Largement concernés par les problèmes articulaires, et en particulier l'arthrose, les résidents d'Ehpad doivent être évalués dès leur entrée en institution. La mise en place d'un traitement symptomatique et la mobilisation restent les clefs pour éviter la perte d'autonomie.
Douleurs articulaires : mobiliser les patients pour éviter la perte d'autonomie
Maladie articulaire conduisant à la destruction du cartilage, l'arthrose peut toucher diverses parties du corps humain. L'atteinte des pieds, genoux et hanches impacte directement la locomotion donc l'autonomie de la personne dans ses déplacements. L'arthrose des mains a, quant à elle, des effets sur les gestes d'appropriation de la vie quotidienne limitant la capacité de préhension, la possibilité de saisir, de serrer ou encore de réaliser des actes de précision. « Une partie non négligeable et sous-estimée des fragilités des résidents d'Ehpad et de leurs difficultés d'autonomie dans la station debout ou à la marche est liée à des problèmes rhumatologiques, en particulier d'arthrose », explique le Dr Emmanuel Maheu, rhumatologue[1].
L'évaluation et la prescription
À cet âge de la vie, il est difficile d'agir en prévention primaire puisque « les premiers facteurs de risque pour l'arthrose du genou, par exemple, sont la prise de poids, la sédentarité ou les traumatismes sportifs ou professionnels », explique-t-il. Aucune thérapeutique ne permet de reconstruire le cartilage. Cependant, les traitements symptomatiques ne sont pas à négliger. « Il est aujourd'hui nécessaire de prioriser l'évaluation locomotrice du résident dès son entrée en institution, soutient le Dr Maheu. Toute aussi importante que celle de son état cognitif, neurologique ou cardio-vasculaire, cette évaluation est à ce jour trop peu réalisée. » Elle peut pourtant être complétée de radiographies pour confirmer un diagnostic, si un problème articulaire est suspecté. La prescription des traitements agissant sur les symptômes et la douleur est également à encourager au regard des conséquences sur la qualité de vie et l'état psychologique du résident. « En cas de crises ou de poussées douloureuses, le personnel soignant ne doit pas hésiter à solliciter un rhumatologue, un rééducateur ou un médecin généraliste afin d'envisager un traitement symptomatique, comme des infiltrations (corticostéroïdes, acide hyaluronique) », précise le rhumatologue.
Des exercices simples et efficaces
En parallèle de cet accompagnement, des actions de prévention secondaire doivent être déployées dans les structures car « les troubles articulaires représentent un facteur majeur de chutes », explique le Dr Maheu. La clé ? Mobiliser les résidents. « Dès qu'une personne présente de l'arthrose, la priorité est bien sûr de soulager la douleur, puis de préserver sa fonction articulaire en la faisant bouger », insiste-t-il. Il encourage d'ailleurs les directeurs d'Ehpad à miser sur des espaces de rééducation et à solliciter les kinésithérapeutes.
Une faiblesse musculaire dans les cuisses par exemple peut se compenser par un travail ciblé. Le résident, assis sur une chaise, le dos bien calé, lève et maintient quelques secondes sa jambe devant lui pied flex pour former un angle à 90°. Cet exercice, répété dix à vingt fois, deux à trois fois par jour, permet de contracter et renforcer les quadriceps. Après quelques mois, le résident peut généralement de nouveau se relever seul de son siège.
Pour l'arthrose des hanches, il est possible de travailler la raideur caractéristique de la jambe, source de déséquilibre, en plaçant les personnes qui le peuvent sur un dispositif de pédalage, sous surveillance. « La prise en charge doit mettre l'accent sur un travail de rééducation de base, favorisant la pratique d'exercices appropriés que les personnes pourront ensuite réaliser en autonomie », souligne le Dr Maheu. Et d'ajouter : « Il peut aussi être nécessaire que le kinésithérapeute forme les personnels soignants et insiste sur l'importance de la marche quotidienne pour améliorer l'état articulaire, donc la mobilité et l'autonomie de la personne. »
À terme, il faut toutefois s'interroger sur l'intérêt de poser une prothèse totale. « Les médecins doivent évidemment l'envisager en fonction de l'état général de la personne », rappelle le Dr Maheu. Un résident dont toutes les pathologies sont maîtrisées, mais qui reste immobile dans son fauteuil car il n'arrive plus à bouger, est potentiellement éligible à la pose d'une prothèse de hanche, « surtout si sa coxarthrose est l'élément central nuisant à sa mobilisation et à son moral, soutient le médecin. Une prothèse de hanche peut transformer son quotidien et améliorer sa qualité de vie ». Idem pour le genou, bien que l'examen global doive être plus précis et l'indication bien pesée car la rééducation est plus longue, lourde et difficile que pour la prothèse de hanche. Des patients peuvent ainsi être opérés jusqu'à 90 ans si leur état général et les comorbidités le permettent.