Je suis une personne à risque
C'est fait ! Je sais désormais grâce aux médias qui annoncent la campagne de vaccination en prévention de la grippe (et je m'en réjouis car notre pays avait un retard à combler) que cela me concerne car je fais largement partie des « personnes à risque de plus de 65 ans » selon la formule utilisée. Oui, j'ai plus de 65 ans... et même bien au-delà.
Plus encore j'entends aussi, selon la source, que je fais partie « des personnes fragiles », élégante formule... Je vous concède que mes propos peuvent sembler dérisoires en ces temps si incertains et compliqués. Mais j'ai toujours considéré que la sémantique était un marqueur déterminant. D'autant que notre langue française est suffisamment riche. Albert Camus disait avec pertinence « Mal nommer les choses, c'est ajouter au malheur du monde ».
Loin de moi l'idée de paraphraser Camus, mais mal désigner les personnes, c'est aussi les stigmatiser (terme tant employé, mais si peu compris). Et malheureusement, avec la force de l'habitude, les formules s'emploient et traversent le temps sans plus de réflexion.
Je concède que vieillir est un risque. Tout comme vivre finalement. Mais est-ce une raison pour ne pas revisiter certains propos ? Administrateur (bénévole) d'une grande banque, j'appris voilà deux années « qu'atteint par la limite d'âge », je devais quitter ce mandat d'administrateur. Règlement oblige et cela ne me choqua en rien. Cependant j'ai soutenu que l'âge n'était pas en soi une maladie et que la formule « atteint par » était inappropriée. Je la fis donc remplacer le jour de l'assemblée qui me voyait démissionner de ce mandat par « Au bénéfice de l'âge » bien plus élégante et adaptée de mon point de vue. Il faut parfois mener de petits combats pour une grande cause. Et celle de l'âge peut aussi commencer ainsi. Oui, « Les vieux méritent mieux ».