sans même savoir parfois vers quelle voie se diriger. « Or nous savons qu'il y a des besoins, 20% des demandes d'aide à domicile ne sont pas assurées par manque de personnel ». Il faut former les jeunes précaires, potentiellement intéressés par ces métiers, « à condition qu'ils soient volontaires car l'aide à la personne impose une certaine vocation ». Cependant, comme ces métiers sont assez peu connus et mal valorisés, « nous avons bon espoir qu'en travaillant sur la formation, nous pourrons participer au développement de la connaissance, susciter de nouveaux intérêts et des vocations pour l'ensemble des publics et notamment les publics précaires. » Au-delà de la formation, il s'agit aussi de proposer à ces futurs professionnels de nouveaux rôles, une montée en compétences et en responsabilités.
« Nous estimons qu'il peut y avoir plusieurs niveaux d'accompagnement à domicile », ajoute Eric Sanchez. « Nous souhaitons proposer un nouveau métier, plus "capé", pour gérer des acteurs multiples, dans le domaine d'Alzheimer par exemple. Il s'agirait de former des gestionnaires de cas, multi-acteurs, pour des multi-interventions, qui pourraient faire le lien, comme un gouvernant ou un "majordome", dans tous les domaines de la vie quotidienne. »
Pour rester à domicile, un certain nombre de conditions, tant physiques, qu'économiques, sociales, émotionnelles... sont nécessaires. « Bénéficier d'une organisation qui permet d'être accompagné dans son activité physique, nourri convenablement, bien soigné est nécessaire pour se sentir paisible. C'est une manière de se reposer sur des tiers de confiance pour gérer des situations du quotidien. »
Des évaluations nécessaires
Pas question toutefois de travailler dans le vent. « Il est essentiel de mesurer le gain pour les personnes à domicile, en qualité de vie, en cognition, en plaisir, en autonomie, en motricité, mais aussi les coûts évités pour la collectivité, en construction d'Ehpad, en gestion, en soin, hébergement..., ajoute Eric Sanchez. Nous inviterons ainsi les pouvoirs publics à réfléchir à un modèle pour reflécher les crédits du tout institutionnel vers le domicile pluriel. Comment permettre aux personnes d'exercer leurs droits et leurs potentiels, de rester chez eux le plus longtemps possible, dans une démarche de limitation de coûts et d'inclusion sociale de qualité ? »
Des expérimentations concrètes
DomIciLab va permettre de tester des hypothèses différentes dans plusieurs régions. Dans le Grand-Est par exemple, « on observera les métiers apprenants, à Nîmes plutôt des métiers de coordination, de multi-intervenants ; avec Marseille, nous travaillerons le lien entre l'hôpital de jour et le domicile pour accompagner des personnes vulnérables. Enfin, nous testerons l'activité physique adaptée. Il s'agit d'évaluer différents bras régionaux et thématiques, dans une démarche d'agrégation des résultats pour permettre d'adapter ces informations au plus grand nombre et redessiner ce paysage autrement. »
Ce programme devrait durer deux ans, mais les résultats seront livrés régulièrement. On trépigne déjà d'impatience !