Dans le n° 163-octobre 2024  - Guerre des générations  17159

Et si les seniors étaient la solution plutôt que le problème ?

J'ai désormais l'habitude de vous partager dans cette tribune des initiatives inspirantes, mais c'est aujourd'hui un cri de colère que je souhaite vous livrer[1] !

En période de crise budgétaire, il est facile de chercher des responsables. Les baby-boomers sont accusés d'être à l'origine de tous les maux : du dérèglement climatique à la crise sociale. Mais en perpétuant ce discours, nous creusons le fossé entre les générations et risquons d'aggraver les problèmes que nous prétendons résoudre.

Une forte montée de l'âgisme

Le véritable enjeu ici, c'est l'âgisme - cette discrimination liée à l'âge -, une forme de préjugé aussi néfaste que le racisme ou le sexisme. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) s'en est d'ailleurs alarmée dans un rapport de 2021, révélant que l'âgisme a des répercussions graves sur la santé et le bien-être des personnes âgées. Isolement social, insécurité financière, diminution de la qualité de vie et même décès prématurés en sont les conséquences directes. En France, près de 3 000 suicides sont enregistrés chaque année chez les plus de 65 ans, un taux de suicide bien plus élevé que dans le reste de la population. Selon ce même rapport, 6,3 millions de cas de dépression dans le monde sont liés à l'âgisme. En maintenant une image négative des seniors, perçus comme responsables ou inutiles, nous contribuons à l'émergence de pathologies qui, à leur tour, pèsent sur nos dépenses de santé. Ce n'est donc pas le vieillissement qui coûte cher, mais bien la discrimination qui l'accompagne. Nous avons tous une responsabilité collective dans ce phénomène.

Les seniors, piliers méprisés de notre économie et de notre société

L'idée qu'une société vieillissante serait un fardeau financier est fausse. L'OMS, dans son rapport, cite une étude britannique qui montre que les contributions financières des seniors - à travers les impôts et leurs dépenses - excèdent de plus de 50 milliards de livres sterling le total des dépenses engagées pour eux (retraites, protection sociale et soins de santé).

Les seniors sont aussi de grands consommateurs : selon le CRÉDOC, les plus de 50 ans représentent 54 % de la consommation en France. En outre, leur rôle en matière de redistribution des richesses est crucial : 56 % d'entre eux aident financièrement leurs enfants, selon le baromètre IFS-GPMA de 2023. Et ce n'est pas tout : 50 % des responsables associatifs sont des retraités, selon France Bénévolat, ce qui témoigne de leur engagement social essentiel.

Alors oui, les jeunes se précarisent, mais les seniors ne sont pas à blâmer. Le vieillissement de la population pourrait même être une formidable opportunité de croissance, à condition que nous fassions preuve d'ambition. Les métiers du grand âge, par exemple, nécessitent depuis longtemps d'être revalorisés, tout comme le secteur médico-social, en quête de souffle. La silver économie, avec des initiatives comme Silver Valley ou la Silver Alliance, offre un potentiel énorme dans des domaines comme le tourisme ou la prévention. D'ailleurs, de nombreux jeunes sont à la tête d'innovations dans ces secteurs, comme le montrent les créateurs d'entreprise participant aux Défis d'Or, qui se tiendront prochainement à l'opéra de Lyon dans le cadre du 18e Défi-Autonomie.

La transition démographique représente un défi majeur, mais c'est aussi une chance que nous devons saisir. Encore faut-il le réaliser.