La transition démographique est en oeuvre. Depuis 2015, pour la première fois en France, le nombre des plus de 60 ans est supérieur à celui des moins de 20 ans.
L'habitat face à la société de la longévité
Entre 2013 et 2070, le nombre des plus de 75 ans va augmenter de 8 millions. Dans le même temps, celui des plus de 85 ans va quadrupler [1]. L'arrivée à un âge avancé des premières cohortes des plus âgés des baby-boomers va débuter en 2026 et accélérer la présence des plus de 80 ans pour la trentaine d'années qui suivra.
L'habitat, enjeu de la prévention
L'ensemble de ces éléments nécessite de mobiliser la société civile comme les politiques publiques pour s'inscrire dans une dynamique de transition démographique à travers, en particulier, une approche globale de la prévention et le support d'une vision plurielle de l'habitat. Un habitat peu adapté peut devenir un risque au quotidien pour des personnes de plus de 70 ans. Par ailleurs, la fréquence d'une perte d'autonomie sévère se renforce considérablement à partir de 80 ans.
La société de la longévité, marquée autant par la hausse du nombre de seniors que par une croissance jamais égalée de l'espérance de vie, implique de faire de la prévention une priorité absolue. La prévention touche tout autant la pratique d'activités physiques que la nutrition. Mais elle concerne aussi les questions d'adaptation du logement et de l'environnement des personnes. Finalement l'habitat contribue à une bonne politique des âges. Des aménagements adéquats retardent significativement la dégradation de l'état de santé et des risques de chute des personnes âgées concernées et peuvent améliorer la situation d'autonomie des seniors [2].
Une prévention globale
Face à la hausse attendue du nombre d'aînés, il s'agit aussi bien de repenser le parcours de vie des plus âgés dans une continuité entre le domicile et les lieux d'accueil collectifs via la mobilisation d'outils de suivi et d'intervention à distance, un changement de regard sur les modes d'habitat, l'élaboration d'une culture de la pluriactivité des centres de soin et un décloisonnement des métiers de l'accompagnement social. Les technologies numériques et émergentes pouvant faciliter cette approche.
Un autre fait notable, largement documenté par la littérature scientifique, montre l'importance du maintien des liens amicaux et de la confrontation intellectuelle pour diminuer la prévalence de maladies neurodégénératives. Faut-il rappeler que si l'espérance de vie s'accroit et que les seniors sont bien plus « jeunes » aujourd'hui qu'hier [3], les réalités sociales restent prégnantes. Une donnée symbolise la permanence de ces inégalités : l'écart d'espérance de vie chez les hommes entre les 5 % les plus riches et les 5 % les plus modestes est de 13 ans [4]...
Serge Guérin
Professeur à l'INSEEC GE. Parmi ces derniers ouvrages : La société résiliante (avec V. Fournier), Fauves, 2022, Au services de la vie, Les métiers du service à la personne, Fauves, 2021, Les Quincados , Calmann-Lévy, 2019 et co-auteur de La Silver économie, La Charte, 2018 et de La guerre des générations aura-t-elle lieu ?, Calmann-Lévy, 2019