Les sujets spectaculaires et anxiogènes ne doivent pas occulter la réalité positive de l'accompagnement quotidien
Président du Syndicat national des établissements et résidences privés pour personnes âgées (Synerpa) depuis presque 10 ans, Jean-Alain Margarit confirme encore la nécessité d'agir du domicile à l'EHPAD. A l'image de son syndicat qui se présente désormais comme « la première confédération du parcours de la personne âgée ». Interview.
Comment se porte le secteur privé du grand âge ?
Notre secteur poursuit son développement sur les trois champs de notre Confédération : EHPAD, Services à Domicile et Résidences Services Seniors. C'est logique au regard des besoins inhérents au vieillissement de la population. Si nous nous félicitons de la croissance de notre activité, nous regrettons que des freins subsistent encore, notamment sur la tarification des Services à domicile dans certains départements et sur les réglementations en matière d'urbanisme pour les Résidences Services Seniors dont la spécificité n'est pas complètement prise en compte.
Le SYNERPA s'est progressivement implanté sur l'ensemble de la filière. Comment travaillez-vous les passerelles du domicile à l'EHPAD ?
Au sein de la Confédération SYNERPA, nous réunissons les acteurs du Parcours, ce qui nous permet de travailler concrètement sur ces passerelles. Cela est d'autant plus évident que certains de nos adhérents opèrent à la fois sur les EHPAD, les Services à Domicile et les Résidences Services Seniors. Le plus important pour nous est de disposer de la pratique professionnelle de chacun pour pouvoir développer et anticiper les besoins et attentes des seniors. Par exemple, la relation entre Services à Domicile et EHPAD permet, lorsque la situation le nécessite, d'assurer plus facilement la transition des personnes de leur domicile vers les établissements.
Quels sont aujourd'hui pour vous les enjeux de développement ?
L'enjeu majeur est un enjeu de société. Il est nécessaire que les Français, les médias, les pouvoirs publics prennent pleinement la mesure du vieillissement et l'apport incontournable de notre secteur. Il faut d'abord que chacune et chacun envisage et anticipe davantage ce que sera sa vie dès la retraite. Ensuite, il faut que les médias, l'opinion regardent plus objectivement notre secteur et l'évolution qualitative considérable qu'il connaît. Les sujets spectaculaires et anxiogènes ne doivent pas occulter la réalité positive de l'accompagnement quotidien réalisé par les EHPAD et leurs équipes. Le modèle français est considéré comme exemplaire dans de nombreux pays. L'EHPAD Bashing déforme injustement les perceptions et détourne des vocations. Enfin, il faut que les pouvoirs publics poursuivent leurs engagements en faveur du Grand Âge et s'en emparent comme d'une question qui engage non pas un secteur mais tout notre pays.
Plus de 200 000 emplois seront à pourvoir dans le secteur des EHPAD d'ici 20 ans. Comment pensez-vous pouvoir former ? Recruter ? Fidéliser ?
Le SYNERPA a une politique de formation, de professionnalisation très volontariste. Nous investissons au sein de la branche professionnelle près de 100 millions d'euros par an dans la formation et l'apprentissage, et ce depuis des années. Notre exigence continue de qualité va de pair avec notre exigence soutenue d'expertise de nos équipes. Nous offrons des postes en CDI, à temps plein et sur tout le territoire. Compte tenu des besoins, nous proposons des évolutions de carrière importantes grâce à la formation. Là aussi, la perception du secteur doit changer. Et elle change. A l'éducation nationale, aux jeunes, aux personnes en reconversion professionnelle de se saisir des opportunités que nous apportons.
Que pensez-vous du rapport de Pierre Ricordeau et de la marche arrière de la ministre reconnaissant les effets négatifs de la réforme de la tarification ?
Ce rapport est un travail très intéressant et, de surcroît, il vient confirmer les annonces que la Ministre de la Santé avait faites. Il ne s'agit pas d'une marche arrière mais plutôt d'un ajustement. La réforme de la tarification est nécessaire et l'essentiel pour nous est qu'elle soit mise en oeuvre. Le SYNERPA restera très vigilant sur son application.
Pascal Champvert évoquait dans nos pages une crise sociétale sans précédent. Quel est votre point de vue sur la maturité de la société concernant cette question de la prise en charge de la perte d'autonomie ?
Comme je l'indiquais, au-delà de notre secteur, c'est toute la société qui doit se saisir de la question de son vieillissement, et pas uniquement de la perte d'autonomie, même si bien évidement cela demeure un sujet central. Je pense que le grand public, parce qu'il peut le constater dans sa famille ou son entourage, est plus conscient des enjeux liés à l'allongement de la vie. Nous ressentons un intérêt croissant des élus, des médias, des entreprises et des particuliers lors de nos événements comme le SYNERPA Tour, notre Congrès ou lors des manifestations comme la Journée des Aidants ou les salons.
Emmanuel Macron a annoncé vouloir travailler sur la question du financement de la perte d'autonomie. Quelles sont vos propositions ?
Poser la question du financement est en soi nécessaire au regard de l'évolution démographique sur les vingt prochaines années et de la demande croissante d'accompagnement qui va de pair. Mais au-delà, c'est aussi poser la question plus globale de la place que la société française du 21ème siècle souhaite donner à ses personnes âgées. Nous sommes, bien sûr, plus que prêts à participer à toute réflexion sur le sujet. Nous verrons le moment venu quelles en seront les orientations et, bien entendu, nous y apporterons nos propositions et notre contribution active.