Pour améliorer le travail des soignants comme la qualité de vie des résidents, toute l'architecture, de l'organisation de l'espace aux détails techniques et décoratifs (sols, couleurs, signalétique, mains courantes...) doit être mobilisée. Les bâtiments deviennent alors des outils facilitant le bien-être et l'échange.
Espace, couleurs et formes pour faciliter l'adaptation
Il n'existe pas de modèle architectural unique et reproductible à l'infini. Mais il est clair qu'un environnement inadapté complique le maintien de l'autonomie jusqu'à devenir un obstacle à la qualité de la prise en charge. D'où la nécessité d'intégrer le projet architectural à un projet d'établissement clair et pensé au préalable.
Les résidents d'Ehpad sont souvent atteints de plusieurs handicaps ou troubles cognitifs, entravant la mobilité, l'audition ou la vue. Il est dès lors essentiel pour leur permettre de conserver leur autonomie maximum de travailler sur leur environnement et leur circulation dans les espaces, en privilégiant la continuité avec le domicile.
« Les matériaux, matières, couleurs, odeurs, sons, la chaleur... sont autant d'éléments qui aident le résident à se repérer dans l'espace et dans le bâtiment », expliquait il y a quelques mois Didier Cornilliat, responsable Conseils et Études chez Gérontim, une filiale de la FNAQPA. « Une ambiance sonore permet d'identifier un lieu ou un étage, une odeur indique la proximité de la cuisine ou d'une salle de soins... Et ce en toute sécurité, grâce à la lumière, aux contrastes qui permettent d'appréhender les lieux. Le repérage et la signalétique adaptée facilitent la déambulation. Une lumière naturelle aide à différencier le jour de la nuit ».
Jouer avec les couleurs
Comme l'explique le Dr Danièle Treussard Marchand[1] , la couleur modifie le caractère du lieu (agréable/désagréable, reposant/excitant), participe à la création de repères, à la signalétique et peut faciliter la compréhension de l'espace lorsque la vue baisse ou évolue. « D'une manière générale, les personnes très âgées perçoivent mieux les couleurs chaudes et saturées du spectre chromatique et voient aussi mieux les couleurs les plus lumineuses notamment le rouge vif, le orange et le jaune. Il faut donc privilégier et accentuer les contrastes pour une meilleure perception. »« L'ambiance induite par l'utilisation des couleurs participe au confort des lieux et contribue à l'image de l'établissement auprès des visiteurs. Les couleurs chaudes plus gaies qui encouragent le mouvement et l'activité peuvent être utilisées dans les espaces de vie et les couleurs froides plus apaisantes dans les chambres. » Par ailleurs, les couleurs varient et se nuancent selon qu'elles sont exposées à un éclairage naturel, à privilégier le plus possible, ou une lumière artificielle.
Les surfaces trop réfléchissantes (sols cirés, grands miroirs, aluminium brillant) génèrent de l'anxiété. Il faut donc privilégier des surfaces mates. Et intégrer dans la conception des espaces des zones tampons, qui facilitent la transition entre les zones fortement éclairées et les zones moins lumineuses.
Favoriser la liberté de choix
La déambulation est l'un des symptômes majeurs des troubles neurodégénératifs. Pour éviter l'angoisse des culs de sac, les parcours « en boucle » sont aujourd'hui intégrés dans nombre d'établissements. Il est intéressant quand cela est possible de rendre ce parcours stimulant en proposant de la diversité visuelle (aquarium, photos aux murs, signalétique colorée...).
De manière plus générale, le résident doit pouvoir conserver sa liberté de choix et de décision. C'est ainsi que des couloirs épurés, qu'on préfèrera désencombrés et larges, comme les portes d'accès aux chambres, lui permettront de se promener sans l'appréhension de se cogner ou de chuter. Il est intéressant de noter que cette liberté de circulation des résidents aurait un impact positif direct sur la disponibilité des soignants. « Ils sont ainsi moins soumis au stress d'une surveillance permanente », indique le Dr Danièle Treussard Marchand.
Par ailleurs et en réponse à l'augmentation des maladies professionnelles, elle confirme dans son étude qu' « une mauvaise distribution du bâtiment ou simplement la mauvaise implantation d'un local peut entraîner une augmentation conséquente du kilométrage parcouru par le personnel. Une mauvaise conception des fenêtres, des volets ou des salles de bain peut renforcer la dépendance des résidents et entraîner une surcharge de travail pour le personnel ». Ces effets ressentis chaque jour ont un impact majeur sur les résidents comme les personnels.
L'étude préalable permet de mettre en lumière ces éléments et d'envisager des alternatives si les premières propositions se révèlent insatisfaisantes.