L'Espace éthique de la FHF rend son avis sur les directives anticipées
La loi du 2 février 1016 créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie, dite loi Claeys-Leonetti, a modifié les règles relatives aux directives anticipées (DA). Si elles existaient déjà dans la loi Leonetti de 2005, elles n'étaient valables que trois ans et pouvaient ne pas être suivies par le médecin. La nouvelle loi prévoit que les directives anticipées deviennent "contraignantes", c'est-à-dire qu'elles s'imposeront aux médecins "sauf en cas d'urgence vitale pendant le temps nécessaire à une évaluation complète de la situation" et lorsque elles apparaissent "manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale".
L'Espace éthique de la Fédération hospitalière de France (FHF), animé par le Pr Régis Aubry a rendu un avis sur "les contraintes éthiques des directives anticipées contraignantes concernant une personne atteinte d'une maladie grave". Une réflexion éthique qui concerne également les professionnels en EHPAD et tout particulièrement les médecins coordonnateurs. Cet avis met en exergue la nécessité pour le médecin de consacrer du temps, de la disponibilité, et "une compétence en termes de communication délicate" pour anticiper la rédaction de directives anticipées chez une personne malade. "Au final l'enjeu des DA n'est pas tant qu'elles soient écrites par tous mais qu'elles constituent un outil de dialogue favorisant le cheminement de la personne atteinte d'une maladie grave, et traduisant le plus fidèlement possible l'expression de son autonomie de décision", notent les experts. Et de pointer du doigt les risques de dérives des directives anticipées. Le manque de temps, le manque de disponibilité, le manque de formation du médecin à la communication en situation complexe, la non-reconnaissance et la non-valorisation effective de l'acte de communication comme un acte soignant à part entière, ne risquent-ils pas de conduire à un dévoiement de l'outil potentiel que sont les DA, qui pourraient ne devenir alors qu'un formulaire de nature administrative toujours proposé mais renseigné de façon inadéquate ?
Le résultat paradoxal pourrait également être que les DA deviennent contraignantes alors qu'elles ne seraient pas issues d'un cheminement progressif et partagé. Le résultat probable sera dans ces conditions que peu de professionnels de santé soutiendront le dispositif et peu de personnes écriront des directives anticipées.
L'Espace éthique de la FHF recommande la mise en place "d'un dispositif d'accompagnement" pour l'élaboration des directives anticipées. Une approche graduée et échelonnée dans le temps, un temps partagé entre un médecin et/ou un infirmier et/ou un psychologue et/ou la personne de confiance ou un proche, pour permettre à la personne malade de cheminer à son rythme, dans le respect de ses limites, de ses systèmes de défense psychique et de la capacité des soignants à élaborer des hypothèses d'évolution de la maladie et des prises en charge. Un temps de communication et de dialogue avec les malades en fin de vie qu'il faudrait valoriser dans la pratique des soignants.