L'informatisation est un levier important dans la sécurisation du circuit du médicament en EHPAD. Elle requiert toutefois une forte implication de la direction et une concertation de l'ensemble des acteurs impliqués (en interne comme en externe) dans la prise en charge médicamenteuse des résidents. La réussite du projet repose sur un état des lieux préalable des points forts et faibles de l'organisation interne, une définition claire des besoins, et une culture des bonnes pratiques de la gestion des risques. Pour nombre d'EHPAD, ça coince encore !
Informatisation du circuit du médicament : votre EHPAD est-il prêt ?
Le réflexe est loin d'être acquis. Selon une étude réalisée, en 2014, par l'agence régionale de santé (ARS) Ile de France, sur le processus de prise en charge médicamenteuse (PECM) en EHPAD, 87?% des établissements ont un logiciel de prescription mais seuls 25?% déclarent l'utiliser systématiquement. Plus de 36?% des établissements interrogés déclarent retranscrire la prescription médicale (toujours ou souvent) au cours d'une ou plusieurs étapes de la PECM. Ce constat francilien peut être dupliqué au niveau national. Première étape du circuit du médicament, la prescription en EHPAD s'informatise dans les outils mais peu ou mal dans les pratiques.
Cette sous-utilisation de l'informatique en EHPAD engendre une retranscription des prescriptions - qui n'est d'ailleurs pas autorisée (arrêté du 6 avril 2011, art 13) - pouvant être génératrice d'erreurs. "Une ordonnance papier va faire l'objet de deux ou trois retranscriptions ; pour préparer le pilulier, sur un agenda papier, sur les tableaux de planification des soins, accompagnement et actes techniques... Mais il n'existe pour l'heure aucune contrainte réglementaire qui impose aux médecins libéraux intervenant en EHPAD l'informatisation des ordonnances. Toutefois, il ne faut pas jeter la pierre aux médecins traitants. Ils ont déjà leur propre logiciel dans leur cabinet en ville. Ils interviennent dans plusieurs EHPAD et n'ont pas le temps apprendre l'utilisation de 3, 4 logiciels différents", explique Nicolas Pistorio, consultant indépendant, expert IT santé & médico-social.
"Le sentiment de limitation de leur liberté de prescription lorsque le livret thérapeutique est intégré dans le logiciel est également un point sensible. "Un accompagnement des médecins libéraux est nécessaire pour faciliter cette utilisation", préconise l'étude de l'ARS Ile-de-France.
"Actuellement, aucun standard national n'impose aux éditeurs de logiciels un format de saisie précis. Or, il faut une gouvernance nationale pour imposer des standards techniques et ergonomiques. Une interface unique de présentation des prescriptions, « ordonnance universelle » permettrait aux médecins d'utiliser ainsi les logiciels de l'EHPAD de façon intuitive", considère Nicolas Pistorio.