16% (1) des salariés accompagnent un proche âgé. Réduction de l'investissement professionnel, besoin de temps pour les démarches, les conséquences sont lourdes pour l'investissement professionnel comme pour la qualité de vie. Le sujet est désormais identifié comme relevant des risques psycho-sociaux. Zoom sur la situation avec l'étude 2015 de Responsage, service de conseil et d'orientation des salariés aidants d'un proche âgé.
Employeurs : les salariés aidants de proches âgés attendent de l'aide
Avec une vingtaine d'entreprises clientes (Danone, Crédit Agricole Assurances, L'Oréal, Sanofi, Bayard Presse...) et 65 000 salariés ayants droit à ce jour, Responsage, service de conseil et d'orientation des salariés aidants, est un observatoire privilégié de la situation du salarié aidant. L'étude 2015 (2), qui s'appuie sur 750 entretiens de salariés, trace un tableau réaliste des salariés aidants. Au programme : isolement du salarié, méconnaissance des structures d'information... et légitimité des employeurs à aider leurs salariés sur le sujet.
Les salariés sont seuls face à leur problème
87% des appelants n'ont pas abordé le sujet de l'accompagnement de leur proche âgé avec leur responsable, la DRH, l'assistance sociale ou le médecin du travail de leur employeur.? 86% des appelants n'ont pris contact avec aucune des structures d'information dédiées : CLIC, CCAS, réseaux gérontologiques...
Les salariés considèrent l'entreprise légitime sur ce sujet privé. Parce que la parole n'est pas encore perçue comme libre sur le sujet, les salariés acceptent l'aide (confidentielle) proposée par leur employeur. Ainsi 95 % des salariés ont utilisé le service du lundi au vendredi alors que ce service proposé est accessible le samedi par téléphone et à tout moment par internet. 75% des appels ont eu lieu sur des plages de travail denses : 9-12h et 14h-17h.
L'accompagnement d'un proche est majoritairement porté par les femmes
Les femmes sont en première ligne :
?- part des femmes parmi les salariés ayants droit : 52%
- part des appels émanant de femmes : 69%
Les hommes doivent gagner leur place dans cette sphère encore très féminisée, comme ils l'ont fait dans le domaine de l'accompagnement de la petite enfance.
Les salariés ont besoin de soutien dans la durée?: 22% des appelants ont utilisé plusieurs fois le service. Lorsque l'employeur a mis le dispositif en place depuis plus d'un an, ce pourcentage s'élève à 29%.
Les salariés ont besoin de parler : 80% des salariés préfèrent le téléphone à internet.
La durée moyenne d'une conversation entre le salarié et le conseiller Responsage est de 16 minutes.
L'aide à domicile : le sujet dominant
Dans 46% des situations, le salarié souhaite mettre en place ou augmenter les services à domicile. ?12% des appels portent sur une question juridique (demande d'information sur la mise en place d'une mesure de protection ou sur l'obligation alimentaire).?12% seulement des appels portent sur la recherche d'une place en EHPAD à court terme, avec budget et périmètre géographique.?
Les salariés vivent des situations stressantes? : 2 appelants sur 3 font face à une situation particulièrement difficile : deux parents dépendants, parent avec Alzheimer ou en dépression, sortie d'hospitalisation, désaccord dans la fratrie...?
Les salariés habitent loin de leurs parents : la distance moyenne entre le salarié et son parent est de 200 km (hors proches vivant dans les DOM-TOM).
(1) Source : 5e baromètre santé et bien-être au travail publié par Malakoff Médéric paru en 2014
(2) 750 entretiens avec des salariés d'entreprises adhérentes à Responsage entre le 1er septembre 2013 et le 31 août 2015.
?Des financements existent?. Mettre en place des mesures d'accompagnement des salariés aidants demande un budget. Zoom sur des pistes souvent méconnues.
Les excédents des régimes de protection sociale
Les grandes entreprises peuvent envisager d'utiliser les excédents des régimes de protection sociale. Leur assureur mettra en place un protocole financier pour alimenter un compte de participation aux bénéfices des régimes de protection sociale.* Les entreprises peuvent ensuite, dans une certaine mesure, disposer des montants. Elles pourront, entre autres options, financer des mesures d'accompagnement des salariés aidants.
A noter : l'assureur règle lui-même la facture au prestataire.
Les excédents des "contrats responsables"
La mise en conformité des régimes de santé au regard des "contrats responsables" (des contrats de santé collectifs à adhésion obligatoire) génère également une piste de financement.
Le décret du 18 novembre 2014 a défini des plafonds de garantie pour certains postes comme l'optique. De cette limitation peut ressortir baisse de la garantie et par conséquence une baisse de la prime d'assurance. Dans certains cas, l'économie va de 3% à 6%...
Le retour sur investissement
La récente étude de Malakoff Médéric "L'absentéisme maladie des salariés du secteur privé" pointe que le taux d'absences non prévues des salariés aidants est 40 % supérieur à celui des salariés n'ayant pas de personne à charge. Côté présentéisme, écoutons cette salariée aidante : "J'ai appelé sur mon temps de travail 27 services pour trouver une garde de nuit pour sa mère. En vain..."
Le retour sur investissement d'un service d'information expert du salarié aidant est une évidence : à budget équivalent, l'entreprise gagne des ressources humaines. Selon l'étude " Supporting working carers ", réalisée en Grande Bretagne en 2013, les entreprises mettant en place des mesures pour soutenir les salariés aidants constatent entre autres bénéfices :
- dans 88 % des cas une réduction des congés maladie et de l'absentéisme
- dans 85% des cas une amélioration de l'engagement des employés.
Enfin, accompagner les salariés aidants c'est accompagner plus vite les personnes âgées, qu'il s'agisse d'organiser les services à domicile, d'équiper le domicile ou de prévoir une entrée en établissement. Une dimension à laquelle les employeurs de la filière gérontologique seront assurément sensibles.
* Dans le respect des règles définies du Code des Assurances avec l'assureur.