L'incontinence est un syndrome gériatrique courant chez les personnes âgées. Pour autant, ses nombreuses complications, en l'absence de prise en charge, conduisent à une aggravation de la santé générale de la personne. Les équipes soignantes doivent s'inquiéter précocement du suivi à mettre en place et favoriser, si possible, la rééducation.
Incontinence urinaire : agir en prévention
« L'incontinence chez la personne âgée a des origines multiples et variées », explique le Dr Yves Passadori, directeur médical du pôle de gérontologie au sein du Groupe hospitalier de la région de Mulhouse et Sud Alsace (GHRMSA). L'incontinence par urgenturie ou urgence mictionnelle causée par une hyperactivité vésicale (infection urinaire, Parkinson, accident vasculaire) est l'incontinence (voir encadré) la plus répandue chez les seniors. Les résidents d'Ehpad ont aussi fréquemment des incontinences fonctionnelles liées à des difficultés de déplacements.
Des conséquences lourdes
Un retard ou une mauvaise prise en charge impacte directement la qualité de vie de la personne âgée. L'Association française d'urologie propose d'ailleurs un questionnaire d'évaluation de la qualité de vie liée à l'incontinence urinaire de la femme - Contilife - pour mesurer objectivement son effet et prendre ainsi les mesures appropriées. « En utilisant ce type d'échelle, les professionnels de santé se rendent objectivement compte que les effets de l'incontinence urinaire non prise en charge se répercutent sur quasiment tous les critères de la qualité de vie des personnes âgées concernées », indique le Dr Passadori. Elles vont par exemple spontanément réduire leurs activités sociales par crainte d'une fuite, aggravant, de fait, les risques d'atteinte de leurs capacités fonctionnelles. Ce qui n'est pas sans conséquence sur leur autonomie.
« Nous observons également une augmentation des syndromes dépressifs chez les personnes incontinentes en raison de la honte ressentie, ajoute le Dr Passadori. La situation est paradoxale. Malgré la honte, elles ne vont pas pour autant le signaler à leur médecin, ce qui entraîne des retards de prises en charge. » Certaines personnes âgées vont même de leur propre initiative, s'orienter vers des dispositifs médicaux type protections urinaires. « Pourtant, l'utilisation des palliatifs peut aussi affecter leur moral, poursuit le médecin. C'est une question de dignité. »
Attention aux chutes, fractures et dermatites
« En cas d'hyperactivité vésicale, les personnes vont se lever la nuit pour uriner, au risque de tomber », prévient le Dr Passadori. L'incontinence est aussi à l'origine de troubles du sommeil. À partir de trois levers nocturnes, la qualité du sommeil se trouve réduite.
Enfin, une mauvaise prise en charge peut entraîner des dermatites associées à l'incontinence (DAI). Fréquentes car liées à des problèmes de macération cutanée, elles sont souvent confondues avec des escarres. Il est nécessaire d'en traiter la cause et de mettre en place des palliatifs, notamment des pommades sous forme de films pulvérisés au niveau du pli inter-fessier et du siège pour protéger la peau, qui peut ainsi se régénérer.
Encourager la rééducation
Les équipes soignantes doivent systématiquement proposer une prise en charge rééducative, bénéfique pour tous les types d'incontinence - à l'exception seulement des personnes présentant des troubles cognitifs sévères associés à des problèmes de mobilité. « Le recours aux protections urinaires doit être au maximum limité à la nuit, et si possible, être évité, rappelle le Dr Passadori. À ce jour, la mise en place de ce palliatif relève principalement d'une décision de l'aide-soignante, l'infirmière n'étant pas nécessairement partie prenante. Pourtant, cette initiative devrait faire partie d'un plan de soins élaboré avec l'ensemble de l'équipe soignante, et en accord avec le patient. » De même que le choix de la médication n'est pas toujours opportun en raison des effets secondaires sur la cognition.
Si la personne âgée n'a besoin que d'une seule personne pour se déplacer, il est possible de privilégier les techniques de rééducation comportementale à savoir des mictions assistées, qui ont prouvé leur efficacité. Ainsi, le soignant peut aller voir la personne âgée toutes les trois heures environ, pour lui proposer de se rendre aux toilettes. « L'objectif est de la stimuler et de l'encourager à aller uriner, la reproduction régulière de cette action permettant de réguler les mictions », explique le médecin, qui insiste sur l'importance de maintenir une activité physique chez les personnes âgées afin d'entretenir leurs capacités fonctionnelles et leur permettre de se rendre aux toilettes.